La gratuité de la carafe d’eau refait surface

Toujours pas de carafe d’eau du robinet gratuite au restaurant ? Après une pétition à succès en 2019, une autre se met en route. Les députés pourraient forcer le gouvernement à légiférer.

Depuis hier, 18 nouvelles pétitions sont ouvertes aux signatures et, parmi elles, la fameuse carafe d’eau du robinet gratuite au restaurant. Au dernier comptage, elle totalisait 152 signatures, soit 3 % de l’objectif atteint. Peu importe, une pétition similaire a déjà crevé le plafond en 2019, avec débat à la Chambre des députés, visiblement sans conséquence.

La pétitionnaire, Sophie Faber, revendique la carafe d’eau du robinet gratuite parce que cela existe déjà dans d’autres pays, en France par exemple. Mais c’est aussi le seul pays voisin où les restaurateurs offrent l’eau du robinet à leurs clients. Sinon, il faut aller aux États-Unis, en Norvège ou encore en Autriche.

«L’eau du robinet sur le territoire du Luxembourg est potable et le droit d’accès à l’eau potable est un droit fondamental et un besoin premier de l’humain. Il s’agit de bon sens, de justice et d’égalité», motive la pétitionnaire. Rien de neuf pour les députés qui ont validé la pétition après avoir déjà débattu de la question quatre ans plus tôt.

«Il faut encourager un changement de mentalité»

Le gouvernement, à l’époque, n’avait aucunement  l’intention de légiférer en la matière. «Légiférer ne serait pas très heureux. Avec la fédération Horesca, on est prêts à lancer une campagne de sensibilisation. L’idée est d’offrir une eau du robinet de marque nationale qui sera ajoutée comme alternative sur les cartes des restaurateurs disposés à le faire», avait annoncé le ministre des Classes moyennes, Lex Delles.

La ministre à la Protection des consommateurs, Paulette Lenert, avait renchéri : «Il faut encourager un changement de mentalité. Vu mes contacts avec le terrain, je pense que la volonté de devenir plus durable est bien présente», ajoutait-elle. Le pétitionnaire de l’époque, David Kieffer, ne cachait pas sa déception à l’issue du débat : «Miser sur la seule volonté du secteur n’est pas suffisant. Cela n’avait déjà pas fonctionné lors de l’interdiction de la cigarette dans les cafés et restaurants. Et on ne compte pas non plus sur la seule volonté des gens pour rouler à 50 km/h en agglomération ou pour payer leurs impôts», disait-il.

Cette nouvelle pétition en faveur de l’eau gratuite sur la table du restaurant n’a pas davantage de chance d’aboutir. Depuis 2019, rien n’a changé, et ce n’est pas une initiative citoyenne qui va forcer la main des restaurateurs. Quoique. La présidente de la commission des Pétitions, Nancy Kemp-Arendt, avait fermement déclaré il y a quatre ans que la Chambre s’engageait à suivre de près la mise en place de la campagne de sensibilisation promise et exigerait une évaluation. «Si les résultats ne suivent pas, il n’y aura pas d’autre option que de légiférer», prévenait-elle.

Dans une réponse parlementaire, le ministre Lex Delles avait indiqué que les restaurateurs avaient le choix dès le printemps de cette année de proposer de l’eau du robinet, mais payante, alors que le secrétaire général du syndicat Horesca, François Koepp, se montrait beaucoup plus tiède à cette idée. La gratuité reste une utopie. Pour l’heure.

La campagne de sensibilisation promise a pris du retard à cause de la pandémie. Le secteur a pourtant pris les devants et, à travers son projet Drénkwaasser, appelle à un changement de mentalité aussi bien des ménages que des clients, des restaurateurs et des cafetiers. Avoir recours d’une manière plus conséquente à l’eau du robinet, c’est le geste demandé. Une cinquantaine d’établissements du secteur de l’Horeca participent à une phase de test afin d’étudier la faisabilité du projet à l’échelle du pays.

La nouvelle pétition devrait permettre d’avoir une première évaluation alors que chaque entreprise reste libre de fixer elle-même ce service de l’eau potable, «tout en considérant les coûts relatifs», précise le syndicat.

Contrairement à la France, commander sa carafe d’eau dans un restaurant au Luxembourg sera toujours possible, mais pas gratuit. «Le but n’est pas de rendre la carafe d’eau gratuite, mais de mettre l’accent sur le développement durable en général et sur la durabilité dans le secteur de l’Horeca en particulier», avait précisé Lex Delles.

Si cette nouvelle pétition, qui insiste sur la gratuité de la carafe d’eau du robinet au restaurant, aboutit à un débat, ce sera alors à un nouveau gouvernement de prendre position. Mais cette fameuse carafe gratuite reste un sujet très délicat pour l’Horesca.