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La LUGA transforme le paysage et nos perceptions


Ann Muller a coordonné cette exposition qui s’étend sur 11 km. (Photo : didier sylvestre)

Du 7 mai au 18 octobre se tiendra une exposition horticole hors norme à Luxembourg et Ettelbruck qui pourrait bien changer notre regard sur la nature.

Née d’une vision qui remonte à plus de 30 ans, la «Luxembourg Urban Garden» ouvrira ses portes dans trois semaines. Comme l’explique la coordinatrice de cette exposition de jardins éphémères, Ann Muller, tout est parti de l’envie de Niki Kirsch. Le président de la Fédération horticole luxembourgeoise rêvait d’une grande exposition horticole dans le pays. Le temps a passé. Puis le projet a pris son élan avec la renaturation de la Pétrusse qui offre un écrin naturel à cette ambition, d’autant que les thèmes entre cette renaturation et la LUGA sont proches : biodiversité, durabilité et écologie.

Ainsi, en 2019, l’ASBL LUGA est créée, le budget de 10 millions d’euros alloué pour donner la parole aux jardiniers, aux entreprises, aux associations afin qu’ils montrent leur savoir-faire. L’appel à idées reçoit plus de 300 propositions, mais le Covid-19 vient tout ralentir : «La participation est très compliquée quand on ne peut pas se voir», soupire Ann Muller en évoquant cette période. Mais l’ASBL tient bon. D’autant que, finalement, ces retards permettent d’affiner l’idée et d’appréhender l’ampleur de la tâche. Le budget est doublé, la date de la manifestation arrêtée : elle se tiendra entre le 7 mai et le 18 octobre 2025.

Des installations pensées pour six mois

L’exposition aura lieu dans quatre zones de la capitale : la vallée de la Pétrusse, la vallée de l’Alzette, le parc municipal Édouard-André et le Kirchberg, mais aussi à Ettelbruck. «En 2022, on ne trouvait pas de terrains assez grands pour faire une place à l’agriculture à sa juste échelle et là, Ettelbruck a proposé de nous offrir leur terrain, puisqu’ils sont quand même la capitale de l’agriculture. C’était tout à fait logique, tout à coup, d’aller là-bas. En plus, avec la mobilité douce, on y est en une demi-heure», précise-t-elle, enthousiaste.

Chaque lieu accueillera des installations pensées pour six mois et devant être démontables puis éventuellement remontables ailleurs. Ce qui a impliqué un cahier des charges pour les architectes et paysagistes très dur, dans une logique d’économie circulaire. «Ils ne pouvaient pas faire de fondations en béton et devaient planter des annuelles locales, laisser les racines des arbres dans les filets, utiliser des matériaux recyclés ou recyclables, du bois certifié FSC… et naturellement obtenir une multitude d’autorisations administratives.»

Une fourmilière motivée

Le jardin devient alors un laboratoire, d’autant «qu’on a un partenaire incontrôlable, reprend Ann Muller : la nature. On peut faire ce qu’on veut, mais s’il pleut pendant six mois, il pleuvra pendant six mois. S’il fait trop sec, il fera trop sec, on n’a aucune influence là-dessus.»

Chaque site sera ouvert à tous gratuitement. Des ateliers, spectacles et rencontres sont prévus pour les écoles et le grand public, mais l’essentiel, ce sont bien les jardins «déjà très artistiques». Des espaces aménagés pour «se poser, prendre un peu l’air et se poser des questions ensemble». Ce sont des sites qui racontent quelque chose, confie encore Ann Muller avant d’ajouter : «On ne veut pas endoctriner les visiteurs, mais qu’ils sortent de cette exposition un peu autrement, peut-être avec une petite sensibilisation.»

La «Luxembourg Urban Garden» permettra d’«éclairer le chemin vers des villes plus vertes, plus durables et plus respectueuses de notre planète» et de se rendre compte de ce qui pousse autour de nous, de «rendre visible l’invisible», comme l’indique le thème de l’exposition. Ann Muller évoque avec tendresse ces jardins sauvages verticaux poussant sur les falaises ou les adventices s’immisçant au bord des routes et qu’elle voit, maintenant que son œil est exercé.

La LUGA, c’est enfin une équipe de quelque 1 500 personnes participant à ce projet, une fourmilière motivée. «J’ai parfois l’impression que j’ai mangé la terre de cette ville, je la connais par cœur, je l’ai parcourue pour la comprendre», s’amuse Ann Muller, qui reste humble, définissant son travail de coordinatrice comme celui d’une mère avec «ses petites poules». Et de conclure : «La LUGA est un cadeau de notre pays à tous ses citoyens et citoyennes, mais aussi à ses visiteurs. Et il faut avoir le courage de donner autant d’argent pour se poser des questions pendant six mois sur l’écologie et sur la biodiversité.»