Constituée de 28 organisations luxembourgeoises, Voĉo a officialisé son existence ce jeudi. Cet ensemble vise à faire entendre et à défendre la voix de la société civile au Grand-Duché.
En réaction à l’affaire Caritas et face à une dépréciation globale de la société civile, 28 organisations luxembourgeoises ont décidé de se regrouper. Cette unité, qui porte le nom de Vocô, a été officiellement lancée ce jeudi. Elle rassemble autour d’une voix commune les causes environnementales, sociales, de droits humains et de solidarité internationale.
«Plus de respect, plus de discernement, plus de soutien, plus d’écoute et plus d’implication de la part du gouvernement.» En réponse à des remises en question de leur travail au niveau des financements et par les politiques, ces organisations, parmi lesquelles Amnesty International Luxembourg, l’ASTI ou encore Fairtrade Lëtzenbuerg, souhaitent se faire entendre et créer du dialogue avec les politiques. «Avec Vocô, nous travaillerons ensemble et pas les uns contre les autres. Ensemble, on est plus fort», appuie Sebastian Weier, du Cercle de coopération des ONG de développement (ONGD) du Luxembourg.
Un dialogue avec les politiques qu’elle a réussi à établir. Si Voĉo a été rendue officielle jeudi, ses travaux, eux, ont débuté il y a plusieurs mois. Le 10 janvier dernier, une délégation de cet ensemble d’organisations a participé à une entrevue avec le Premier ministre, à l’invitation de ce dernier. Un échange ressenti comme une solide première pierre à l’édifice que compte élever Voĉo. «Le ministre nous a écoutés. C’est un premier pas certes insuffisant, mais des résultats concrets sont à venir. En ces temps difficiles, il y a du positif pour renforcer les libertés et les droits fondamentaux et nous voulons travailler dessus», ajoute Sebastian Weier. Un nouveau rendez-vous avec l’une de ses conseillères devrait avoir lieu au début de l’été.
«Travailler sur les causes»
Extrêmement attentive sur les questions des libertés individuelles et des droits fondamentaux, la Voĉo a publié un avis sur le projet de loi sur le renforcement du Platzverweis. Par ce biais, elle se joint aux critiques acerbes déjà émises par le Conseil d’État, les autorités judiciaires, la Chambre des salariés (CSL) et la Commission consultative des droits de l’homme (CCDH). «Il faudrait que cette loi n’existe pas», soutient David Pereira, directeur général d’Amnesty International Luxembourg.
Pour rappel, le texte déposé par le ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden, prévoit que cette injonction d’éloignement doit non seulement viser les personnes qui bloquent l’accès à un bâtiment, mais aussi celles qui se comportent de manière à troubler la tranquillité, la salubrité ou la sécurité publique, entravent la circulation sur la voie publique ou se comportent de manière à importuner des passants.
Il est prévu d’octroyer plus de pouvoirs tant aux policiers qu’aux bourgmestres pour décréter des interdictions temporaires de lieu (48 heures, rayon d’un kilomètre) ou, en cas de récidive, une interdiction de territoire (30 jours).
Voĉo pointe des dispositions libres à l’interprétation et des mesures très injustes. Entre autres, les associations membres dénoncent, concernant l’injonction d’éloignement, une atteinte grave aux droits de la personne concernée. Cette dernière ne pouvant plus subvenir à ses besoins les plus élémentaires comme chercher du travail ou se rendre chez un médecin.
Aussi, Voĉo juge qu’aucun citoyen n’est à l’abri des injonctions de ce projet de loi. «Chacun peut déranger et s’exposer à des mesures compliquées», souligne David Pereira. Enfin, cet avis pointe le pouvoir donné aux bourgmestres. Ceux-ci ne pouvant se baser que sur des rapports pour prendre des décisions pouvant entraîner un éloignement temporaire ou une interdiction de territoire.
«On ne peut pas appliquer des mesures qui vont à l’encontre du droit humain simplement parce que ça dérange. Il faut travailler sur les causes et non pas sur les symptômes», assure David Pereira.
Droit de manifester, un droit fondamental
Voĉo a également pris la parole au sujet de l’avant-projet de loi sur les rassemblements en plein air dans des lieux accessibles au public. Dans cet avis, les organisations tiennent à rappeler que le droit de manifester est un droit fondamental et souhaitent que «cet avant-projet soit retiré».
Elles alertent sur l’absence de définition de certaines notions importantes comme «attroupement» ou encore «indices de port d’armes» et fustigent le fait que plusieurs dispositions pénales de ce projet de loi tendent à criminaliser les participants aux manifestations. «Il vise à créer de la peur chez les gens, la peur d’être réprimés. Nous jugeons ces restrictions disproportionnées», insiste Magali Paulus, militante du CELL.