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Lait : «Nous ne pouvons continuer ainsi»


Les producteurs laitiers sont venus en force pour être entendus par les ministres luxembourgeois. (Photo : Julien Garroy)

Les producteurs laitiers vendent le lait moins cher que son prix de revient. Ils ont manifesté vendredi à Luxembourg pour tenter d’imposer leurs solutions à ce problème qui met une profession en péril.

Les producteurs de lait ont tenté de se faire entendre à grands coups de klaxon de tracteur, vendredi matin sur la place Guillaume-II à Luxembourg. Venus avec douze tracteurs et des revendications, ils voulaient alerter sur la situation des agriculteurs au Luxembourg et en Europe, ainsi que sauver la situation pour ne pas laisser mourir une profession.

«Nous sommes ici pour présenter les résultats de notre étude sur les frais de production de lait au ministre de l’Agriculture et au gouvernement réuni en Conseil, ainsi que des pistes qui pourraient être d’éventuelles solutions aux problèmes de la production laitière», indique Guy Didderich, président du Luxembourg Dairy Board (LDB).

L’étude montre qu’en 2017 comme les années précédentes, les producteurs laitiers ne parviennent pas à équilibrer les frais de production. «Nous ne pouvons continuer ainsi», avertit le président des producteurs laitiers. En effet, de plus en plus de fonds extérieurs, comme des subsides, sont injectés dans les exploitations pour qu’elles puissent continuer à fonctionner. La situation perdure depuis l’abolition de la règlementation sur les quotas laitiers.

Les coûts des produits liés à la production ne cessent d’augmenter et les agriculteurs ne peuvent répercuter ces hausses sur le prix de leur marchandise s’ils veulent continuer à la vendre. «Cette année était une année particulière à cause de la sécheresse et nous ne disposons pas encore de chiffres, mais depuis quelques années, par exemple, le prix du fourrage a explosé», explique Guy Didderich. Le prix du lait, lui, reste constant. Trop bas, mais constant. Il nous manque dix cents d’euro du litre pour rentrer dans nos frais.»

Les frais liés à la production de lait en Europe ne seraient plus couverts depuis une dizaine d'années. Sans les subsides, beaucoup auraient déjà mis la clé sous la porte de leur exploitation.

Les frais liés à la production de lait en Europe ne seraient plus couverts depuis une dizaine d’années. Sans les subsides, beaucoup auraient déjà mis la clé sous la porte de leur exploitation.

31 cents d’euro le kg de lait

La production d’un kilogramme de lait coûte 42,62 cents aux agriculteurs après le retrait des 7,31 cents de subsides. Ils le vendent à 31 ou 32 cents. Un quart du prix n’est donc pas couvert, selon les producteurs laitiers luxembourgeois. Pire, les producteurs le sortent de leurs poches. Les prix du fourrage ont augmenté de plus de 20 % depuis 2010. Les prix des graines, des engrais, de l’énergie ou encore de la maintenance du matériel agricole, tout augmente de manière constante.

«Tout cela, cumulé à la baisse des prix du lait, fait que nous ne dégageons plus assez de bénéfices pour pouvoir investir dans nos exploitations afin de nous conformer aux exigences concernant la qualité des aliments, les standards environnementaux ou le bien-être animal», poursuit le président.

Donc, pour que les producteurs de lait puissent continuer à faire leur métier au Luxembourg et en Europe, le phénomène ne s’arrêtant pas à la frontière luxembourgeoise, les producteurs veulent «un prix stable qui couvre les frais de production». Tant que la demande reste importante au Luxembourg, les producteurs ne voient pas l’utilité de baisser leur production pour pouvoir augmenter les prix du lait.

«Nos clients veulent pouvoir rester concurrentiels, donc nous sommes tributaires des prix du marché», regrette le président du LDB. La solution est à appliquer au niveau européen. «Nous sommes sur la bonne voie pour que l’instrument que nous proposons soit transposé», indique Guy Didderich. Nous demandons un instrument de crise qui garantisse un revenu aux agriculteurs luxembourgeois et européen. Il devra être intégré à la politique agricole commune de l’Union européenne.»

530 fermes laitières

Mais pas uniquement, le LDB demande également un soutien national lors de l’estimation de la valeur du lait et des autres produits issus de l’agriculture luxembourgeoise. Les producteurs aimeraient aussi que les frais engagés pour mettre les exploitations en conformité soient pris en compte lors du paiement des produits laitiers.

Le Luxembourg compte 530 fermes de production de lait, selon des chiffres de 2016. Chacune d’entre elles a en moyenne 69 vaches laitières et est exploitée par 1,75 personne. Les doléances des producteurs laitiers ont été entendues par Fernand Etgen, le ministre de l’Agriculture. Ils aimeraient l’argent du beurre qu’ils produisent…

Sophie Kieffer