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[Le portrait] Eric Robyn, fidèle au poste


(Photo : Fern Konnen)

Les années passent, les entraîneurs se succèdent et les joueurs changent. Mais lui est toujours là. Eric Robyn est le kinésithérapeute du Handball Esch depuis 30 ans.

À chaque match du Handball Esch, la mécanique est la même : à sa sortie des vestiaires, Eric Robyn ne manque pas de venir saluer la table de presse, dont les plus anciens qu’il connaît depuis un paquet d’années maintenant, avant de suivre l’échauffement de ses «protégés» d’un œil attentif. D’ailleurs, il n’est pas rare de le voir prodiguer un ultime soin à l’un ou l’autre joueur. Après quoi, le kinésithérapeute eschois prend place sur le banc et se tient prêt à intervenir en cas de besoin. «Normalement, pendant le match, il n’y a plus grand-chose à faire, car on a préparé les joueurs en amont, explique-t-il. Des tapings ont été faits pour essayer d’éviter de renforcer d’éventuels problèmes, comme les lésions par exemple. Et sinon, quelques massages et quelques stretchings en fonction des joueurs, surtout chez les plus vieux (il sourit). Il y a certaines choses à faire sans non plus trop exagérer puisqu’on ne doit pas forcer avant le match.»

Le plus gros du travail a été effectué au cours de la semaine précédant la rencontre, que ce soit à l’entraînement ou directement à son domicile, à Bascharage, où il lui arrive de recevoir des joueurs. Et lorsqu’on lui demande la date de ses débuts au sein d’un club qu’il chérit tant, le Belge se replonge dans de lointains souvenirs. «Je crois que c’était en 1994, se remémore-t-il. On m’a proposé le poste et depuis, on ne m’a pas remplacé.» Voilà près de 30 ans que le Bruxellois assiste l’équipe fanion, d’abord de la Fraternelle où il a même joué, «mais pas longtemps», puis du HB Esch donc, né en 2001 de la fusion avec le Fola.

En bref

Né le 12 mai 1964 à Bruxelles, Eric Robyn est arrivé au Luxembourg après avoir effectué son service militaire. Une fois ses études à Louvain-la-Neuve terminées, il a débuté dans un cabinet, avant de rejoindre le CHEM d’Esch, puis celui de Dudelange où il travaille aujourd’hui en tant que kinésithérapeute au sein du service de rééducation gériatrique. En parallèle de son activité professionnelle, il officie dans un premier temps pour la Fraternelle à partir de 1994, puis quelques années plus tard, à la suite de la fusion en 2001 avec le Fola, pour le Handball Esch. Un club qui lui est cher et avec lequel il a tout connu.

Avec une telle longévité, Eric Robyn a vu passer plusieurs générations d’une même famille entre ses mains expertes. Et après avoir côtoyé – entre autres – Fancelli et Labonté pères, aujourd’hui c’est au tour des fils, Lou et Loris. «On prend un coup de vieux, rigole-t-il. À Esch, on donne l’opportunité aux jeunes de jouer. S’ils sont persévérants et qu’ils sont passionnés aussi, parce que ça demande beaucoup d’efforts pour arriver au niveau de l’équipe première, ils ont leur chance.» S’ils évitent les pépins physiques aussi. En ce sens, le kinésithérapeute aimerait qu’un test avec la machine Biodex soit proposé par la CNS, ce qui permettrait de collecter de précieuses informations sur de potentiels déséquilibres musculaires. Avec celles-ci, un travail de prévention pourrait alors être réalisé dans le but de réduire les risques de graves blessures, qui, en prime, sont plus coûteuses à soigner.

Nombreux aussi sont les techniciens qu’il a connus, dont un qu’il tient à citer : «Le premier entraîneur qu’on a eu, c’était Maurizio Parisotto. C’était un perfectionniste dans l’âme qui nous a montré la voie à suivre pour arriver au haut niveau que l’on n’a plus jamais quitté, souligne-t-il. Il faut dire aussi que le comité a toujours trouvé de très grands entraîneurs. Je crois que c’est un peu spécifique à notre club et je pense que ça fait partie de toutes nos victoires.» Moins sous le feu des projecteurs, Eric Robyn, 60 ans, n’en demeure pas moins un maillon important de cette «grande famille» qu’est le Handball Esch et qui, à sa manière, a contribué à l’obtention de résultats positifs.

Le sport apporte des émotions assez fortes et des moments particuliers qu’on ne retrouve pas dans la vie de tous les jours

Au fil des ans, le natif de Bruxelles a noué une belle complicité avec les joueurs, au point de connaître sur le bout des doigts leurs rituels d’avant-match. «Je les connais par cœur. Par exemple, Martin Muller (NDLR : aujourd’hui à la retraite) avait tout le temps besoin de son taping au genou or, toute la semaine, il jouait au foot, quelquefois comme un fou à l’entraînement. Alors ça n’avait pas vraiment de sens, mais il avait besoin de ça, psychologiquement, pour être performant.»

Eric Robyn exerce son métier avec deux types de publics aux antipodes. Au quotidien, il travaille au CHEM de Dudelange au sein du service de rééducation gériatrique, soit deux «mondes» distincts qui lui permettent de s’épanouir pleinement. «La kinésithérapie, c’est assez diversifié et ce que je fais ici avec le club, je ne le fais absolument pas avec les personnes âgées. Les techniques, les approches sont tout à fait différentes et les exercices sont aussi complètement différents. C’est pour cela que ça me plaît et c’est aussi pour cela que je suis toujours là. Et puis, le sport apporte quand même des émotions assez fortes et des moments particuliers qu’on ne retrouve pas dans la vie de tous les jours.»

Avec Esch, il a été servi, tant sur la scène nationale, où les succès ont été nombreux, que sur la scène continentale avec un nombre incalculable de voyages aux quatre coins de l’Europe. «Les déplacements européens que je n’ai pas pu faire, je crois qu’on peut les compter sur les doigts d’une main», précise le Belge. Qui, en parlant Coupe d’Europe, évoque avec un brin d’émotion la folle épopée en Challenge Cup en 2013 lors de laquelle le club a écrit l’une des plus belles pages de l’histoire du handball grand-ducal en atteignant la finale.

Je connais les rituels d’avant-match des joueurs par coeur

«C’était assez dur, il y a eu beaucoup de jours de congés (il sourit). Ma femme n’était pas trop contente, plaisante-t-il. C’était un évènement exceptionnel ! Sur le papier, on n’était jamais favoris, mais à chaque fois, on surprenait nos adversaires par notre enthousiasme et nos performances. Le plus beau souvenir que je garde de cette campagne ? C’est lors de la demi-finale retour contre les Roumains (NDLR : le C.S.U. Suceava). Il y avait égalité à cinq secondes de la fin (NDLR : sur l’ensemble des deux manches) et Jeff Decker, qui devait logiquement tirer, a fait la feinte de passer à notre pivot et a marqué à la dernière seconde. Le hall était plein à craquer, c’était une explosion de joie énorme. Je pense que tous ceux qui étaient présents dans la salle à l’époque s’en souviennent encore.»

Des souvenirs après 30 ans de bons et loyaux services, ce n’est pas ce qui lui manque. Et Eric Robyn pourrait même s’en créer davantage puisqu’il a bien l’intention de continuer à prêter main-forte à son club de cœur.