Si les vacances scolaires ont calmé le jeu, la grippe pourrait repartir de plus belle à la rentrée. La surveillance est de mise pour une épidémie qui a débuté extraordinairement tard, un effet secondaire du covid.
Cinq mille cas de grippe ont été déclarés dans tout le pays depuis le début de l’année. Un nombre qui n’a rien d’extraordinaire, si ce n’est que les chiffres sont plus précis grâce la surveillance des maladies respiratoires imposée par le covid. Les médecins envoient leurs patients se faire tester en laboratoire, pour le covid-19 et éventuellement la grippe (virus influenza). La direction de la Santé reçoit ensuite les résultats. Mais tout comme la neige en avril, à ce stade de l’année, la grippe devrait être de l’histoire ancienne. «En temps normal, c’est déjà rare des épidémies de grippe qui commencent tardivement, au plus tard au début du mois de février, note le Dr Joël Mossong, épidémiologiste à la direction de la Santé. Celle-ci a démarré fin février, c’est exceptionnel. Ce qui est encore plus extraordinaire, c’est de ne pas avoir eu d’épidémie, comme l’année dernière, ou d’avoir très peu de cas.»
La cause indirecte, c’est bien sûr le covid, en particulier les gestes barrières qui ont constitué un frein. «La plupart des cas concernent des enfants qui ont été contaminés à l’école et les jeunes parents. Le début des contaminations correspond d’ailleurs à la fin des gestes barrières, comme le port du masque à l’école», précise l’épidémiologiste.
Selon la direction de la Santé, le pic de l’épidémie semble avoir été atteint et l’on assiste désormais à une légère décrue, «mais nous sommes en période de vacances scolaires. Il ne s’agit peut-être que d’une accalmie, relativise le médecin. Il peut y avoir une remontée des cas à la rentrée des classes. D’ailleurs, en général, une épidémie s’étend sur deux ou trois mois, là nous cela n’aura duré qu’un mois et demi. Il se peut que nous ne soyons qu’à la moitié de cet épisode».
Les symptômes de la grippe, c’est, rappelons-le, pour ceux qui n’y auraient pas été confrontés depuis longtemps : «Avant tout une forte fièvre, un mal de gorge, des courbatures et une fatigue qui nous contraint à dormir. Habituellement, on ne sort plus du lit pendant une semaine», indique le Dr Joël Mossong qui relève que la grippe de cette année ne semble «pas très virulente».
Une information qu’il tempère : «Cette année, ce sont essentiellement des enfants qui sont touchés et des adultes assez jeunes. Or généralement, ce sont surtout les personnes âgées ou les personnes fragiles qui sont hospitalisées.» Des personnes épargnées cette année sans doute grâce à une vaccination contre la grippe à l’automne mais aussi, même s’ils ne sont plus obligatoires, à la persistance des gestes barrières, y compris dans la vie privée. «Quand on est contaminé, on peut porter un masque à la maison.» Les personnes âgées ont pris de nouvelles habitudes, comme éviter les câlins lorsqu’il y a un doute ou la semaine suivant la maladie.
Pas de surmortalité cette année
Pour les mêmes raisons, l’épidémie de grippe qui s’accompagne généralement d’une surmortalité dans les statistiques, échappe pour une fois à cette règle. «Le nombre de décès n’est pas du tout supérieur à la normale en cette période de l’année», note le Dr Joël Mossong.
«Je pense que le masque résistera dans le temps, on continuera de le voir, en tout cas je l’espère», souhaite l’épidémiologiste. En évitant une épidémie de grippe l’année dernière, les gestes barrières ont montré leur efficacité à protéger les personnes à risque. On peut continuer à vivre normalement tout en prenant quelques précautions quand les virus les plus virulents rôdent.
Les symptômes de la grippe peuvent être confondus avec le covid-19, c’est pour cela que la direction de la Santé recommande aux gens de continuer à se faire tester en cas de doute. «Le covid continue de circuler. La principale différence entre les deux, c’est que la grippe commence de façon abrupte avec tout de suite de la fièvre alors que les symptômes du coronavirus vont être plus progressifs.»
Si les plus petits ont moins eu l’occasion de forger leur immunité l’an passé avec la fermeture des écoles et les gestes barrières, pour le spécialiste c’est une parenthèse qui a été rapidement corrigée cette année : «On peut s’en rendre compte en voyant le taux d’absentéisme cet hiver dans les établissements scolaires. Les virus hivernaux sont revenus à un rythme soutenu et les plus jeunes ont beaucoup été touchés cette année. La situation est revenue à l’équilibre sans avoir de conséquences sur la santé future des enfants.»
Les parents d’enfants en bas âge se souviendront longtemps de cette saison riche en alitements forcés, pour eux et leurs bambins qui ne cessent de ramener des cadeaux empoisonnés de l’école ou de la crèche. Des attaques virales qui semblent ne jamais vouloir s’arrêter avec cette épidémie de grippe qui débarque quand on croit sortir la tête de l’eau, au retour des beaux jours. Pourvu que la grippe soit la dernière salve, avant un retour au calme.
Gastro ou salmonelle, attention à ne pas confondre
La direction de la Santé ne dispose pas de chiffres pour la gastroentérite puisque peu d’analyses en laboratoires sont effectuées à la demande des médecins traitants, mais elle aussi continue belle et bien de sévir en ce moment.
Si dans le cas de la grippe c’est la fièvre qui peut s’avérer dangereuse chez les enfants les plus jeunes et les nourrissons, dans le cas des norovirus responsables des gastro-entérites, le risque vient de la déshydratation. Celle-ci peut être provoquée par les diarrhées et vomissements selon leur intensité et leur durée. En cas de doute, si l’on est inquiet pour son enfant, il ne faut pas hésiter à consulter, que ce soit pour la grippe ou la gastro, voire d’aller aux urgences pédiatriques. D’autant qu’un autre risque plane dont les symptômes sont assez similaires, celui de la salmonelle transmise en ce moment par les chocolats Kinder fabriqués pour Pâques.
«Pour l’instant, une seule enfant de 2 ans a été hospitalisée une semaine. Désormais, elle est sortie de l’hôpital et elle va bien», rapporte le Dr Joël Mossong, épidémiologiste à la direction de la Santé. «Au niveau européen, on compte 135 cas pour le moment. Ce qui marque, c’est le taux d’hospitalisation assez élevé par rapport à d’habitude pour une épidémie de salmonelle. C’est sans doute parce que cela concerne des enfants en bas âge qui n’ont pas encore d’immunités contre cette bactérie.» Les symptômes d’une contamination par salmonelle peuvent durer beaucoup plus longtemps qu’une gastro en se poursuivant plusieurs semaines. Des antibiotiques existent pour lutter contre cette bactérie, mais sont prescrits uniquement si le corps de l’enfant n’arrive pas à se défendre, pour éviter de créer des résistances.
[box type="shadow" align="aligncenter" ]Lire aussi : Salmonellose : 150 cas liés au «foyer épidémique» de l’usine Kinder[/box]Les cas de salmonelle sont surveillés par la direction de la Santé et le Dr Joël Mossong s’étonne de l’ampleur de cette épidémie : «Nous avons en moyenne 150 cas par an. La salmonelle est transmise essentiellement par l’alimentation, mais on n’a jamais vu une telle épidémie concernant un produit industriel, c’est vraiment unique. Même si en comparaison des millions de chocolats produits par les usines Kinder, le nombre de cas de salmonelle est limité. Il y a deux réservoirs principaux de salmonelle, les œufs, contaminés par les poules quand elles couvent (surtout ceux en provenance de Pologne) et l’élevage de porcs et de bœufs. Bien que ces cas aient beaucoup diminué ces 15 dernières années. Si vous voyez un œuf sale, mieux vaut le jeter ou éventuellement le faire cuire intégralement. Il ne faut en aucun cas le laver, il a une couche naturelle qui le protège et en le lavant la bactérie peut traverser la coquille.»