SÉLECTION NATIONALE En octobre, le Luxembourg jouera la Mannschaft. C’est toute une génération de joueurs locaux qui vont se retrouver face à leur pays d’adoption, façon maître contre l’élève.
C’est l’histoire de Yannick Kakoko, coach du RFCU. Il a 17 ans. Il se balade au centre d’entraînement du Bayern Munich alors que son équipe vient de gagner contre Stuttgart en championnat. Lui et ses copains sont volubiles et se marrent. Trop apparemment : le directeur du centre de formation passe la tête par la fenêtre et leur hurle dessus. «Il nous dit que c’est honteux, ce comportement. Il nous demande pour qui on se prend», se souvient l’ancien milieu de terrain également passé par Metz.
Il rentre dans son dortoir, un peu paniqué et reçoit une convocation pour le lendemain. Quelques heures plus tard, il avance tout tremblant dans le bureau du patron, avec la certitude d’avoir fait quelque chose de très mal mais sans savoir pourquoi. «Il me demande : « Tu sais pourquoi je t’ai fait venir« ? Je réponds que non et je me pose la question de savoir pourquoi il me crie dessus. Et là, il me dit : « Ici, tu es au Bayern. Les pros ont fait match nul ce week-end. Ils n’ont pas gagné, donc on n’a rien à fêter et il n’y a pas à rigoler!« »
Aujourd’hui, «les joueurs y croient»
Pourquoi cette histoire? Parce qu’hier, au lendemain de la qualification de l’Allemagne pour le Final Four de Nations League et donc de la certitude que la Mannschaft serait reversée dans le groupe du Luxembourg pour les éliminatoires du Mondial-2026, s’est imposée l’idée qu’il fallait impérativement poser la question à un technicien venu de l’autre côté de la frontière, de savoir ce que c’était, la formation allemande. La question est cruciale : une part monumentale des joueurs luxembourgeois, c’est un fait statistique indéniable, est passée entre les mains des formateurs des centres de l’autre côté de la frontière.
Et si c’était là qu’avait commencé à se construire une culture de la gagne différente pour les Rout Léiwen? «Oui, en Allemagne, il y a cette mentalité. La culture foot, là-bas, c’est de ne jamais rien lâcher», énumère Kakoko façon «enfonçage» de portes ouvertes. Mais son anecdote n’est pas inutile : «C’était peut-être le Bayern, mais c’est pour vous dire à quel point la culture de la gagne est poussée là-bas. Quand je vois le Luxembourg aujourd’hui, oui, je vois que les joueurs y croient. Ils savent qu’ils peuvent gagner! Et les gars qui sont en DN, aussi, y croient! Et c’est déjà une partie de la réussite».
Le Luxembourg a changé grâce à la Bundesliga? C’est peut-être ce soir, en Suisse, qu’on s’en rendra encore un peu mieux compte. Et à en croire Kakoko, c’est dans la tête que ça se joue.
Oui parce que côté formation, demeure cette rengaine lancinante qui vient du CFN quant à la qualité technique de la formation allemande. En déficit par rapport à celle prodiguée en France. Et d’ailleurs, un ancien de Bundesliga pointe gentiment qu’«il ne faudrait pas oublier de valoriser le boulot fait par les entraîneurs du CFN. Parce que la plupart de ses joueurs sont passés à Mondercange avant. Ensuite seulement ils sont partis en Allemagne». Façon de dire que c’est bien beau tout ça, mais que le Luxembourg se construit avant tout ici. Même si c’est avec des armes d’une culture différente.
«En tout cas, je ne peux pas les contredire, sur le côté technique. Mais ils n’ont pas forcément tort», admet Kakoko. De toute façon, à l’heure actuelle et en attendant de rencontrer ces modèles qu’ils ont fréquentés (Barreiro a joué avec Burkhardt, Veiga avec Undav, Bohnert avec Nübel), pour cette génération Bundesliga, la différence est dans les têtes.