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La dette publique risque de prendre «un coup de vieux»


Le CNFP fait confiance aux responsables politiques pour prendre les mesures nécessaires afin de contrer les scénarios projetés. (Photo : archives lq/julien garroy)

Le vieillissement de la population pourrait, à l’horizon 2070, faire déraper les finances publiques. Au pire, la dette risque d’atteindre 223 % du PIB. Les projections sont toutefois à relativiser.

Nous allons continuer à régulièrement emprunter de l’argent, de un pour refinancer les emprunts contractés ces dernières années et de deux pour couvrir le déficit de l’État central, qui va cependant continuellement baisser. Cela implique que nous allons à l’avenir devoir considérablement moins emprunter que prévu. On est engagé sur la bonne voie», clamait le ministre des Finances, Gilles Roth, lors du dépôt du projet de budget de l’État pour 2025. Le gouvernement CSV-DP table, en effet, sur une baisse progressive de la dette publique (lire ci-dessous).

Si ces projections limitées sur une période de quatre ans se veulent positives, les tendances à plus long terme s’annoncent plus menaçantes, même si le Conseil national des finances publiques (CNFP) souligne d’emblée «les limites d’un exercice qui repose sur des projections et hypothèses démographiques, économiques et budgétaires plus ou moins plausibles établies pour un horizon d’environ 50 années». L’exercice mentionné concerne une nouvelle analyse de l’impact du vieillissement de la population sur la soutenabilité à long terme des finances publiques.

Une dette publique au-delà de 60 % du PIB en 2049

Les calculs effectués sur la base de l’Ageing Report 2024 de la Commission européenne s’avèrent assez techniques. On peut néanmoins retenir que les dépenses liées au vieillissement (pension, soins de santé, soins de longue durée et éducation) passeraient de 15,7 % du PIB en 2022 à 24,9 % du PIB en 2070.

En tenant compte des coûts additionnels pour les finances publiques (logement, transition énergétique et digitale, mobilité, défense, etc.), la dette publique pourrait dépasser 60 % du PIB en 2049. Il s’agit du seuil maximal autorisé pour les pays de la zone euro. La dette publique risque, à l’horizon 2070, de se situer dans une fourchette comprise entre 70 % et 223 % du PIB, en fonction du solde structurel du budget de l’État ainsi que des hypothèses démographiques, économiques et budgétaires retenues pour ces projections. Au Luxembourg, les gouvernements successifs se fixent une limite d’endettement équivalant à 30 % du PIB.

Un constat qui doit être «relativisé»

«Le constat d’un risque élevé pour la soutenabilité à long terme des finances publiques (…) doit toutefois être relativisé», ne tarde pas à préciser le CNFP. La méthode de calcul employée ne prend pas en compte un relèvement du taux de cotisation dès que les réserves du régime de pensions tombent en dessous d’un certain seuil. Il en va de même pour les actifs du Fonds de compensation du régime général des pensions, qui se chiffraient à 26,25 milliards d’euros au 31 décembre 2023, soit un montant supérieur au niveau de la dette publique, qui se monte à 20 milliards d’euros au même moment.

«Le fait que l’analyse s’étende sur une période aussi longue, à savoir d’ici 2070, fait que même de petites divergences au niveau de ces hypothèses – en raison de leur nature incertaine – peuvent conduire à des résultats significativement différents», ajoute le CNFP. Le scénario le moins favorable (dette de 223 % du PIB) repose sur une population de 976 000 habitants en 2070 et une croissance économique moyenne de 1,7 % entre 2022 et 2070. En revanche, le scénario tablant sur une dette de 70 % du PIB table sur une population de 1,3 million d’habitants et une croissance moyenne du PIB de 2,6 %.

«Un risque moyen, voire élevé»

Le CNFP fait aussi remarquer que ces scénarios reposent sur une politique inchangée, rendant les calculs «purement théoriques». «Il est en effet probable que des mesures seront prises par les autorités politiques en temps utile pour contrer les évolutions projetées», souligne l’institution.

En conclusion, le CNFP considère que «le Luxembourg fait face à un risque moyen, voire élevé, pour la soutenabilité à long terme des finances publiques». «Les perspectives de l’évolution à long terme des finances publiques ne doivent cependant pas être perdues de vue dans la discussion de sujets ayant un impact sur la justice intergénérationnelle, dont ceux liés au vieillissement de la population», complète le CNFP. L’entame des consultations du gouvernement sur une possible réforme du système de pensions va dans cette direction.

Roth mise sur une baisse progressive de la dette publique

Le ministre des Finances, Gilles Roth, annonce que la dette publique va se stabiliser à 27,5 % du PIB, soit 22,5 milliards d’euros. Entre 2018 et 2023, la dette est passée de 20,9 % à 25,5 % du PIB. Ce dernier pourcentage équivaut à 20,3 milliards d’euros. En 2020, la dette se limitait encore à 15,8 milliards d’euros (24,5 % du PIB).

Le gouvernement mise aujourd’hui sur une baisse progressive de la dette publique pour atteindre les 26 % du PIB en 2028. En parallèle, le déficit de l’État central doit aussi tendre à la baisse, de 1,29 milliard d’euros en 2025 à 667 millions d’euros en 2028.

En 2025, les dépenses publiques se chiffreront à 30,9 milliards d’euros (+1,4 milliard d’euros par rapport à 2024). Côté recettes, le projet de budget table sur 29,6 milliards d’euros (+1,5 milliard d’euros).