Un passage à tabac entre sans-abri et un vol à l’étalage à l’issue rocambolesque étaient à l’agenda du tribunal d’arrondissement de Luxembourg en ce vendredi matin.
Alexandru ne parle pas. Alexandru sourit. Le prévenu n’a l’air nullement impressionné par les juges. Il comparaissait vendredi matin face à la 12e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour deux affaires distinctes. L’une concerne le vol à l’étalage de deux flacons de parfum dans une parfumerie de la Grand-Rue de Luxembourg, le 8 juillet 2019, avec un complice. L’autre, le passage à tabac d’un jeune homme dans la rue de la Forge également à Luxembourg le soir du 24 novembre 2019.
Le Roumain est laconique. Il promet juste de regagner son pays dès qu’il aura purgé sa peine après que le président a soulevé sa facilité de passage à l’acte et l’absence de garantie qu’il ne récidive pas. Le prévenu a déjà une autre condamnation pour des coups et blessures volontaires ainsi que pour vol à son actif. À chaque fois sous influence d’alcool. Et à chaque fois, il a été arrêté par la police après les faits.
En novembre 2019, Alexandru était dans un café quand il a été appelé à la rescousse par une connaissance. Un jeune homme avait tenté de s’introduire dans le squat que cette personne occupait déjà, pour dormir. «Le prévenu est arrivé sur place pour le tabasser», note le juge. Le représentant du parquet a, quant à lui, évoqué «une expédition punitive».
«J’étais à ma fenêtre. J’ai aperçu un jeune homme qui courait. Il était poursuivi par trois ou quatre hommes qui lui ont donné des coups de poing et de pied alors qu’il se trouvait au sol», raconte une riveraine. «Quand j’ai crié que j’allais prévenir la police, ils se sont dispersés.» Une autre voisine a filmé toute la scène. «Le plus corpulent a donné les premiers coups. C’était le principal assaillant», confirme un autre témoin qui a identifié Alexandru dans le van de la police quelques minutes après les faits. Du sang de la victime est retrouvé sur ses vêtements.
Le jeune homme a souffert de multiples hématomes, d’un traumatisme du bassin et d’une fracture du nez. «Les photographies de la victime étaient impressionnantes», a constaté le procureur avant de requérir une peine de 18 mois de prison et une amende pour ce fait, ainsi qu’une peine de 6 mois pour le vol à l’étalage à l’encontre du prévenu. L’avocat de ce dernier a soulevé le dépassement du délai raisonnable et demandé au tribunal de ne pas prononcer de peine de réclusion supérieure à 6 mois à son encontre.
Alcool contre drogue
Ensuite, ce fut au tour de Grigol de se présenter à la barre de la 12e chambre correctionnelle. Ce Géorgien de 37 ans reconnaît avoir commis douze vols simples, mais conteste avoir usé de violences pour commettre deux autres vols. Le prévenu écumait les stations-services et les commerces du Luxembourg pour y subtiliser principalement des bouteilles d’alcool. «Je les revendais pour acheter mes doses de drogues», admet-il nerveusement.
Le 29 octobre 2022, il a caché des bouteilles dans son blouson sous les yeux des employés d’une supérette de Bettembourg. «Il s’est débattu et a bousculé un des employés que le retenait. Il ne l’a pas frappé», a expliqué le gérant. «Nous l’avons laissé filer pour éviter que la situation ne dégénère.»
Grigol a eu moins de chance dans un supermarché de Remich. Deux vigiles avaient été engagés pour mettre un terme à une série de vol à l’étalage. Ce jour-là, ils ont repéré le prévenu et un complice cachant les bouteilles et quittant le magasin. Les deux vigiles les ont pris en charge. «J’ai essayé de retenir le prévenu, mais il a abandonné son blouson avec ses papiers d’identité à l’intérieur», a indiqué le premier. Le deuxième a atterri en bas d’un talus en tentant à son tour de l’intercepter.
«Il pleuvait, le sol était glissant et je portais des chaussures de ville. Je n’ai pas réussi à remonter le talus. J’étais coincé par des fils barbelés. C’est à ce moment qu’il a sorti un couteau», s’est souvenu le vigile qui ajoute avoir lutté pour éviter d’être blessé. Grigol nie : il a volé, mais il n’a pas été violent et il n’avait pas de couteau.
«Le témoin ne peut même pas décrire le couteau», a soulevé Me Knaff. Son client a intérêt à ce que le tribunal ne retienne pas les vols avec violences et il tente d’instiller le doute dans l’esprit des juges et du parquet qui venait de requérir une peine de prison de 24 mois et une amende appropriée à son encontre. L’avocat a demandé aux juges de «ne pas être trop sévères» avec Grigol.
Les prononcés sont fixés à vendredi prochain.