La Commission consultative des droits de l’homme juge sévèrement les conditions d’accès à la structure d’accueil hivernale des sans-abri. Des critères qui seraient contraires aux droits humains.
Il est fondamental que la Wanteraktioun (WAK) puisse répondre à sa mission première : accueillir les personnes sans abri vivant au Luxembourg. C’est ce but que poursuivent tous les collaborateurs des trois organisations Croix Rouge, Hëllef um Terrain et Inter-Actions réunies au sein de l’ASBL Dräieck.
Ensemble, ils mettent toutes leurs compétences, leur expertise et leur engagement au service des plus vulnérables afin de garantir que personne ne meure de froid au Luxembourg», déclarait Edvard Skrijel, président de l’association Dräieck. C’était quelques jours avant l’ouverture, le 15 novembre 2024, du bâtiment A de la structure d’urgence multifonctionnelle au Findel qui accueille jusqu’au 15 avril prochain les sans-abri pendant les mois les plus froids de l’hiver.
La WAK est aujourd’hui fortement critiquée par la Commission consultative des droits de l’homme (CCDH). En cause : les nouvelles conditions d’accès limitées seulement aux personnes pouvant justifier d’une présence d’au moins trois mois sur le territoire luxembourgeois, alors que les autres sont tolérées trois nuits.
La CCDH critique cette sélection sur un critère purement administratif. «La décision de restreindre l’accès soulève de nombreuses questions quant au respect des droits humains, et le problème systémique de l’accès au logement abordable au Luxembourg», déclare la CCDH dans un communiqué. Elle appelle le gouvernement à créer des conditions «qui permettent de garantir un accès à des biens et services essentiels, dont un abri et une prise en charge sociale et médicale adéquate, à toute personne, sans distinction sur base de leur situation administrative».
Pour bénéficier de cette structure d’accueil hivernale, les sans-abri doivent prouver une prise en charge par un service social depuis au moins trois mois. Une lourdeur administrative, selon la CCDH. Elle estime qu’avant de décider d’une telle restriction, l’État doit être capable de mettre en place des mesures «visant à lutter contre l’augmentation de la pauvreté et d’améliorer l’accès à un hébergement».
Les capacités d’accueil sont insuffisantes et la seule alternative, selon la CCDH serait de prévoir une augmentation du nombre de places disponibles ou d’autres moyens d’hébergements.
«Messages contradictoires»Pourquoi cette restriction? Parce que la structure aurait fait face à des demandes d’accès par des personnes résidant à l’étranger et qui viennent profiter de cet accueil pendant la saison d’hiver. «Cette assertion n’est pas appuyée par des chiffres fiables», fait remarquer la CCDH pour qui les chiffres indiqués par le passé ne font pas de distinction entre ceux qui demandaient pour la première fois d’accéder à la structure tout en se trouvant depuis plus de trois mois au pays et ceux qui venaient d’entrer sur le territoire avant leur demande d’accès.
Le ministre de tutelle, Max Hahn, témoignait récemment dans nos colonnes qu’il avait rencontré des gens lui précisant venir d’Espagne où ils vivaient dans un hôtel et débarquaient au Luxembourg pendant les mois où l’hôtel était fermé pour passer l’hiver ici. «C’est l’un des multiples exemples qui prouvent qu’avec un service comme la WAK, unique dans toute la région, nous attirons bien évidemment d’autres gens. Mais nous dépassons alors nos capacités d’accueil. L’objectif de la WAK est d’éviter que des sans-abri du Luxembourg ne meurent de froid dans la rue. C’est sa vocation principale et nous risquions de ne plus pouvoir atteindre cet objectif», nous expliquait-il.
La WAK reste cependant ouverte pour tous, quand il y a un risque de température négative. La CCDH rappelle que la WAK était le seul recours pour plusieurs demandeurs de protection internationale (DPI) qui n’avaient pas été admis dans une structure spécifique au prétexte d’un manque de places disponibles et souligne qu’un tel traitement «n’est pas digne d’un pays qui se veut respectueux des droits humains».
La CCDH exprime également ses préoccupations «face aux messages contradictoires émanant du gouvernement». Elle cite l’interdiction de la mendicité, justifiée par les aides existantes face à la restriction d’accès à la «Wanteraktioun», justifiée par un manque de places disponibles.