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Kiné au Luxembourg, il finit la Diagonale des Fous


Après un dernier sprint vers la ligne d’arrivée, l’ultra-traileur termine 438e sur 2 937 participants. (Photos DR)

Le Mosellan Arnaud Stein, kinésithérapeute au Luxembourg, est venu à bout des 175 km de l’une des courses les plus difficiles du monde.

Quarante-quatre heures et une petite minute, c’est le temps qu’il aura fallu au Mosellan Arnaud Stein, kinésithérapeute au Centre médical du sport du CHEM Niederkorn, pour terminer l’une des courses les plus difficiles du monde : la Diagonale des Fous. Cette épreuve consiste à traverser l’île de la Réunion, soit 175 km et quelque 10 000 mètres de dénivelé, dans un climat mêlant chaleur suffocante et humidité étourdissante. Le départ a été donné le jeudi 17 octobre à 22 h à Saint-Pierre, dans le sud de l’île. Quelques jours après son arrivée, l’ultra-traileur de 33 ans revient sur cette épopée incroyable. 

Comment vous sentez-vous quelques jours après cette course?

Arnaud Stein : Je me sens fier d’avoir réussi! C’est un rêve auquel je pense depuis environ dix ans. Cela représente un aboutissement après de longues années d’entraînement et beaucoup de sacrifices.

Depuis combien de temps faites-vous du trail?

Cela fait douze ans. J’ai commencé en suivant mon père, qui a une grande passion pour le trail. Il a déjà fait l’Ultra-Trail du Mont-Blanc, le Marathon des sables et plusieurs fois la Diagonale des Fous.

Qu’est-ce qui vous plaît dans cette pratique?

J’aime la nature, l’obligation d’écouter son corps, la gestion des bons et des mauvais moments lors des courses.

Comment s’est déroulée votre préparation?

J’avais un niveau très correct et dès la réception de mon dossard, le 30 janvier, j’ai planifié un programme d’entraînement composé de course à pied, de préparations physique, avec un grand volume d’entraînement. J’ai aussi réalisé quelques courses comme le Swiss Canyon Trail, qui fait 118 km, ou le Mullerthal Trail, long de 115 km. En moyenne, je courais 80 km par semaine. J’ai la chance d’avoir un métier qui me permet de faire 40 heures par semaine et de me laisser du temps pour m’entraîner deux à trois fois par jour. Pour trouver du dénivelé, je suis allé dans les Alpes et dans les Vosges et j’ai aussi trouvé de quoi faire près de Thionville. Aussi, je suis venu deux fois à la Réunion pour reconnaître le parcours. Au moment de la course, je connaissais très bien 80 % du tracé.

Le parcours mêle des paysages très variés allant du sable rouge à la jungle en passant par de nombreuses rivières.

Comment vous sentiez-vous avant la course?

Je suis arrivé sur l’île de la Réunion cinq jours avant la course. J’avais très envie de commencer, d’être sur la ligne de départ. L’attente est très longue. De plus, je ne devais pas passer trop de temps au soleil, je ne devais pas me lancer dans des randonnées trop longues pour ne pas fatiguer mon corps.

Pouvez-vous nous décrire les premières heures?

Le départ se déroule à 22 h depuis la ville de Saint-Pierre au sud de l’île. Il fait nuit, l’ambiance est géniale, j’aperçois certains traileurs que j’admire parmi les coureurs. C’est très motivant. Les premiers kilomètres sont assez roulants malgré le dénivelé, mais j’avoue avoir eu des difficultés à gérer un départ si tardif. Après sept heures de course, j’étais très fatigué et j’ai décidé de m’arrêter pour dormir pendant 45 minutes au ravitaillement. Ça a été très bénéfique pour la suite, car cela m’a permis de reprendre de l’énergie et d’éviter une blessure. Repartir avec le lever du soleil m’a aussi beaucoup motivé.

Les 2 000 m de dénivelé positif du Maïdo (NDLR : un sommet montagneux) constituent l’une des difficultés majeures de la course. Pouvez-vous nous parler de cette portion?

J’ai pris la direction de Mafate et du Maïdo par le col du Taïbit après m’être bien ravitaillé. Il fait alors nuit, je descends au fond du cirque de Mafate. Là, mes beaux-frères m’attendent pour un nouveau petit ravitaillement, ils courent un peu avec moi. Cela fait du bien de voir des proches. Ensuite, j’attaque ces 2 000 mètres de dénivelé positif pour remonter le Maïdo. Sur le papier, il s’agit de la partie la plus difficile de la course, mais tout s’est très bien passé pour moi. Les objectifs de temps étaient respectés. Mon père m’attendait au sommet. Pour l’avoir déjà fait, il sait à quel point c’est difficile. Quand j’arrive là, j’ai déjà couru environ 115 km. Une fois cette difficulté avalée, on est quasi sûr de terminer. J’enchaîne ensuite sur 20 km de descente vraiment pas facile, mais le soleil se lève et ça me fait du bien.

Qu’avez-vous ressenti au moment de l’arrivée?

Beaucoup d’émotions… Toutes les personnes qui m’ont aidé étaient présentes. J’ai beaucoup pensé à mon grand-père, qui était réunionnais. Il y a beaucoup de monde à ce moment-là. J’étais très heureux, très ému. C’est une île très intense. Elle est transformée au moment de la Diagonale des Fous. Quant à ma performance, j’espérais finir en 48 heures et j’ai terminé en 44 heures. Je me suis surpris moi-même et je suis très satisfait.

Qu’est-ce qui a été le plus difficile pour vous durant cette épreuve?

La gestion du sommeil et la nutrition. J’appréhendais beaucoup le fait d’avoir un problème digestif durant la course. Je n’ai pris aucun risque à ce niveau-là. Je n’ai mangé que des choses sûres. Physiquement, après quatre heures de descente, j’ai eu des douleurs à la cheville, mais ce sont les seules douleurs que j’ai ressenties. Avec les courbatures évidemment.

Comment vous êtes-vous organisé pour les ravitaillements?

Ma compagne, mes parents, ma belle-famille étaient présents pour m’aider tout au long de la course. Je souhaitais qu’ils profitent tous de la course. J’avais réservé des gîtes pour qu’ils puissent dormir, pour m’attendre, sans rester dans le froid. C’est très important, en tant que participant, de savoir que quelqu’un nous attend. Les ravitaillements font énormément de bien, ça permet de reprendre des forces, de dormir, de se laver, de se changer.

Quels ont été les moments forts de cette course?

Je me dis encore que c’est complètement fou de vouloir se lancer un tel défi. Sur la ligne de départ, on est tous ensemble sans savoir pourquoi on fait cela. Cela représente des années de sacrifices. Quand on y pense, c’est fou de réussir à traverser une île, c’est tellement énorme.

Avez-vous déjà un nouveau défi en ligne de mire?

Ma compagne est enceinte, nous allons avoir une petite fille. Je suis très heureux d’avoir réussi à boucler la Diagonale avant la naissance de notre bébé. Je vais me calmer au niveau de la course à pied, à présent. Mon prochain objectif, c’est d’accueillir ce bébé et de prendre soin de toute la famille.

La Diagonale des Fous en chiffres

175 
Le parcours de 2024 a été rallongé de dix kilomètres par rapport aux années précédentes, passant de 165 à 175 km.

10 150 
En mètres, le dénivelé cumulé positif entre le départ à Saint-Pierre et l’arrivée à Saint-Denis.

2 937
Au départ de la Diagonale des Fous, ils étaient 2 937 coureurs.

31,47 %
Le taux d’abandons de cette édition 2024 est plus élevé que celui de l’année précédente

23 h 25

Le vainqueur de cette édition, le Français Mathieu Blanchard, a mis 23 h 25’02’’ pour parcourir les 175 km.