C’est tout simplement le plus grand exploit de son interminable carrière qu’on demande à la pongiste luxembourgeoise ce mercredi matin.
D’un côté, Ni Xia Lian, 61 ans, pongiste olympique la plus âgée de l’histoire. Qui est également devenue samedi la doyenne à avoir remporté un match aux JO. De l’autre, Sun Yingsha, 23 ans, numéro un mondiale, vice-championne olympique à Tokyo, championne olympique en double mixte à Paris. Entre les deux, 38 ans de différence. Et une bonne cinquantaine de places au ranking mondial. On l’aura compris, sur le papier, il n’y a pas photo entre les deux pongistes.
Alors que Ni Xia Lian, qui semblait partie pour s’imposer en quatre manches pour son entrée en lice face à la Turque Sibel Altinkaya, a finalement eu besoin de six manches pour se débarrasser de son adversaire, dans le même temps, la jeune Chinoise expédiait les affaires courantes en pulvérisant la Brésilienne Giulia Takahashi (3, 6, 6, 5).
Dès le tirage au sort, on savait que Ni Xia Lian avait une chance de passer le premier tour. Mais que son aventure risquait clairement de prendre fin rapidement après. D’ailleurs, au moment d’évoquer son adversaire, la Luxembourgeoise ne trouvait tout simplement pas les mots : «Oh mon dieu, Sun Yingsha!» Et rapidement, elle semblait presque baisser les armes : «Contre une autre adversaire, peut-être que j’aurais une chance d’aller plus loin. Mais là, non. Elle est trop forte. Trop puissante.» Avant que la compétitrice ne revienne au galop : «Je suis très fière d’avoir l’occasion de jouer contre une telle adversaire. Et je vais me battre sur chaque point.»
Quelques leviers à actionner malgré tout
On ne va pas se mentir, on ne se berce pas trop d’illusions. En fait, c’est tout simplement du réalisme. Les deux femmes n’évoluent tout simplement pas sur la même planète. Comme le résume Tommy Danielsson, entraîneur et mari de Ni Xia Lian : «Elle est de très loin la meilleure joueuse du monde. Elle a le topspin le plus fort du monde. Elle a un excellent service. Elle est d’une rapidité incroyable. Mentalement, elle est très solide.» Et d’ajouter : «Elle a toujours à sa disposition cinq coaches autour d’elle, qui l’aident, qui analysent ses adversaires. Elle s’entraîne tout au long de l’année avec les meilleurs sparring du monde. Et elle est en pleine force de l’âge!» N’en jetez plus!
On l’aura compris, ce qu’on demande à Ni Xia Lian relève tout simplement d’un exploit incommensurable. Et quand on lui demande sur quels leviers Ni Xia Lian peut jouer pour avoir une chance d’exister un tant soit peu, Tommy Danielsson essaie de trouver quelques axes : «Sun Yingsha peut être nerveuse. Elle peut être dans un mauvais jour. Être un peu malade.» Avant d’ajouter, réaliste : «Elle est la favorite pour la médaille d’or. Xia Lian non. Si les JO avaient lieu en 1983, il y a plus de quarante ans, c’est Xia Lian qui serait dans la même position.»
Maintenant, même si Ni Xia Lian devra faire face à quelqu’un de beaucoup plus jeune, plus physique et puissante qu’elle, il lui reste son atout principal : son cerveau. «Xia Lian peut la surprendre par sa variation et son placement.»
Juste après la victoire de Ni Xia Lian face à la Turque, Tommy Danielsson blaguait en évoquant la suite : «Si elle gagne le premier point, elle aura été au moins une fois devant au score.» Révélateur du sentiment global de l’énorme défi qui attend Ni Xia Lian. De toute façon, au pire, elle prendra 4-0 en une demi-heure. Mais quoi qu’il en soit, elle aura remporté un match, ce qui est mieux qu’à Tokyo. Et à 61 ans, c’est déjà un énorme exploit. Maintenant, si elle a envie de choquer la planète ping, elle sait ce qu’il lui reste à faire!