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Le secteur du commerce se réinvente à Esch-sur-Alzette


L’événement sera désormais organisé tous les ans pour favoriser les contacts entre tous les acteurs du secteur.

Comment dynamiser le commerce local dans la Métropole du fer? 80 commerçants, propriétaires, franchiseurs, franchisés et décideurs étaient réunis ce mardi pour la 2e édition de Meet@Esch.

Ces dernières années, le commerce à Esch-sur-Alzette n’a pas été épargné par les problématiques qui frappent l’ensemble du secteur au niveau national : montée en puissance des achats en ligne au détriment des boutiques traditionnelles, fuite des grandes enseignes installées en centre-ville vers les centres commerciaux en périphérie, hausse des loyers et des charges, ou encore manque de places de stationnement gratuit.

Un projet précurseur

Pour relever ces défis et redonner ses lettres de noblesse au commerce local, la Ville d’Esch mise sur le soutien aux entrepreneurs à travers son projet précurseur CLAIRE (Concept local d’activation pour la revitalisation commerciale d’Esch) lancé en 2019, sans oublier le réseautage et le partage d’expérience.

D’où l’idée de la journée d’échange dédiée aux professionnels Meet@Esch, dont la deuxième édition s’est tenue ce mardi dans les locaux désertés par H&M, rue de l’Alzette. Près de 80 commerçants, propriétaires de locaux commerciaux, franchiseurs, franchisés et décideurs économiques ont participé à l’événement, lancé en 2022 et appelé à devenir le rendez-vous annuel du commerce eschois.

Car à l’avenir, le commerce local va encore évoluer, avec l’installation du Sudspidol à Raemerich, des nouveaux logements aux Nonnewisen, ou du futur quartier Metzeschmelz du côté de Schifflange : tous comporteront des locaux commerciaux et des services, tandis que la population passera de 38 000 habitants à 50 000 d’ici quinze à vingt ans selon les projections.

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C’est le nombre de commerces que compte aujourd’hui Esch-sur-Alzette, dont 400 commerce de détail. C’est 33 de plus qu’en 2023.

Un potentiel que la commune compte bien valoriser, en parallèle des cellules commerciales actuellement vacantes (environ 10% du parc).

«On met en place un management actif, en contactant les propriétaires de locaux vides, puis en prospectant pour un commerçant», explique Christian Bettendorff, chef du département des Affaires économiques de la Ville d’Esch. «Ensuite, on propose des solutions concrètes pour favoriser l’implantation.»

Des coups de pouce utiles et concrets

En effet, en plus des animations en centre-ville au fil de l’année et de la création du Escher Blog mettant en scène les acteurs économiques locaux, la commune a développé une palette d’outils efficaces.

Un espace peut accueillir une boutique sous la forme d’un pop-up, pour permettre à une start-up de promouvoir son produit, ou à une entreprise établie ailleurs de tester le marché eschois.

À Esch, un peu plus de 10% des locaux commerciaux sont vacants.

 

Saladany, enseigne de décoration intérieure venue d’Afrique, qui a maintenant son propre magasin rue de l’Alzette et célèbre ses trois ans, a démarré ainsi. «On fait aussi de la gestion locative commerciale : la Ville loue à bon prix au propriétaire des lieux, et sous-loue à un commerçant en prenant en charge un tiers du loyer la première année et un sixième la deuxième année», poursuit-il.

La commune octroie également une prime à l’installation pour le nouvel occupant d’un espace commercial en centre-ville prêt à y investir au moins 7 500 euros : «On prend alors en charge jusqu’à 35% des factures hors TVA, jusqu’à un plafond de 25 000 euros». Cependant, une part des cellules vides reste bloquée.

Une partie des cellules bloquées

«60% des locaux commerciaux vacants ne sont pas sur le marché pour diverses raisons : mises en conformité non effectuées par les propriétaires, conflits d’héritage, spéculation, rénovations interminables», liste-t-il. Ce qui a des répercussions sur les commerces voisins, avec un manque de passage. Pour minimiser ce phénomène, la Ville d’Esch a instauré une taxe sur les locaux commerciaux inoccupés.

Des efforts qui portent leurs fruits puisque pas moins d’une trentaine de nouveaux commerces ont ouvert leurs portes cette année sur le territoire communal.

Salvatore Pica : «Je présente mes vins sur les réseaux»

Salvatore Pica, enfant du pays, a ouvert son bar à vin, le Drupi’s, en 2017 et a fini par s’installer au 26 rue de l’Alzette il y a quatre ans. Pour lui, le contact avec les clients surpasse tout : «On doit faire beaucoup d’efforts pour fidéliser nos clients. La présence, le conseil, le plaisir, tout ça est essentiel», pointe ce passionné, qui a dû prendre le virage de la promotion en ligne malgré lui.

«Aujourd’hui, les réseaux sociaux, c’est indispensable, sans ça, votre activité ne décolle pas. Je ne suis pas fan, mais je publie des posts pour présenter nos vins par exemple», poursuit-il. Si ce jeune patron estime qu’il manque encore des éléments dans l’offre commerciale à Esch, il souligne à quel point les gens aiment y venir : «Désormais, j’ai des voisins de chaque côté et en face aussi, donc ça bouge dans le bon sens! Il y a plus de passage et c’est bon pour mes affaires.»

Nicolas Kremer : «On y arrive, même sans touristes»

Avec leur bijouterie au 83 rue de l’Alzette, Nicolas Kremer et son épouse font perdurer le commerce familial ouvert depuis 1911, tout en s’adaptant aux nouvelles habitudes des clients. «L’acte d’achat n’est plus le même qu’avant la pandémie. On doit absolument se démarquer d’internet à travers le conseil et le service, alors que le commerce en ligne et les centres commerciaux sont nocifs pour nous», confirme-t-il.

Par rapport à la capitale qui peut s’appuyer sur le tourisme pour booster les ventes, Esch a d’autres cartes à jouer d’après lui : «Ici, on ne peut pas travailler avec les touristes, mais on y arrive grâce aux clients locaux fidèles et ça, ce n’est pas éphémère.» Autre avantage quand on vend des bijoux : «Chez nous, on peut essayer, toucher, les gens sont satisfaits et ne renvoient pas l’article comme c’est souvent le cas avec les achats en ligne», fait-il encore remarquer.

Dina Nzambi : «Le stationnement est un problème»

Pour Dina Nzambi, patronne du salon Astride Coiffure au 27 rue de la Libération depuis près de dix ans, la fréquentation est en baisse : «Quand je suis arrivée en 2012, les samedis, on se bousculait littéralement rue de l’Alzette tellement il y avait de monde! Aujourd’hui, ce sont les centres commerciaux qui attirent plus», remarque la mère de famille. Mais ses clients lui rapportent surtout un autre problème : le manque de places de stationnement gratuit, doublé de tarifs horaires prohibitifs aux parkings.

«Je suis obligée de prendre en compte ce paramètre dans mon activité si je veux garder mes clientes face aux shopping center qui proposent des heures gratuites», soupire-t-elle, ajoutant qu’il lui arrive même de déduire le ticket de parking du prix de sa prestation. Pas le choix. «Pourquoi ne pas imaginer un système avec une réduction ou la gratuité pour les clients qui achètent dans les commerces du centre-ville?», suggère-t-elle.