Dans son programme gouvernemental, la coalition veut garantir la compétitivité internationale du pays en matière fiscale. Le changement s’inscrit dans la continuité.
Le gouvernement Gambia 2 veut «poursuivre une politique d’investissements ambitieuse et assurer des services publics et des prestations sociales de niveau élevé», est-il écrit dans l’accord de coalition adopté la semaine dernière. Pour autant, pas question de faire peser excessivement la charge sur les sociétés : «Il ne s’agira pas d’augmenter la pression fiscale sur les entreprises, mais d’attirer de nouveaux contribuables et de développer les activités et revenus des contribuables existants», poursuit le document dans son chapitre consacré à la fiscalité.
Pour remplir cet objectif, le pays doit continuer à proposer aux investisseurs «une fiscalité compétitive et équilibrée» en se montrant exigeant dans la perception de l’impôt tout en veillant à ne pas freiner les investissements, innovations et créations d’emplois.
Mais Gambia 2 n’entend pas se lancer dans un périlleux numéro d’équilibriste et «veillera à garantir la compétitivité internationale du Luxembourg en matière fiscale». Autrement dit, le havre fiscal que constitue le Grand-Duché pour des milliers d’entreprises ne disparaîtra pas de sitôt, même si le gouvernement se dit «fermement engagé sur la voie de la transparence et de la lutte contre l’évasion fiscale».
Taxation des Gafam : le double discours
La multiplication des scandales fiscaux internationaux ces cinq dernières années ont laissé des traces au Grand-Duché, particulièrement les LuxLeaks et ses révélations de milliers de décisions fiscales anticipées – les rulings – accordées par l’administration des Contributions directes (ACD) à des multinationales. D’ailleurs, constate la coalition, «les questions liées à la fiscalité gagnent continuellement en importance, non seulement au niveau de l’Union européenne, mais également dans les enceintes internationales comme l’OCDE et le G20».
Et c’est sur ces terrains que le gouvernement et son ministre des Finances, Pierre Gramegna, veulent continuer à avancer selon le principe du «level playing field», c’est-à-dire en exigeant des règles fiscales équivalentes dans tous les pays.
Il en va ainsi de la taxation des grandes entreprises du numérique, souvent résumés par le terme Gafam, pour lequel le Luxembourg «préconise une solution globale négociée et mise en œuvre au niveau de l’OCDE».
La coalition précise qu’elle n’est pas opposée à un accord dans un cadre européen à condition qu’il soit limité dans le temps. Une affirmation surprenante alors que la proposition présentée en ce sens par la Commission européenne a capoté la semaine dernière en raison notamment de l’opposition du Luxembourg. En revanche, le gouvernement ferme totalement la porte à «l’introduction d’une taxe sur les transactions financières (FTT)» proposée par ce même exécutif européen.
Moins de boîtes aux lettres
Gambia 2 veut néanmoins donner le change alors que le pays continue à passer pour un paradis fiscal aux yeux de nombre de critiques. Concrètement, note le document de l’accord, il a déjà adopté de nouvelles règles édictées par l’UE et l’OCDE et mis progressivement en œuvre un «élargissement de la base imposable, une réduction sensible des demandes de décisions anticipées en matière fiscale et des exigences en matière de substance».
Sur ce dernier point, il veut départir le pays de sa réputation de refuge de sociétés «boîtes aux lettres» qui fleurissent toujours, comme en témoignent les centaines d’entreprises parfois établies aux adresses de sociétés spécialisées dans la domiciliation ou de cabinets d’avocats d’affaires. À l’avenir, le gouvernement veut voir les sociétés davantage localiser «les fonctions dirigeantes au Luxembourg» en adaptant le régime des «impatriés» qui permet d’offrir des avantages aux cadres s’installant au Luxembourg et aux entreprises les employant.
Taux réduit pour les petites entreprises
Dans le même esprit et pour fidéliser les talents étrangers, il veut créer une base légale favorisant leur participation au bénéfice des entreprises. Cette mesure aura pour conséquence l’abandon au cours de la législation du régime des «stock-options»
À la faveur des scandales comme LuxLeaks, les patrons de PME avaient parfois le sentiment d’être fiscalement défavorisés par rapport aux multinationales dont le taux d’imposition réel sur les bénéfices ne dépasse souvent pas 5 %. S’appuyant sur des finances publiques saines, Gambia 2 va donc élargir la tranche de revenu à laquelle s’applique le taux minimal de 15 % de l’impôt sur les entreprises de 25 000 à 175 000 euros.
Fabien Grasser
» Une politique d’investissements audacieuse » pourrait commencer par lancer des constructions de petits barrages hydroélectrique ( comme en Alsace ) afin de produire l’électricité indispensable au pays, surtout en hiver.