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Le Focuna veut «favoriser davantage le développement du mécénat culturel»


Jo Kox devant le tableau phare retraçant les 40 ans du Fonds culturel national.

Le Fonds culturel national est un acteur de l’ombre du paysage culturel et artistique luxembourgeois. Jo Kox, son président, nous explique son rôle et son fonctionnement.

Quand a été créé le Focuna et pourquoi ?

Jo Kox : Le Fonds culturel national est un établissement public. Il a été créé en 1982 pour que la société civile puisse participer au financement de la culture, moyennant, forcément, des libéralités fiscales qui peuvent en découler. Avec les termes d’aujourd’hui, on peut considérer le fonds comme une agence de promotion pour le mécénat culturel.

Quels sont ses objectifs et ses missions ?

Son objectif est de sensibiliser de plus en plus de personnes à s’intéresser et à contribuer à la culture et aux différentes disciplines artistiques. Le fonds a pour mission de gérer les dons publics et privés afin de promouvoir le mécénat culturel au Luxembourg, de faciliter la collecte et l’analyse de ces dons, de créer des synergies entre acteurs culturels et économiques, et d’accompagner le secteur culturel dans la recherche de partenariats. Nous sommes un peu l’intermédiaire entre le monde artistique et le monde institutionnel, et entre le monde économique et le monde culturel.

Comment le fonds a-t-il évolué depuis sa création ?

Au départ, c’était avant tout pour contribuer aux grandes acquisitions du musée national. Chaque fois qu’ils avaient une grande pièce à acheter et que leur budget ne le permettait pas, le comité directeur du fonds allait à la recherche de financements auprès du secteur bancaire, qui d’ailleurs n’existe entretemps presque plus dans ce domaine-ci, pour aider à ces grandes acquisitions. Par après, le Fonds culturel national a plus ou moins financé toutes les disciplines artistiques, à l’identique de ce qui était financé par le ministère de la Culture.

Ça bouge beaucoup sur le terrain donc le fonds ne doit pas être à la traîne

Puis, nous avons remis en question l’intérêt de financer les mêmes activités que le ministère. Nous avons alors pris une nouvelle orientation, notamment et malheureusement – ils n’étaient pas très contents – en laissant tomber les festivals de musique et les créations théâtrales. Nous nous sommes plutôt orientés vers les résidences d’artistes et avons créé des bourses spécifiques.

Tout cela, c’était déjà en vue de la création de Kultur | lx. Et quand ce dernier a été créé, nous avons plus ou moins départagé les différentes missions. Notre champ d’action principal, c’est tout ce qui est lié au monde de l’édition : littérature, éditeurs – nous sommes les seuls à les soutenir, auteurs, revues culturelles, catalogues d’exposition, monographies et portfolios d’artistes… Nous avons tout le dispositif disponible pour offrir cette aide spécialisée. Nous soutenons également la recherche et l’édition dans d’autres domaines variés comme les arts visuels, la musique, la danse ou encore l’archéologie, grâce à des bourses destinées aux artistes, chercheurs et éditeurs.

Qu’est-ce qui est au cœur de votre vision ?

Bonne question… Nous voulons avant tout mettre l’accent sur l’agence de promotion. Et cela veut dire, entre autres, publier des statistiques sur le mécénat culturel – ce qui fait quasiment défaut –, et publier sur les différentes actions du mécénat. Nous allons publier en fin d’année une brochure retraçant les cinq crowdfundings, dont le dernier en date est celui pour la Bible de la Bibliothèque nationale, ainsi qu’une brochure sur les 10 ans de la bourse Francis André, à la fois pour mettre en avant les 10 lauréats et aussi pour inciter d’autres mécènes à s’intéresser davantage et concrètement à ce que propose telle ou telle bourse. De cette manière, nous voyons également le résultat et le bienfait qu’une telle bourse peut apporter aux artistes.

Comment choisissez-vous les personnes et projets que vous soutenez ?

Nous ne choisissons pas! Toutes nos bourses sont données sur la base d’un appel à candidatures. Puis, ce sont les experts au sein des jurys qui décident de l’octroi des bourses. Pour être le plus neutre et professionnel à la fois, ce sont des personnes travaillant au quotidien dans les différents champs artistiques qui sont nommées dans les jurys et ces dernières sont renouvelées tous les trois ans pour ne pas créer des habitudes.

Et comment décidez-vous des aides et bourses à donner ?

Cela se fait toujours dans la discussion avec les mécènes et après avoir pris le pouls auprès du secteur pour savoir quelle est la bourse qui pourrait avoir une retombée. Si on prend l’exemple de la bourse Francis André, elle a beaucoup évolué en 10 ans. Les critères ont changé trois fois pour s’adapter aux besoins du secteur. Cela ne sert à rien de proposer des bourses avec des critères que personne ne peut remplir! C’est aussi pour cela qu’on invite dans ces jurys le lauréat de l’édition précédente, pour qu’il puisse échanger avec les membres du jury et faire un retour sur ce qui était bien et moins bien et sur les défis actuels auxquels les artistes sont confrontés.

Toutes ces aides se font aussi en concertation avec les autres bailleurs de fonds pour ne pas proposer les mêmes aides au même secteur. Parallèlement, chaque fois que nous recevons de l’argent privé pour une bourse, nous nous concertons avec le mécène pour savoir où il veut investir son argent puisqu’il y a également des bourses en archéologie, en arts visuels, en théâtre ou encore en arts plastiques… Nous voyons comment investir l’argent « intelligemment » pour le bienfait du secteur concerné.

D’où provient l’argent ?

De 1982 à l’année passée, il provenait exclusivement de l’Œuvre nationale de secours Grande-Duchesse Charlotte. Mais depuis cette année, nos frais de fonctionnement – donc les ressources humaines et les frais administratifs – sont pris en charge par une dotation du ministère de la Culture. La redistribution vers le monde artistique provient toujours exclusivement de l’Œuvre de secours et des mécènes privés. C’est pour cela que nous sommes toujours à la recherche de nouveaux mécènes!

Et bien sûr, chez nous, la transparence, c’est au quotidien. On peut tout trouver sur notre site, même les déclarations des membres du jury avec le code de déontologie et leurs signatures. Nous affichons aussi les bénéficiaires, les différents critères… Nous gérons à la fois de l’argent de l’Œuvre nationale de secours, de l’État et de la société civile, dont nous rendons compte en toute transparence. Et pour donner un ordre de grandeur, en 2024, 2045 dons ont transité via le fonds.

Quelles sont vos perspectives d’avenir ?

C’est avant tout le projet de loi sur lequel nous travaillons intensément. Ça bouge beaucoup sur le terrain, donc le fonds ne doit pas être à la traîne. C’est pour cela que nous proposons une révision de la loi pour favoriser davantage le développement du mécénat culturel au Luxembourg, axé sur quatre domaines permettant à la fois d’optimiser l’administration et la gestion de l’établissement public, d’étoffer ses missions, d’introduire le mécénat de compétences et de revoir le seuil de défiscalisation.

Par après et en fonction des ressources humaines, nous aimerions faire plus de communication autour des activités du mécénat pour mobiliser davantage la société civile à participer au financement de la culture. Il faut aussi que l’on fasse du lobbyisme auprès du ministère des Finances pour que les libéralités puissent évoluer et attirer davantage de mécènes et que l’on sensibilise les politiques sur les bienfaits du mécénat. Nous avons du pain sur la planche!

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