Il faut une stratégie globale d’accueil et d’inclusion, encore largement insuffisante au Luxembourg. Le CLAE critique le plan national contre le racisme, qui n’a pas encore été publié.
Le plan d’action national contre le racisme doit être soumis au Conseil de gouvernement à la fin du mois prochain. Bien qu’il ne soit pas encore publié, il fait déjà l’objet de critiques de la part du CLAE (Comité de liaison des associations d’étrangers) qui a été consulté au préalable et associé au projet de plan.
Le ministre de la Famille, des Solidarités, du Vivre-ensemble et de l’Accueil, Max Hahn (DP), se dit «étonné» de la démarche. «Ce plan d’action ne sera définitif que le mois prochain et les associations ont eu un aperçu du projet sur lequel elles ont pu livrer un avis», nous répond Max Hahn.
Une responsable du CLAE confirme que le projet qui leur a été soumis ne répond pas à toutes les attentes. Dans un communiqué publié lundi, le CLAE estime que le plan d’action national contre le racisme, qui met en œuvre la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, n’apporte qu’une «réponse partielle à un défi global». Il apparaît «insuffisant pour transformer en profondeur notre rapport à l’autre, notre vision du monde et de l’humanité».
L’association déplore que le plan national ne s’adresse exclusivement qu’aux personnes d’origine africaine et afro-descendantes, «un groupe longtemps ignoré par les politiques publiques», écrit-elle, en rappelant qu’elle était la seule à l’époque à avoir alerté les pouvoirs publics sur l’ampleur des migrations consécutives à la crise financière de 2008.
«Nous constatons aujourd’hui que l’attention portée par les pouvoirs publics semble s’inscrire avant tout dans une volonté de répondre aux obligations découlant de la convention internationale plutôt que dans une démarche véritablement orientée vers la prise en compte des difficultés vécues par ces populations», observe le CLAE, tout comme il constate que les personnes venues en migration «continuent de rencontrer des obstacles majeurs dans des domaines essentiels tels que l’éducation, l’accès à l’emploi et le logement».
Selon les informations du CLAE, ce plan se limiterait au seul racisme envers les personnes afro-descendantes et cela constituerait «une erreur» dans un pays tel que le Luxembourg, marqué par une grande diversité de parcours migratoires. «Le racisme ne se résume pas à une origine géographique : il consiste fondamentalement à hiérarchiser l’ensemble de l’humanité. Des formes dérivées, comme l’orientalisme, ont diffusé des stéréotypes durables, qui se traduisent encore aujourd’hui par des rejets fondés sur la religion ou par des discours hostiles envers les musulmans», écrit l’association.
Elle propose de dépasser les limites actuelles du plan national contre le racisme par la mise en place d’une politique d’accueil globale, à destination de toutes les personnes venues en migration. «Une telle politique ne peut pas se limiter à certaines catégories jugées « prioritaires » ou à des actions ponctuelles», estime le CLAE, qui mentionne des recherches démontrant que les phénomènes racistes et discriminatoires diminuent lorsque les inégalités socio-économiques se réduisent et que chacun bénéficie d’un accès équitable à l’éducation, à l’emploi, au logement et à la participation citoyenne.
L’importance des évènements culturels
L’association demande que le gouvernement reconnaisse l’importance du Festival des migrations, des cultures et de la citoyenneté «comme catalyseur d’une commune humanité», et qu’il soutienne également d’autres évènements culturels portés par les associations issues et héritières de l’immigration, à l’image du «week-end capverdien» à Ettelbruck, ou tout autre événement de plus petite envergure.
Ce même gouvernement serait bien inspiré de renforcer les moyens d’action juridique du Centre pour l’égalité de traitement. «Le CET devrait pouvoir ester en justice lorsqu’il constate des cas de racisme ou de discrimination», ce qui permettrait «de transformer les constats en actions concrètes et de garantir que les victimes disposent d’un recours effectif, renforçant ainsi la crédibilité et l’impact des politiques publiques contre le racisme».
Il faut rappeler qu’en 2022, l’étude «Being Black in the EU», réalisée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, a confirmé que le racisme est une réalité au Luxembourg. Le gouvernement avait décidé, alors, de mettre en place un dispositif pour sensibiliser, informer, former et responsabiliser à tous les niveaux. Il comptait renforcer le cadre légal et les institutions pour la prévention du racisme et la protection de ses victimes.