Contrôlé à 177 km/h au lieu de 70 km/h à hauteur du chantier près de Pontpierre sur l’A4 en 2016, un conducteur contestait la méthode de mesurage de la police. Si en première instance, il avait échappé au délit de grande vitesse, la Cour d’appel en est arrivée à une autre conclusion…
C’était le 20 août 2016 au matin, quand la patrouille de police à bord de sa voiture en mouvement avait détecté l’excès de vitesse, à l’aide d’un radar laser (cinémomètre) : 163 km/h au lieu de 130 km/h, puis 148 km/h au lieu de 90 km/h et enfin 177 km/h au lieu de 70 km/h. Voilà les trois excès de vitesse relevés dans le procès-verbal par la patrouille de police en direction d’Esch-sur-Alzette dans sa voiture banalisée.
Qu’il ait roulé trop vite sur l’autoroute à l’approche du chantier près de Pontpierre sur l’A4, le jeune homme de 28 ans au volant d’une VW Scirocco ne le contestait pas. Mais la vitesse exacte mesurée par la police, si.
Assisté par Me Georges Keipes, il avait attaqué la fiabilité de l’appareil utilisé. L’avocat avait parlé d’une «preuve déloyale». Citant le distributeur de l’appareil, le TraffiPatrol aurait été conçu pour une utilisation statique (à la main ou sur un trépied). «Avec cet appareil, il est techniquement possible de mesurer la vitesse à partir d’une voiture de police en mouvement. Toutefois, la vitesse mesurée n’est que relative», avait-il plaidé.
Si en première instance, le prévenu avait échappé au délit de grande vitesse parce que le tribunal estimait qu’un certain doute subsistait quant à la bonne application le jour du contrôle par les agents de la méthode de mesurage, la Cour d’appel a tranché différemment. C’est le parquet qui avait interjeté appel, le prévenu avait emboîté le pas. Au lieu des 6 mois d’interdiction de conduire assortis du sursis intégral et des 250 euros d’amende, il écope d’une interdiction de conduire de 12 mois avec sursis, d’une amende contraventionnelle de 500 euros et enfin d’une amende correctionnelle de 800 euros.
«Ils contournent le problème du mesurage»
En effet, la Cour d’appel ne se limite pas à une condamnation pour avoir « circulé à une vitesse dangereuse selon les circonstances ». Pour les deux derniers excès de vitesse mesurés, elle retient bien le délit de grande vitesse suivant dans les grandes lignes les réquisitions du parquet général.
« Les juges n’ont pas abordé le volet de la « preuve déloyale ». C’est dommage, car on est d’avis qu’un contrôle est techniquement possible avec un cinémomètre, mais doit être appliqué précisément. Je reste convaincu que l’appareil de mesurage n’est pas homologué pour faire de telles mesures à bord d’une voiture en mouvement», commente ainsi Me Keipes l’arrêt rendu le 29 août. Il poursuit : «Sans se prononcer sur le fait que la méthode de mesurage soit bonne ou fausse, ils se basent sur ce que dit la police.» Le fait que le contrôle ait été effectué par un officier de la police judiciaire a son importance dans la motivation de la décision de justice.
Si techniquement un pourvoi en cassation est encore possible, la décision de la Cour d’appel est bien partie pour faire jurisprudence pour les affaires suivantes. «Le recours en cassation est uniquement possible en cas d’erreur en droit», rappelle Me Keipes.
Juridiquement, l’arrêt rendu par la Cour d’appel relève un autre point intéressant : les magistrats n’ont pas retenu la vitesse mesurée de 177 km/h, mais le fait que l’automobiliste ait circulé à une vitesse supérieure à 105 km/h, là où elle était limitée à 70 km/h. Même chose pour les 148 km/h mesurés où il a donc circulé à une vitesse supérieure à 135 km/h, là où la vitesse était limitée à 90 km/h. «Au-delà de ces vitesses, on est toujours dans le délit de grande vitesse», précise Me Keipes. Et de conclure : «Les magistrats contournent ainsi la problématique du mesurage.»
Fabienne Armborst