[JO-2024] Jeanne Lehair : «Si ce n’est pas un triathlon, ça va me saouler»

TRIATHLON Jeanne Lehair se prépare pour le triathlon olympique ce mercredi matin. Et elle n’a pas du tout envie que ça se transforme en duathlon.

Comment vous sentez-vous ?

Jeanne Lehair : Ça va. Je suis en train de prendre mon goûter, mais ce n’est pas ouf. J’ai pris des flocons d’avoine, mais j’ai pas mis assez de topping. Du coup, le goût est très… flocons d’avoine.

Il y a beaucoup de critiques à propos du village olympique. Êtes-vous satisfaite des conditions d’hébergement ?

Oui. Je ne suis pas trop princesse donc ça va. Je suis une habituée du camping. Le lit en carton, ça me va bien. On a rajouté des surmatelas à ceux qui le souhaitaient. Je n’en voyais pas trop l’utilité, mais mon coach (NDLR : Paulo Silva Araujo Ferreira de Sousa) m’a dit que ce serait bien que j’en prenne. Alors, j’en ai pris.

Mais vous avez choisi de passer les deux dernières nuits avant votre course à l’extérieur ? 

Oui. D’habitude j’aime bien aller sur le site à vélo, mais là on ne peut pas vu qu’on nous prend les vélos la veille au matin. Du coup, j’irai peut-être en Vélib’. Après, la course est à 8 h, pour y aller tu dois te taper 40 minutes de bus.

Cela ferait partir vers 5 h 30 du mat et ça fait chier de devoir se lever aussi tôt. Alors qu’à l’hôtel qui est tout près, je peux me lever tranquillement vers 6 h. Ça t’évite de perdre du temps. Au début, je voulais une seule nuit mais mon coach m’a dit d’en prendre deux comme cela on a toujours une nuit de plus pour résoudre les problèmes s’il y en a. Il n’a pas tort.

Vous devez laisser vos vélos la veille au matin ? 

Oui. Il y a plein de règles un peu pénibles qu’il n’y a pas d’habitude. Par exemple, normalement, on passe sur le ponton à la suite en fonction de son ranking et chacun choisit sa position. Mais là, c’est différent. Les dix premières, dont je fais partie, peuvent choisir leur emplacement.

Chacune son tour, sans qu’on sache où est l’autre. Quand c’était mon tour, ce n’est que mon sixième choix qui a été validé. Je trouve ça un peu pourri, car on ne sait pas à côté de qui on se trouve et ce qui pouvait être un avantage peut se transformer en désavantage.

Trois fois plus de courant qu’au test event

Finalement, vous avez opté pour quelle position ?  

J’ai la 21. J’ai choisi par rapport au courant. D’habitude, on privilégie les places sur les bords pour éviter de prendre trop de coups. Mais là, lors du test event l’an passé, on avait vu que le courant était assez prononcé et que ça faisait des différences si tu étais au milieu ou sur les bords. Et il paraît que par rapport au test event, il est encore trois fois plus fort qu’à l’époque.

Les deux reconnaissances dans la Seine ont été annulées, comment vivez-vous cette situation ?

De toute façon, je n’avais pas prévu de les faire. Il faut dire que je les fais rarement. Ça dépend vraiment de l’endroit. À Hambourg je ne l’ai jamais faite.

À votre avis, vous allez courir mercredi ?

En tout cas, j’essaie de m’auto-convaincre. Moi, j’espère que c’est le 31 et qu’on va faire un triathlon. J’ai toute ma famille qui est là. Si on décale au 2 août, pas sûr qu’ils puissent revenir. Tout ce que je veux, c’est faire un triathlon. Et pas un duathlon. Moi, je fais du triathlon !

Quels sont les différents scénarios ? 

Soit on fait un triathlon le 31. Soit il y a un report au 2 août. Et ensuite, c’est soit triathlon. Soit duathlon. Et si ce n’est pas un triathlon, ça va me saouler.

Pouvez-vous nous expliquer quel est le problème principal ?

Le plus compliqué, c’est le courant. Il est vraiment hyper-rapide si bien que ça peut être un peu très, très dur pour nous au retour. Je ne l’ai jamais fait, mais on risque de se retrouver en surplace. À part cela, des eaux sales on en connaît. Et parfois, des eaux qui paraissent très belles sont en fait dégueux et inversement.

Ensuite, ce n’est pas une eau qu’on va boire. On va passer vingt minutes dedans, on va survivre! L’an passé, je ne me rappelle pas qu’il y avait eu des mégaproblèmes.

J’aimerais bien faire un top 8

De toute façon, il y aura une course. Quel est votre objectif ? 

Je pense qu’elles sont deux ou trois un peu au-dessus avec Cassandre (Beaugrand), Beth (Potter) et aussi une Allemande, Lisa (Tertsch), qui vient de finir deux fois deuxième. Mais ensuite il y a une telle densité que, si je suis à mon meilleur, je peux aussi bien terminer 4-5 que 12-13. Personnellement, j’aimerais bien faire un top 8. J’ai montré que j’avais les capacités de le faire.

Le problème, c’est qu’on est nombreuses à les avoir. Il se peut très bien que des filles que je bats habituellement, la seule fois où elle vont me battre, c’est aux Jeux. Honnêtement, je défie quiconque de me donner le top 8, 10 ou 12 dans l’ordre. En tout cas, si je suis encore dans le groupe pour la médaille à la fin, je serais très fière de moi. Je sais que parfois, je parviens à sortir des sprints intéressants. On verra.

Vous savez quelle sera votre stratégie ?

Lors de chaque course, mon coach m’a disputée car je faisais la course devant. Il m’a dit que je devais garder mon énergie. Maintenant, ce n’est pas franchement mon tempérament. Mais ce serait peut-être mieux de rester derrière en course à pied même si je ne pense pas que ça me fera économiser beaucoup d’énergie.

Maintenant si elles me voient ratonner, derrière, les autres vont se frustrer. Ou peut-être qu’elles vont me sous-estimer. Je n’en sais rien.

Pensez-vous que ça se jouera en course à pied ou que ça peut partir en vélo ?

Le parcours n’est pas trop technique mais quand même. Une pote qui ne fait pas la course m’a dit que le parcours n’était pas si dur alors que je me souviens que j’avais subi tout du long l’année dernière. Il y en a qui poseront le vélo plus fraîches que d’autres. Celles qui ne sont pas les meilleures en course à pied ont intérêt à le faire avec au moins 30«  voire 45«  d’avance.

Mais je pense que Cassandre peut boucher ces 45« . Et puis je n’oublie pas quelqu’un comme Flora (NDLR : Duffy, championne olympique en titre). Elle a l’expérience. Par rapport à Cagliari, elle a encore eu un mois et demi dans les jambes pour se préparer. Et surtout, elle n’était pas si loin que ça.

À Cagliari, elle part lentement et elle remonte tout du long pour terminer dans le top 10. Ça va être intéressant. Il y a tellement de filles fortes.

Vous arrivez en tout cas avec très peu de courses dans les jambes. Que pensez-vous de votre saison jusqu’à présent ? 

Je n’ai pas fait grand-chose. J’étais tournée sur les Jeux. Mais après, je vais être pas mal occupée. Jusqu’à présent, je me suis beaucoup entraînée (NDLR : notamment à Font-Romeu). J’espère que ça va porter ses fruits. En tout cas, de notre groupe d’entraînement, on est 9 à être qualifiées pour les Jeux. Donc, le travail avec mon coach fonctionne bien. Et ce, depuis trois ans.