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Le CET livre les chiffres des discriminations


Susanna van Tonder, la directrice du CET, souhaiterait que la discrimination basée sur la nationalité fasse partie de son catalogue. (Photo : archives lq/fabrizio pizzolante)

Les cas de discrimination traités par le Centre pour l’égalité de traitement augmentent d’année en année et les discriminations fondées sur l’origine ethnique sont les plus évoquées.

Le rapport d’activité 2023 que la directrice, Susanna van Tonder a remis à la Chambre des députés indique qu’au cours de la période du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2023, le CET a été saisi de 239 nouveaux cas auxquels s’ajoutent un dossier non clôturé de 2021 et dix dossiers non clôturés de l’année 2022. Pour ses statistiques, le CET a utilisé les données de la personne qui l’a contacté. Il ne s’agit donc pas forcément de la victime de la discrimination.

Sur les 250 dossiers traités en 2023, 48 % ont été introduits par des hommes, 38 % par des femmes et 12 % par des associations ou sont des autosaisines. Dans 66 cas, les requérants n’ont pas communiqué leur nationalité ou bien il s’agissait de dossiers introduits par des organisations ou associations ou des autosaisines. La plupart des dossiers, 77 unités (31 %), proviennent de Luxembourgeois.

Parmi les motifs de discrimination, l’appartenance ou non-appartenance, vraie ou supposée, à une «race» ou ethnie comptabilise 59 cas (24 %), le handicap, 49 cas (20 %), le sexe, 33 cas, (13 %), l’orientation sexuelle 11 cas (4%), l’âge, 9 cas (4 %), et la religion ou les convictions, 7 cas (3 %).

Quel interlocuteur ?

Le mot «harcèlement» est parfois utilisé de manière erronée, constate le CET. Après analyse des dossiers, ses services remarquent que la définition du harcèlement ne coïncide pas avec le phénomène rapporté.

Souvent, les personnes ne savent tout simplement pas à qui s’adresser et quel est l’interlocuteur adapté à leur problème. Dans ce cas, le CET essaie de les réorienter. C’est le cas des dossiers où les personnes s’estiment victimes d’une discrimination basée sur leur nationalité, motif non attribué au CET, ce qu’il regrette d’ailleurs. La discrimination en raison de la santé, au sens plus large, devrait elle aussi être incluse dans ce catalogue, comme l’a expliqué la directrice aux députés lors de la présentation du rapport d’activité. Des personnes malades d’un cancer ou du sida, par exemple, pourraient se voir discriminées.

La catégorie «résolution/conseil/orientation/avis», qui contient 106 dossiers (42 %), est celle où se retrouvent les cas où le CET a su résoudre le problème du requérant ou bien où il a donné un service de conseil et d’orientation visant à informer les victimes sur leurs droits individuels, la législation, la jurisprudence et les moyens de faire valoir leurs droits.

Des lettres de sensibilisation

Dans 63 cas (25 %), les requérants se désistent. Lorsqu’il n’y a pas moyen de prouver une quelconque forme de discrimination ou lorsque la requête n’entre pas dans les domaines de compétence du CET, ces dossiers sont classés dans la catégorie «pas d’élément discriminatoire». Celle-ci compte 38 cas.

Le CET a dû constater que de nombreux employeurs ne respectaient pas l’égalité de traitement dans les offres d’emploi qu’ils publiaient dans les journaux ou sur les sites internet. Afin de les sensibiliser à la thématique, il a été décidé de leur adresser un courrier individuellement tout en y joignant le dépliant «Annoncer sans discriminer!».

En 2023, le CET a ainsi envoyé 56 lettres de sensibilisation pour donner suite à des offres d’emploi publiées qui discriminaient par rapport au sexe.

Recommandations sans suite

Le CET regrette que, dans le cadre de ses missions, il n’ait pas de pouvoir contraignant envers les institutions, les personnes privées, etc., qui ne voudraient pas collaborer avec lui. Mais, malheureusement, cet organisme n’a aucun moyen de pression pour contraindre qui que ce soit de lui accorder une entrevue ou de lui fournir toutes informations et tous documents nécessaires. Le Centre estime que l’État luxembourgeois devrait donner l’exemple, mais certains ministères mettent six à sept mois avant de donner une réponse, se plaint-il.

Afin de pouvoir remplir ses missions de façon plus efficace, le CET est d’avis que son pouvoir d’enquête devrait être renforcé. Il rencontre régulièrement des difficultés pour différentes démarches en raison d’une absence de statut juridique clair. Il revendique aussi plus de moyens pour sensibiliser davantage et toucher un public plus large.

Le CET regrette encore que, depuis qu’il existe, seuls trois avis lui aient été demandés officiellement par un ministère pour un projet de loi. Cela ne l’empêche pas de rédiger des avis et de faire des recommandations aussi bien au secteur public qu’au secteur privé.

À ce propos, le CET demande qu’une instance législative ou autre fasse le suivi de ses recommandations. Il donne l’exemple de la Croatie où l’Office des droits de l’Homme a été mandaté pour surveiller la mise en œuvre des recommandations du Centre pour l’égalité de traitement croate à destination de l’État.

Depuis ses débuts, le CET a formulé certaines recommandations à destination du législateur dans le cadre de son rapport annuel ou bien dans le cadre de dossiers concrets. Malheureusement, dans la plupart des cas, aucune suite n’y a été donnée.