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Le Luxembourg peine encore à calculer un salaire minimum «approprié»


Le ministre du Travail, Georges Mischo, planche sur ce projet de loi depuis trois mois.

L’Europe oblige les États membres à recalculer leurs salaires minimums. Un vrai défi pour le ministre du Travail, Georges Mischo, qui peine un peu.

 «Nous sommes encore en train de travailler sur une méthode appropriée pour le calcul du salaire minimum.» C’est en ses termes que s’est défendu le ministre du Travail, Georges Mischo, lors d’une commission du Travail, face aux inquiétudes de l’opposition et du Conseil d’État.

Depuis trois mois, le ministre CSV travaille en effet sur un projet de loi visant à transposer au Luxembourg une directive imposée par l’Union européenne. Concrètement, cette dernière exige que chaque État membre planche sur une revalorisation, ou du moins, un recalcul de leur salaire minimum. Une manière d’assurer aux travailleurs un niveau de vie adéquat et de leur permettre de «bénéficier de conditions de vie et de travail décentes».

Des rémunérations minimales qui surtout, selon les motivations du Parlement européen, permettront à la fois de lutter contre «l’accroissement de la pauvreté au travail dans l’UE, qui a augmenté lors de la dernière décennie» et qui joueront aussi «un rôle important dans la protection des travailleurs à bas salaires, les plus vulnérables face aux crises sanitaires et économiques».

Si l’intention est louable, la transposition au Luxembourg, elle, semble bien périlleuse. Voilà donc près de 91 jours que Georges Mischo bûche sur ce texte, sans parvenir à trouver réellement une solution. Il vient ainsi de demander un nouveau délai.

Trop de charges pour le secteur privé

La faute aux méthodes de calcul du salaire minimum proposées dans le texte initial de la directive européenne. Elles mèneraient, selon l’ancien ministre des Sports, à «des charges trop élevées à porter par les entreprises du secteur privé et le Fonds pour l’emploi», de l’ordre de 359 millions à 634 millions d’euros, selon les différents scénarios.

Le salaire minimum devrait ainsi être augmenté, en brut, entre 3,1 % pour un niveau équivalant à 60 % du salaire médian brut et 32,7 % si l’objectif national était d’avoir un salaire minimum suffisant pour couvrir le budget de référence et donc pour mener une vie décente. Une transposition déjà jugée «déplorable» il y a quelques semaines par les syndicats, qui y voit une occasion ratée d’améliorer «considérablement» le sort des salariés au Luxembourg.

Le Statec à la rescousse

Pour tenter de décortiquer ce casse-tête, Georges Mischo a donc décidé d’écarter ces options au profit d’un mécanisme d’évaluation qui se baserait plutôt sur le coût de la vie dans le pays, en analysant «le niveau général et la répartition des salaires, le taux de croissance des salaires et les niveaux et évolutions de la productivité nationale à long terme».

Pour l’aider, le ministre CSV s’est donc rapproché du Statec, afin de mettre en place une méthode de calcul appropriée au pays et ainsi répondre aux craintes du Conseil d’État. Les députés de la commission du Travail devraient être informés des avancées qui seront faites en la matière le 29 janvier ou le 5 février, en fonction du volume de travail en commission.

122 000 personnes en «risque de pauvreté»

Actuellement, tous les deux ans, le gouvernement soumet à la Chambre des députés un rapport sur l’évolution des conditions économiques générales et des revenus, qui vise à relever, si nécessaire, le niveau du salaire social minimum. La dernière augmentation a d’ailleurs eu lieu le 1er janvier 2025, avec une hausse de 2,6 %. À côté de ce mécanisme d’adaptation structurelle, le salaire social minimum est encore soumis, tout comme tous les autres salaires au Luxembourg, à l’adaptation à l’indice des prix à la consommation.

Différentes hausses toujours jugées insuffisantes aux yeux des syndicats pour accorder un niveau de vie décent aux Luxembourgeois bénéficiant de ce salaire minimum. Pour rappel, 18,8 % de la population luxembourgeoise est jugée en «risque de pauvreté» : environ 122 450 personnes vivaient avec moins de 2 382 euros par mois en 2023.