Luc Holtz, cueilli par l’attaque frontale de l’un de ses patrons, répondra jeudi. La fédération, elle, fait comme si de rien n’était, ou presque.
Un pavé dans la mare. Ou plutôt non : un parpaing qui n’en finit plus d’avoir des répercussions dans le football luxembourgeois, qui fait des gorges chaudes de la défiance soudainement affichée par l’un des bras droits de Luc Holtz. Une défiance qui s’étale sur fond de critiques très orientées sur les choix «sur et hors du terrain» du sélectionneur.
Elles arrivent dans un contexte pesant : maintenant que son équipe peut prétendre à des résultats tangibles, maintenant qu’il a défriché le terrain pendant près de quinze ans, ce dernier semble avoir de moins en moins d’amis et… de plus en plus de contempteurs. Notamment dans la profession, où d’aucuns n’en finissent plus de dire que «oui, l’équipe nationale du Luxembourg va bien, mais elle pourrait, voire devrait, aller encore mieux».
Le communiqué de Maxime Chanot, qui annonce sa défection (mais pas sa retraite, même s’il semble compliqué de l’imaginer revenir tant que Holtz sera en place, après une telle sortie), celle d’un patron à plus de 70 sélections, celle d’une garantie défensive autant que de sérénité dans la relance, celle d’un des rares joueurs des Rout Léiwen qui soit actuellement titulaire indiscutable dans son club, aurait pu être sobre et se concentrer sur l’essentiel d’un point de vue sportif : il ne sera pas là en novembre parce qu’il privilégiera son club.
Mais ce communiqué a été tout le contraire : une remise en cause majeure de la façon dont l’équipe est gérée «sur et en dehors du terrain». On pourrait tourner ces six petits mots dans tous les sens, ils éclabousseraient quand même tout le monde – fédération et sélectionneur réunis – de manière équivalente.
Luc Holtz ne dira rien avant jeudi
Il y a une autre façon de les lire. Attribuer aussi le «hors» terrain au staff plutôt qu’aux administratifs. C’est presque ce que l’on serait tentés de voir dans la réaction étonnée de Joël Wolff, secrétaire général de la FLF, quand il lui a été demandé si la fédération entendait à son tour communiquer… sur le communiqué : «Non, il n’y aura pas de prise de position officielle. Je crois que c’est au coach de réagir. Je ne vois pas ce que nous aurions pu faire de faux dans la gestion autour donc nous n’avons pas l’intention de commenter, ni même de nous en mêler. Maxime Chanot a été traité avec le même respect que tous les autres joueurs de la sélection. Le sélectionneur donnera son avis, je ne vois pas ce que nous pourrions, nous, en dire de plus». Courage, fuyons ?
La fédération nous a habitués, ces derniers temps, à une communication au mieux minimaliste, au pire maladroite, limite coupable (voir l’épisode de l’éviction-surprise de Gerson Rodrigues, celui du communiqué présidentiel ambigu après les échauffourées lors de Wiltz – Progrès). Mais là, ne rien dire pourrait laisser entendre que la faute, si faute il y a, pourrait être à chercher à la tête des «A». On a connu soutien plus évident…
Sollicité par nos soins, mardi, le sélectionneur a fait savoir qu’il n’entendait pas s’exprimer publiquement sur cette attaque quasiment ad hominem, réservant sa réaction pour sa conférence de presse de demain, celle durant laquelle il dévoilera sa liste pour les rencontres face à la Bulgarie et à l’Irlande du Nord. Le patron des Rout Léiwen a indiqué, par message, que ce serait «court et précis». Donc factuel ? Sera-t-il question de ce voyage aller-retour entre Los Angeles et Plovdiv, qui a vu le défenseur central repartir presque aussitôt au terme d’un exténuant voyage et pour un problème de genou ?
La réponse ne saurait se consacrer uniquement à cet épiphénomène tant la charge de Chanot est cinglante dans son constat et qu’il transcende cet éventuel problème de personnes et de cas particulier : «Cette gestion ne permettra malheureusement pas à notre groupe de réaliser son plein potentiel. Gérer un groupe de joueurs professionnels ne s’improvise pas». Le joueur ne reproche pas à son staff la gestion de son cas, mais bel et bien une gestion globale. Et si ce communiqué exprime un ras-le-bol partagé par plus d’un joueur, pas seulement celui d’un garçon de 34 ans qui n’a pas peur de prendre position, le public aimerait sûrement le savoir.
Il est à craindre que les médias ne soient pas autorisés à vampiriser la conférence de presse avec ce seul sujet, jeudi matin, à Mondercange et que les garde-fous seront nombreux pour empêcher d’en faire un thème central. Ce serait pourtant à l’heure actuelle le seul qui vaille… si le Luxembourg n’était pas menacé de relégation sportive.
Julien Mollereau et Simon Butel