Alors que le Luxembourg a atteint son jour du dépassement ce lundi 17 février, Greenpeace et Médecins sans frontières rappellent que la crise écologique a aussi des impacts sur la santé.
«Si l’ensemble de l’humanité consommait comme nous le faisons au Luxembourg, il nous faudrait plus de sept planètes pour combler nos besoins.» Pour Xavier Turquin, directeur de Greenpeace Luxembourg, il est grand temps de changer de modèle. Alors que la date mondiale du jour du dépassement est généralement fixée aux alentours du mois d’août (en 2024, l’ONG américaine Global Footprint Network l’a estimée au 1er août), le Grand-Duché vient déjà d’atteindre la date fatidique ce lundi 17 février, trois jours plus tôt qu’en 2024. Il est même le premier pays européen à dépasser ses limites et le second au monde, juste derrière le Qatar.
Pour rappel, le jour du dépassement, ou overshoot day, est la date laquelle un pays a consommé l’ensemble des ressources naturelles que la planète est capable de produire en un an. Le Luxembourg figure donc parmi les plus mauvais élèves avec l’une des pires empreintes écologiques au monde, plombée par le transport, l’alimentation carnée et la consommation d’énergie.
Un impact sur le Luxembourg
Mais la situation n’est guère mieux ailleurs, notamment en Europe. «Alors que 2024 a été la première année où nous avons officiellement dépassé les 1,5°C de réchauffement planétaire, on constate partout que les mesures de lutte contre le dérèglement climatique perdent du terrain», déplore Xavier Turquin.
Pourtant, au-delà de la crise écologique et climatique dont les effets commencent fortement à se faire ressentir, d’autres dangers guettent l’humanité si celle-ci ne remet pas en cause ses habitudes de consommation. «Les récoltes décimées par les sécheresses ou des pluies torrentielles engendrent des famines, et le réchauffement de la Terre entraîne de nouvelles maladies ou une diffusion plus large de celles déjà existantes, comme les maladies respiratoires et le paludisme ; de même il existe un lien avéré entre pollution et cancer», prévient Thomas Kauffmann, directeur de Médecin sans frontières Luxembourg. C’est donc une crise sanitaire qui attend le monde et ses conséquences pourraient impacter le Luxembourg. Pas besoin d’ailleurs de regarder vers le futur, le pays connaît déjà une multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes et un déclin de sa biodiversité.
Face à cette situation, les branches luxembourgeoises de Greenpeace et de MSF ont décidé de s’unir afin de rappeler les enjeux. Pour illustrer les causes et les conséquences de la crise climatique sur la santé humaine, elles ont lancé une campagne commune avec des visuels mettant côte à côte deux photos de chacune des associations. «Parce qu’on ne peut pas être en bonne santé sur une planète malade, et que lutter contre la crise climatique, c’est aussi sauver ceux qui en meurent déjà.»
«L’emballement est inquiétant»
Pourquoi MSF participe à une action commune avec Greenpeace pour ce « jour du dépassement » ?
Thomas Kauffmann (directeur de MSF Luxembourg) : Nous avons des remontées d’informations de nos équipes qui disent que les populations avec lesquelles on travaille sont de plus en plus touchées par des maladies et par des impacts directs du changement climatique. Il y a les sécheresses ou les incendies géants qui créent de plus en plus de famine et de malnutrition à cause de la destruction de récoltes. Il y a toutes ces inondations, ces pluies non contrôlées, qui créent également de la malnutrition, mais qui sont aussi vecteurs de maladies de façon indirecte parce qu’il y a beaucoup d’insectes qui ne sont plus saisonniers et dont le nombre explose dans des climats qui changent. J’en veux pour preuve le paludisme qui n’est plus saisonnier pour des raisons de changement climatique. Il y a également le choléra et d’autres maladies encore. Sinon, il y a aussi la pollution de l’air, qui entraîne des maladies respiratoires.
En étant présents sur des terrains de guerre, nous sentons également une certaine tension. Si je ne trouve plus les ressources chez moi, parce que le climat a changé, je vais attaquer le voisin. Et cet emballement est inquiétant.

Thomas Kauffmann, directeur de MSF Luxembourg.
Ces maladies pourraient-elles donc s’installer en Europe à cause du changement climatique ?
Absolument. MSF travaille là où les systèmes de santé sont défaillants, donc, pour le moment, nous ne travaillons pas directement en Europe, si ce n’est pour les migrants bloqués aux frontières.
Mais lors du covid, nous avons pu constater que dans les riches pays européens, il peut y avoir des tensions sur le système de santé. Par exemple, nos collègues de MSF Belgique ont apporté leur expertise de traitement de la santé d’urgence à Bruxelles qui était un peu dépassé par l’ampleur. Le covid est aussi une conséquence de la globalisation des problèmes de santé. Je ne l’espère pas, mais effectivement, il se pourrait que MSF ait du travail en Europe à un moment donné.