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La déconnexion ancrée dans la loi luxembourgeoise


(Photo : AFP)

L’entreprise sera libre de décider des mesures visant à faire respecter le droit à la déconnexion des salariés utilisant des outils numériques à des fins professionnelles.

Le droit à la déconnexion était prévu dans l’accord de coalition et sera voté mardi à la Chambre. Jusqu’à présent, le droit luxembourgeois se référait en la matière au respect des règles relatives à la durée du travail et à une obligation générale d’assurer la sécurité et la santé de l’ensemble des salariés.

En revanche, il en est fait mention dans la convention relative au télétravail signée entre les partenaires sociaux le 20 octobre 2020 et déclarée d’obligation générale par règlement grand-ducal. Le Conseil économique et social (CES) avait rendu un avis en avril 2021 concernant le droit à la déconnexion qui a largement inspiré les auteurs du projet de loi.

D’après cet avis, «les mécanismes assurant le respect du droit à la déconnexion en dehors du temps de travail doivent être adaptés aux spécificités et problématiques des entreprises concernées». Ainsi, une entreprise pourrait, par exemple, élaborer une charte ou organiser des séances d’information pour sensibiliser les salariés sur l’importance de la déconnexion et les guider quant au bon usage des outils numériques et des courriels, comme le souligne le rapport de la commission du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale.

De même, l’entreprise pourrait décider de bloquer l’accès à ses serveurs pendant certaines plages horaires journalières et hebdomadaires ou demander aux salariés de laisser les outils numériques dans les locaux de l’entreprise lorsqu’ils quittent ceux-ci.

Dans ce contexte, l’avis du CES souligne «qu’en toutes circonstances, l’entreprise sera libre de décider des mesures visant à faire respecter le droit à la déconnexion des salariés utilisant des outils numériques à des fins professionnelles».

L’avis précise également que les partenaires sociaux considèrent qu’il convient d’impliquer les représentants du personnel dans la mise en place d’un régime assurant le respect du droit à la déconnexion en dehors du temps de travail. Il s’agira donc d’un point supplémentaire à régler dans les négociations concernant les conventions collectives. En l’absence de stipulation par voie de convention collective ou d’accord subordonné, la mise en place du régime de déconnexion se ferait après information et consultation de la délégation du personnel ou de commun accord avec celle-ci dans les entreprises d’au moins 150 salariés. À défaut de délégation du personnel, l’entrepreneur définit un tel régime et en informe les salariés.

Pas d’objections majeures

Le texte inscrit à l’ordre du jour de la séance de mardi n’a pas soulevé d’objections majeures de la part des chambres professionnelles. Le Conseil d’État, toutefois, avait émis deux oppositions formelles en constatant que le projet de loi se limitait à établir de manière très générale une obligation de mettre en place un régime assurant le respect du droit à la déconnexion, sans plus de précision. Les Sages craignaient qu’un employeur puisse mettre en place, en toute légalité, un régime prévoyant un droit à la déconnexion «limité à quelques minutes par jour ou quelques jours par an puisqu’il n’y a aucune indication contraire dans le texte».

Le Conseil d’État ajoute, dans le même ordre d’esprit, que «l’article sous examen prévoit que le régime spécifique mis en place peut prévoir des dérogations exceptionnelles au droit à la déconnexion sans, là encore, que la loi ne prévoie le moindre critère encadrant cette possibilité.»

Pour régler le problème, il a été rappelé dans le texte que ce nouveau régime doit assurer le respect des dispositions légales ou conventionnelles applicables en matière de temps de travail. Cette précision constitue une garantie pour les salariés que les règles en matière de temps de travail telles que notamment celles relatives au temps de repos et aux différents congés prévus par le Code du travail ou, le cas échéant, par une convention collective, ne peuvent pas être ignorées puisqu’en fait, le droit à la déconnexion n’est rien d’autre qu’une application de celles-ci.

En cas de manquement, le texte prévoit une sanction administrative, à prononcer par le directeur de l’Inspection du travail et des mines, et elle est destinée à inciter les entreprises à se conformer à ces nouvelles dispositions en matière de sécurité et de santé au travail. «Cette sanction peut être modulée pour tenir compte des circonstances, dont par exemple la taille de l’entreprise, la gravité du manquement, ainsi que le comportement spécifique de l’entreprise.»

Le projet de loi prévoit aussi un décalage uniforme de trois ans pour la mise en vigueur du régime de sanctions pour l’ensemble des employeurs dont les salariés utilisent des outils numériques à des fins professionnelles.

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