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La future prison pour mineurs devra respecter certaines priorités


L’Ombudsman Claudia Monti estime que le site de l’Unisec, à Dreiborn, n’est pas adapté aux priorités à respecter dans la conception du futur CPM. (Photo : hervé montaigu)

L’Ombudsman a publié un rapport sur les priorités à respecter dans la construction du futur Centre pénitentiaire pour mineurs.

Depuis plus de 20 ans, le Luxembourg est critiqué par divers organismes internationaux à cause du placement de mineurs en centre pénitentiaire pour adultes. Selon les chiffres avancés par une question parlementaire de Marc Goergen (Parti pirate) en début d’année, 27 mineurs ont été détenus au Centre pénitentiaire de Luxembourg (CPL) entre 2019 et 2023.

Pour remédier à ce problème, des projets de loi visant à instaurer un droit pénal pour mineurs et opérer une séparation claire entre la protection de la jeunesse et le droit pénal ont été déposés en 2022. «Il s’agit d’un paquet de mesures pour rattraper les mineurs et non les sanctionner, et parfois pour les protéger malgré eux», a appuyé Claudia Monti, l’actuel Ombudsman. Avec ces projets de loi vient aussi un Centre pénitentiaire pour mineurs (CPM).

«Proposer des formations diplômantes»

C’est sur ce futur centre que l’Ombudsman, en sa qualité de contrôleur externe des lieux privatifs de liberté, a enquêté. «Quelles sont les priorités à mettre en œuvre dans cette prison pour mineurs?», s’est questionnée Claudia Monti. C’est là tout l’objectif du rapport thématique présenté jeudi : mettre en exergue les priorités à respecter dans la conception du futur CPM et de son concept de prise en charge. «Nous avons enquêté sur le terrain en discutant avec les mineurs actuellement à l’Unisec et nous avons étudié la loi internationale.»

L’Ombudsman soulève notamment l’importance d’accorder un soin particulier à la bonne hygiène de vie des mineurs, en permettant un contact avec l’extérieur et des activités culturelles et sportives diverses. «Il faudrait également proposer des formations diplômantes», ajoute Claudia Monti. Leur santé mentale, souvent plus fragile que celle des majeurs, doit aussi être sujette à une attention particulière. Elle souhaite que des concepts novateurs tels que l’art-thérapie soient mis en place. Et comme «la prison n’est pas un lieu fourre-tout», l’Ombudsman préconise la création d’une unité psychiatrique sociojudiciaire pour accueillir les mineurs présentant des problèmes psychologiques. «Il faut donner toutes les chances à tous les enfants.»

Un lieu peu adapté

L’Ombudsman émet aussi des réserves sur le lieu du CPM, qui prendra place sur le site de l’Unité de sécurité (Unisec) du centre socio-éducatif de l’État, à Dreiborn (est du Luxembourg) : «Le terrain est trop petit et inadapté», souligne-t-elle. Le plus gros problème? «Le manque de place pour les activités sportives et celles en extérieur.» Le terrain pose également problème pour accueillir les visites et tout le personnel.

Pour rappel, l’Unisec est une structure «conceptuellement similaire» à «une mesure privative de liberté avec prise en charge dans un cadre fermé». D’une durée moyenne de 4 mois, le séjour doit offrir une scolarisation, un soutien orthopédagogique et socioémotionnel, ainsi que de l’aide thérapeutique. La protection et le projet pédagogique sont l’essence de l’Unisec, «et non pas le caractère punitif» d’après les mots du Centre socio-éducatif de l’État (CSEE).

Peu de possibilités de séparer les groupes

Alors qu’elle peut accueillir 12 mineurs aux «comportements déviants impliquant des délits à caractère pénal», le CPM pourra quant à lui en accueillir, à terme, 30 : 15 cellules sont prévues pour les garçons et 15 pour les filles. «Parmi ces 15 places par sexe, il y aura 10 places pour les personnes condamnées et 5 pour les personnes placées en détention préventive. Deux places seront aussi prévues à l’infirmerie et une pour les profils dangereux qui ont besoin d’être canalisés avant de côtoyer les autres détenus», précise Claudia Monti. Et si elle n’est pas fan des grandes prisons, l’Ombudsman souligne quand même le manque de places : «Cela ne donne pas beaucoup de possibilités de séparer les différents groupes.»

Et si l’Unisec était présentée comme une alternative pour ne plus placer les enfants et adolescents au CPL, Claudia Monti y voit plutôt une manière de «se donner bonne conscience». «L’Unisec est une pseudo-prison, le CPM a pour but de changer ce concept et de clarifier les choses», estime-t-elle. Pour l’heure, le centre est encore en conception. La première mise en service est espérée en 2027, avec une unité de sécurité renforcée. L’ouverture totale, quant à elle, ne se fera pas avant 2030. Nombre de travaux doivent encore être faits d’ici là. «Cela vaut la peine d’investir, investir dans les jeunes n’est jamais de l’argent perdu», conclut l’Ombudsman.