Au lendemain des européennes et à trois semaines des législatives anticipées annoncées par Emmanuel Macron, le paysage politique français est plus que jamais scindé en trois blocs, avec une extrême droite en position de force, une gauche morcelée et un camp central pris en étau.
À droite, le RN tout-puissant mais seul
Le Rassemblement national, qui compte 88 députés depuis 2022, a déjà annoncé qu’il ne ferait pas d’alliance avec d’autres partis, mais proposerait une « plateforme électorale » qui « s’adressera à tout le monde en dehors des partis politiques », a expliqué le vice-président sortant de l’Assemblée Sébastien Chenu lundi.
« On peut avoir des gens qui ont fait d’autres choix politiques, qui ont soutenu les LR (Les Républicains, droite), qui ont soutenu Emmanuel Macron dans le passé ou (…) la gauche, mais qui se retrouvent sur nos propositions », a-t-il espéré.
Dans l’immédiat, Éric Zemmour, président de Reconquête qui enverra au Parlement européen les premiers élus de sa courte histoire – le parti a été fondé en 2021 – s’est dit ouvert à « la plus vaste union des droites ». Aux législatives de 2022, la formation d’extrême droite, partie seule, n’avait pas réussi à envoyer le moindre député à l’Assemblée, malgré les 7 % de l’ancien éditorialiste à la présidentielle.
Chez LR, qui dispose de 57 députés, la ligne officielle est de refuser toute alliance avec l’extrême droite, mais des arrangements locaux, au cas par cas, pour sauver un siège ne sont pas exclus.
À gauche, le combat de l’union
Les cartes sont rebattues entre La France insoumise (LFI, gauche radicale), jusqu’ici dominateur avec ses 74 députés, et ses ex-alliés de l’alliance de gauche Nupes, à commencer par le Parti socialiste (PS), revigoré par le bon score de Raphaël Glucksmann aux Européennes (13,83 %) et ses 4 points d’avance sur Manon Aubry (LFI, 9,89 %).
Déjà, le patron des socialistes Olivier Faure appelle à constituer un « front populaire », à l’unisson du franc-tireur insoumis François Ruffin et du communiste Fabien Roussel – qui n’a guère d’autre option pour sauver ses 12 députés au vu des 2,36 % de son candidat Léon Deffontaines.
Même appel au « rassemblement le plus large possible » de l’écologiste Marine Tondelier, affaiblie par les piteux 5,5 % de Marie Toussaint.
Mais sous quelle bannière ? Pour LFI, le meilleur socle reste celui qui a remarquablement marché en 2022, permettant à 151 députés de gauche d’être élus au Palais Bourbon : le programme de la Nupes. Mais comment convaincre que les désaccords profonds des derniers mois entre le mouvement de Jean-Luc Mélenchon et les autres formations puissent s’effacer aussi rapidement ? La stratégie de la conflictualité de Mélenchon et ses outrances posent aussi question.
Au centre, l’obligation de ratisser large
Le camp macroniste, composé de trois partis de centre-droit, Renaissance créé par Emmanuel Macron (159 députés), le Modem de François Bayrou (50 députés) et Horizons fondé par Édouard Philippe (30 députés) ne dispose plus depuis 2022 de la majorité absolue.
Dès dimanche, le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, proche du chef de l’État, a annoncé que la majorité « donnera l’investiture » aux députés sortants, y compris d’opposition, appartenant au « champ républicain » et souhaitant « s’investir dans un projet clair » autour de la majorité présidentielle.
Lundi, l’ancien ministre Clément Beaune a rappelé que pour la majorité ce champ républicain ne comprenait pas La France insoumise.
Sur sa gauche, ce pôle pourrait séduire certains socialistes si par ailleurs la direction du parti s’allie à LFI comme ça avait été le cas dans la Nupes en 2022.
À droite, la partie modérée du camp LR pourrait se résoudre à un accord ou au moins un échange de bons procédés avec la majorité pour sauver quelques sièges, mais ce n’est pas la ligne officielle.