Il est « urgent » pour l’Europe de se doter d’une défense collective propre à assurer son autonomie stratégique, dans un contexte de « remise en cause du multilatéralisme » et de « fragilisation des alliances », a souligné lundi le chef d’état-major des armées françaises.
« Une chose est certaine: le futur de la défense des pays du continent ne saurait être envisagé hors du cadre européen », a affirmé le général François Lecointre lors des Universités d’été de la Défense (UED, 10-11 septembre) à Versailles-Satory, en banlieue parisienne. « Dans un contexte de remise en cause du multilatéralisme, de fragilisation des alliances et de bascule vers un nouveau centre de gravité mondial situé entre Etats-Unis et Asie, le continent européen devra affronter à lui seul, tous les types de menaces : puissance, terrorisme, hybride, cyber, migrations », a-t-il développé.
« L’objectif est clair: parvenir à construire ensemble une autonomie stratégique européenne », a insisté le général Lecointre, en estimant qu' »il y a urgence ». L’UE tente de s’adapter à la volonté affichée du président Donald Trump de réduire l’implication des Etats-Unis dans la défense de l’Europe. Un Fonds européen de Défense doit être mis en place en 2019 pour développer les capacités militaires des Etats membres et promouvoir l’indépendance stratégique de l’UE.
Initiative européenne d’intervention
Paris a également lancé avec huit pays, dont l’Allemagne, une initiative européenne d’intervention (IEI) destinée à intensifier les échanges entre leurs différents états-majors, pour être capable de mener rapidement une opération militaire, une évacuation de ressortissants ou d’apporter une assistance en cas de catastrophe. « L’Europe de la Défense, c’est aujourd’hui un impératif, par réalisme, par pragmatisme, presque par constat », soulignait également dimanche la ministre française des Armées Florence Parly, lors d’un dîner organisé dans le cadre des UED.
Nous ne pourrons pas nous abriter éternellement derrière les États-Unis
« Nous écoutons le président des Etats-Unis, nous lisons ses tweets (…): ils disent tous une chose claire: nous ne pourrons pas nous abriter éternellement derrière le paravent américain », a-t-elle prévenu. « Les Etats-Unis sont nos alliés, ce sont nos amis (…) et l’Alliance atlantique restera le pilier de la sécurité transatlantique. Mais aujourd’hui le doute est permis. Les Etats-Unis seront-ils toujours à nos côtés, en tous lieux et en toutes circonstances? »
« Un mouvement s’est enclenché, il est peut-être inexorable, il ne dépend sans doute ni d’un chef d’Etat ni des résultats d’une élection », a-t-elle mis en garde. Aux côtés de Florence Parly dimanche, son homologue allemande Ursula von der Leyen a tenu elle à réaffirmer sa foi dans le partenariat transatlantique, tout en qualifiant l' »autonomie stratégique » européenne d' »exigence que nous devons nous fixer ». « Nous nous sommes fixé l’objectif en tant que gouvernement fédéral de rester transatlantiques et en même temps de devenir plus Européens », a-t-elle dit. « L’OTAN reste indispensable pour la défense collective et la sécurité de l’Europe. Cela ne va pas changer même si le gouvernement américain actuel veille plus jalousement sur les intérêts de son pays et que la Maison Blanche communique sur un ton plus acerbe et plus cavalier », a-t-elle jugé.
AFP