Ils n’ont pas encore levé le petit doigt, mais cela ne saurait tarder. La semaine prochaine, la fraction parlementaire compte poser plusieurs questions au gouvernement en se référant à l’affaire Traversini.
Ils n’ont toujours pas fait entendre le son de leur voix. Pourtant, l’affaire Traversini à Differdange apporte de l’eau à leur moulin, à fond les pales. Et pourtant, la fraction parlementaire du Parti chrétien- social est restée silencieuse jusqu’à présent. Mais cela ne va pas durer. Dans les coulisses, les députés de l’opposition fourbissent leurs armes et préparent les questions qui les taraudent. L’affaire Traversini étant pliée au niveau local, le national va prendre le relais. Le temps est encore à la réflexion pour savoir quelle stratégie adopter.
Ce qui intéresse le CSV, c’est moins l’affaire Traversini que «toutes les autorisations qui circulent dans ce gouvernement», nous explique-t-on. Le cas du bourgmestre démissionnaire de Differdange est flagrant et leur servira de base solide pour passer à l’attaque. Recevoir une autorisation de l’administration de l’Environnement dans un délai de 40 jours pour une construction située dans une zone Natura 2000 relève d’une prouesse qui interpelle l’opposition. Le CSV prend son temps et prendra position la semaine prochaine, sa stratégie n’étant pas encore finalisée. Roberto Traversini ayant démissionné de son poste de bourgmestre, est-il encore tenable à son poste de député?
Le CSV se pose très sérieusement la question alors que le parquet a requis il y a trois I jours l’ouverture d’une instruction judiciaire à l’encontre de l’élu écolo pour détournement de deniers publics ou privés, prise illégale d’intérêts, blanchiment et violation de la loi concernant l’aménagement communal et le développement urbain. S’il est reconnu coupable, la situation va fortement se compliquer pour lui. Le CSV ne s’interroge pas seulement sur les petits arrangements entre amis en ce qui concerne les autorisations accordées par ce gouvernement. Le parti de l’opposition reste perplexe quant à la réaction de la ministre de l’Intérieur. Taina Bofferding n’aurait-elle pas dû suspendre l’autorisation? La question lui sera posée très rapidement par la fraction chrétienne-sociale qui n’est pas pressée d’intervenir alors que Roberto Traversini est politiquement «fini», pour reprendre les termes d’un député CSV. Pourquoi réagir d’ailleurs? Le CSV n’a pas besoin de lever le petit doigt, au contraire, il se délecte du spectacle. Pour lui, les bleus coulent les verts et il ne renie pas le plaisir de les voir se déchiqueter de l’intérieur.
Les chrétiens-sociaux ne voient surtout pas l’intérêt d’attaquer, par crainte de voir leurs adversaires politiques recoller les morceaux pour faire bloc contre eux.
«Un chic type»
Même l’opposition CSV en convient, Roberto Traversini est «un chic type». Il a fait les frais d’une guerre sans merci à Differdange, ancien fief socialiste jusqu’à ce que Claude Meisch prenne les rênes de la commune en 2002 et ce durant onze ans. Les verts étaient les alliés des bleus pendant huit ans et Roberto Traversini en avait gardé un bon souvenir comme il nous le confiait en 2014, tout juste élu bourgmestre : «Nous avons vécu une longue et bonne coalition à Differdange depuis 2003 et nous avons réussi à relancer cette ville. Nous avons fait de belles choses durant cette coalition et les relations personnelles que j’entretenais avec Claude Meisch étaient excellentes. Nous avons travaillé huit ans ensemble, de manière assez intensive et puis quelque chose s’est cassé avec le DP. Claude Meisch n’était plus là et le DP a implosé. Ce n’était pas un problème entre le DP et les verts. Je continue à avoir de bonnes relations professionnelles avec Claude Meisch. Et à Differdange, j’ai pu continuer la politique que nous avions décidée ensemble sans rupture de projet.»
L’ancien professeur d’éducation physique s’est finalement allié au CSV alors que sur le plan national, son parti composait la première coalition tricéphale, unie contre l’hégémonie des chrétiens-sociaux au gouvernement. Roberto Traversini, lui, décidait alors de botter les libéraux hors de la majorité communale et ces derniers en ont gardé une rancoeur palpable. Ils tiennent aujourd’hui leur revanche.
Roberto Traversini avait créé la section déi gréng au début des années 90 à Sanem avec son ami Robert Rings parce qu’il était préoccupé «par le manque d’infrastructures pour les jeunes, par le manque d’esprit écologique, par le manque de participation citoyenne», nous disait-il il y a cinq ans. «C’était le seul parti, il y a 25 ans, qui affichait une longueur d’avance sur les questions sociétales, comme le mariage homosexuel et le vivre ensemble, qui étaient très importantes pour moi et pas seulement à cause de mes origines», poursuivait-il. Roberto Traversini était sur le point d’entrer au gouvernement.
Geneviève Montaigu