Bien que discrète, l’ASBL Wonschkutsch accomplit chaque année depuis 2018 des dizaines de derniers vœux adressés par des personnes en fin de vie ou en soins palliatifs à travers le pays.
Carlo Birscheidt possède la modestie de celui qui donne de bon cœur. Ancien vice-président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers et responsable du centre de la Base nationale de support (BNS) de Lintgen, sa commune, le désormais pensionné consacre son énergie et son temps à la présidence de l’ASBL Wonschkutsch. Conscient du travail fourni mais humble, il explique comment son association œuvre depuis sept ans pour une cause aussi noble que lourde : réaliser gratuitement les derniers vœux de personnes en soins palliatifs ou en fin de vie, sous forme de déplacements et sorties de tous ordres.
Fondée en 2018, l’ASBL s’inspire d’une initiative allemande, en Bavière, du nom de «Der Wünschewagen« («La voiture à souhaits»). «Avec l’aide d’un ami infirmier spécialisé en soins palliatifs, le premier président a voulu organiser une telle association, ici au Luxembourg», et tous deux se sont employés, dans cet objectif, à «réunir des proches travaillant dans des services de secours», raconte Carlo Birscheidt. Depuis cette genèse, un large réseau s’est constitué afin de remplir au mieux cette mission de charité : «On travaille avec les hôpitaux et les unités de soins palliatifs, avec la fondation Omega 90 qui accompagne les personnes atteintes de maladie incurable, et aussi avec les services de soins à domicile.»
De Dubaï à Lourdes
Concrètement, ce sont des membres de la famille ou des infirmiers qui sollicitent Wonschkutsch. Après une évaluation de l’état de santé de la personne concernée, la quarantaine de bénévoles s’active afin de désigner deux accompagnateurs et d’organiser le déplacement de «dernier vœu» qui, peut nécessiter une certaine préparation. Carlo Birscheidt se rappelle, par exemple, un voyage de trois jours à Dubaï, ou une traversée de la France jusqu’au sanctuaire de Lourdes.
«On est toujours content d’avoir des bénévoles à la retraite parce que pour les autres, c’est compliqué de faire de tels voyages» sourit le président qui tient malgré tout à préciser que «nous ne sommes pas une agence de voyages», en référence à la demande, refusée, d’un tour de la France sur deux semaines! Néanmoins, les demandes sont généralement plus à portée de main. «Nous faisons aussi des transports pour la Schueberfouer, pour des journées shopping à la Belle Étoile, pour des mariages de petits-enfants, pour des concerts à Trèves ou pour de simples retours à la maison.»
Parmi les demandes récurrentes, les membres de l’ASBL constatent qu’«il y a beaucoup de nostalgie» et que la plupart s’apparentent à un retour en enfance, tels qu’un déplacement pour le marché de noël ou le château qui a bercé leur jeunesse. Que ce soit pour une madeleine de Proust ou pour vivre une grande première, «contactez la Wonschkutsch afin de vivre un moment inoubliable» lance Carlo Birscheidt.
«C’est émouvant»
Pour les bénévoles aussi, les sorties sont des moments privilégiés : «On passe un bon moment, on voit que la personne est heureuse, joyeuse, et c’est émouvant». Forcément, au vu de l’état de santé des bénéficiaires, l’émerveillement des bénévoles est parfois vite chassé par le deuil car, «cela arrive que l’on lise l’avis mortuaire de la personne transportée trois jours plus tard».
Après une pause forcée durant la pandémie, l’activité de l’ASBL est repartie de plus belle et réalise, en moyenne, une quarantaine de sorties par an. Malgré tout, son président estime qu’il est possible de faire mieux puisque «nous ne sommes pas très connus dans le sud du pays». Pour cause, les bénévoles se déplacent davantage dans les marchés et manifestations populaires des communes du centre et du nord afin de se faire connaître via un stand d’information. D’un autre côté, l’ASBL ne cherche pas la publicité à tout prix, car «nous attendons toujours d’être contactés par les localités et syndicats divers pour être présents».
Pour l’instant, force est de constater que la visibilité actuelle convient puisqu’elle a permis de récolter assez de dons pour se doter très prochainement d’un bureau à Lintgen, et d’une nouvelle ambulance afin de pouvoir transporter les personnes alitées. «Nous avons beaucoup de dons qui viennent après les annonces mortuaires», fait savoir Carlo Birscheidt, comme une preuve de l’accompagnement soigneux de l’ASBL pour ce dernier voyage.