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La Thaïlande a un nouveau roi, réputé imprévisible


Le prince héritier Maha Vajiralongkorn, 64 ans. (photo AFP)

Le nouveau roi de Thaïlande Maha Vajiralongkorn, qui vivait jusqu’ici la plupart du temps en Allemagne, loin des responsabilités royales, est réputé imprévisible, à l’opposé de son père à l’image ultra-lissée de semi-divinité.

Celui qui avait demandé un « délai » avant de monter sur le trône afin de porter, avec les Thaïlandais, le deuil de son père décédé le 13 octobre, est depuis resté très discret. Ce militaire de formation de 64 ans n’a pas pris la parole en public et n’a pas modifié ses habitudes: il a passé peu de temps dans le royaume, repartant en Bavière dès fin octobre. Jeudi, il est revenu dans le royaume pour être officiellement proclamé roi et devenir Rama X.

Il aura maintenant la lourde charge d’effacer les craintes liées à son caractère instable, source de toutes les rumeurs et d’inquiétudes quant à sa capacité à incarner un jour la figure de Père de la Nation. « Il aime sa vie à l’étranger, dépourvue de responsabilités. Il va sans doute régner à distance et laisser ses soeurs inaugurer les chrysanthèmes », estime une politologue thaïlandaise, demandant à être citée sous couvert de l’anonymat.

Mais il surveillera étroitement les nominations à la tête de l’armée, au pouvoir depuis un coup d’Etat en 2014, réalisé au nom de la protection de la monarchie par des militaires soucieux de contrôler la scène politique le jour de la montée sur le trône de l’héritier controversé, ajoute-t-elle. Certains analystes s’inquiètent de son apparente volonté de régner a minima.

« Le roi Vajiralongkorn se désintéresse tout à fait de la chose publique et semble bien décidé à ne pas se conformer à l’exécution des tâches qui lui incombent en tant que roi », comme la promulgation des lois, souligne Eugénie Mérieau, spécialiste de la Thaïlande à Sciences-Po Paris.

Vie privée tumultueuse

Ses frasques supposées et divorces à répétition suscitent, depuis des années, tous les commérages dans un royaume profondément marqué par son père, qui lui lègue une des plus grosses fortunes royales mondiales. Les rumeurs sont entretenues par le fait qu’il n’a pas donné d’interviews depuis des années et parle rarement en public.

Dernier épisode de sa vie privée tumultueuse: en juillet 2016, des photos peu flatteuses du prince avaient été publiées par le journal allemand Bild. Des clichés qu’aucun journal thaïlandais n’a publié et qui n’ont pas non plus été échangés sur les réseaux sociaux, en raison d’une loi de lèse-majesté très dure, punissant de longues années de prison toute critique de la famille royale.

Depuis quelques années, le palais et les militaires s’étaient pourtant lancés dans une opération pour redorer son image: dans les journaux thaïlandais, cet homme maigre apparaissait de plus en plus souvent lors de cérémonies incontournables, sanglé dans un uniforme militaire blanc. Il avait également l’an passé pris la tête de deux grandes courses cyclistes organisées par le pouvoir à travers Bangkok.

En décembre 2014, le divorce d’avec sa troisième femme, la princesse Srirasmi, épousée en secret en 2001, avait coïncidé avec un scandale sans précédent qui avait conduit de nombreux membres de la famille de cette roturière derrière les barreaux pour lèse-majesté. Ils sont accusés d’avoir profité de leur statut de proches de « la plus haute institution » pour tirer des bénéfices financiers, ce qui a été largement interprété comme une opération de nettoyage de l’entourage du futur monarque.

Père d’une enfant née en 1978 d’un premier mariage avec une cousine, il a eu plusieurs fils de sa relation avec sa deuxième femme, Sucharinee, une descendance non reconnue par le palais. Le nouveau roi, qui a fait des études secondaires en Grande-Bretagne avant l’Académie militaire de Duntroon, en Australie, a un grade honorifique de général au sein de l’armée, mais sa passion est de piloter son propre avion en Bavière.

Le Quotidien / AFP