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«J’ai trois mécaniciens qui peuvent tout faire»


«Les voitures anciennes, ça mérite du temps et de la réflexion», confie Steven Boulot. (Photo : archives lq/tania feller)

Le manque de mécaniciens n’affecte pas encore l’atelier Rétromobile à Ellange, spécialisé dans les voitures anciennes, mais son responsable sait que le jour où il voudra en recruter un, ce sera comme jouer «à la roulette russe».

Le métier exercé par vos mécaniciens est-il différent de celui des garages traditionnels ?

Steven Boulot, gérant de l’atelier Rétromobile : On est complètement différents. Notre quotidien, c’est l’entretien de la voiture ancienne : mécanique, peinture, carrosserie, et puis tout modèle, toute année à partir de 1920 jusqu’avant les années 2000. J’ai trois mécaniciens qui peuvent, entre guillemets, tout faire. C’est-à-dire qu’ils savent autant s’occuper de l’électricité que du remontage moteur, du réglage, travailler sur toutes les parties mécaniques des voitures anciennes. On n’a pas du tout d’expérience dans tout ce qui est diagnostic, électronique, nous, on n’est pas du tout à jour là-dessus, et ce n’est pas notre objectif. Ici, c’est vraiment la pure mécanique, qu’on apprend à l’école, mais toujours avec une certaine expérience et de la passion.

La passion est importante?

On n’a pas besoin d’avoir dix ans d’expérience pour venir travailler, du moment qu’on est passionné et qu’on sait ce qu’on fait et à quoi ça sert. Voilà, ça, c’est le principal.

Vous souffrez de la difficulté à trouver de la main-d’œuvre?
Je ne cherche pas. Enfin, si demain, un de mes mécaniciens me dit qu’il part, là, je vais chercher. Et ça sera un peu la roulette russe. Toutes les deux, trois semaines, quelqu’un vient se présenter pour demander s’il y a de la place. Mais il n’est pas prêt pour notre métier, puisqu’il a soit une formation spécifique, qui ne sert à rien, ici. Soit ce sont des personnes en reconversion et c’est compliqué aussi, car il faut quand même avoir des bases fortes en mécanique et une expérience à côté, si possible, dans les vieilles voitures. Les troisièmes profils, ce sont des gens qui sont dans le milieu de l’ancienne. Mais, comme je dis, le milieu de l’ancienne, c’est vague. On peut être spécialiste sur des moteurs Porsche ou Ferrari, alors que nous, on fait toute marque. Donc là aussi, c’est compliqué.

Vous ne pouvez pas les former vous-mêmes?

La formation interne, c’est compliqué. On en a déjà une, mais il n’y a pas de formation externe, dans les Chambres des métiers, etc. Il y a bien quelques écoles qui existent pour former des gens sur les voitures anciennes ou un peu plus modernes, mais c’est très limité et souvent en France. Mais ici, la mécanique, elle est tout de suite orientée vers des diagnostics, des choses comme ça. Mettre les mains dans la graisse, enlever le moteur et prendre parfois deux heures pour enlever un boulon, ça, ils n’apprennent pas. On est presque les derniers spécialistes en voiture ancienne ici, on peut prendre le projet de A à Z, et ça, ce n’est pas courant.

Il faut avoir de bonnes capacités d’adaptation?

C’est une adaptation constante. Les voitures anciennes, ça mérite du temps et de la réflexion. Il faut oser dire, allez hop, on y va, parce qu’on ne peut pas refaire tout à neuf. Parfois, la voiture est tellement âgée qu’il y a des choses qu’on peut changer, mais niveau qualité, prix ou délai, c’est un peu compliqué. Il faut garder l’ancienne pièce pour en faire quelque chose, trouver un compromis. Et ensuite, il faut passer au contrôle technique. C’est très, très spécifique, notre branche.

Recueilli par I. S.