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Intelligence artificielle : une pétition pour protéger votre identité


Au Luxembourg, les victimes ne bénéficient pas d'un cadre juridique qui permette un mécanisme rapide de retrait des images (Photo d'illustration : Adobe Stock)

Une pétition visant à protéger les citoyens de l’utilisation de leur corps ou de leur voix par l’intelligence artificielle via la création d’un cadre juridique a été ouverte aux signatures le 27 novembre dernier.

L’intelligence artificielle a les capacités de créer des représentations très réalistes de personnes existantes, sans que ces dernières aient donné leur accord. Ce manque de cadre juridique et de protections du visage, du corps et de la voix des citoyens est au cœur d’une pétition mise en ligne par l’association Europe Technologie & Intelligence Collective Citoyenne (ETICC) par la voie de sa présidente et cofondatrice, Sana Hadžić-Babačić. Cette toute jeune association a pour objectif «de sensibiliser les citoyens quant à l’impact de la technologie sur leur vie quotidienne et sur leurs droits aussi fondamentaux face à la technologie», détaille Sana Hadžić-Babačić.

La pétition ouverte à signature le 27 novembre dernier alerte sur un vide juridique croissant face aux deepfakes, clonages de voix ou usurpations d’image générés par intelligence artificielle. Avec ces innovations technologiques, les citoyens peuvent, aujourd’hui, être exposés à divers risques tels que la diffusion d’images nuisibles, l’usurpation d’identité, l’atteinte à la vie privée ou encore l’escroquerie.

Des victimes démunies

Au Luxembourg, que prévoit le droit pour les victimes de ce genre de méfaits ? Selon l’association, le cadre juridique luxembourgeois reconnaît le droit d’une personne à refuser la diffusion non autorisée de son image, à la différence qu’il ne lui accorde pas un droit exclusif de propriété comme cela peut être le cas d’un auteur sur son œuvre. En conséquence, les citoyens sont globalement démunis dans un cadre juridique qui n’offre pas de mécanisme rapide de retrait ni de sanction pour les plateformes qui diffusent ces contenus.

«Ici, au Luxembourg, on peut toujours déposer une plainte au CNPD (NDLR : Commission nationale pour la protection des données). Il y a des choses qui peuvent être faites, il y a des choses qui existent à petite échelle, mais ça ne va pas plus loin», complète la présidente d’ETICC. «Le droit fait ce qu’il peut pour aller dans le sens de l’actualité et, bien sûr, défendre les droits des citoyens. En revanche, ça prend du temps. Il y a la vitesse technologique et la vitesse législative.»

Offrir une protection

Pour combler ce vide juridique, l’association propose de créer un copyright citoyen. Celui-ci est décrit dans la pétition comme un droit exclusif, personnel et inaliénable accordé à chaque citoyen sur son visage, sa voix et son identité visuelle. «On a notre propre copyright, c’est notre identité», résume Sana Hadžić-Babačić.

Dans le détail, il permettrait d’autoriser ou d’interdire l’utilisation de son image, de sa voix ou de son apparence par des outils d’IA générative, d’obtenir le retrait immédiat de tout contenu généré sans consentement, de percevoir une compensation en cas d’exploitation commerciale non autorisée, d’exiger des plateformes numériques qu’elles suppriment rapidement tout contenu contrefaisant sous peine de sanctions et de bénéficier d’une reconnaissance légale claire de son droit exclusif à sa propre image numérique. En résumé, il offre une protection aux citoyens dans un monde où leur identité peut être copiée et détournée sans limite.

Des inspirations danoises

Ces idées sont reprises de ce qui se fait au Danemark où un projet de loi, attendu pour l’an prochain, vise à interdire le partage de deepfakes afin de protéger l’apparence, la voix et d’autres caractéristiques personnelles des citoyens. S’il est adopté, chacun détiendrait une sorte de droit d’auteur sur sa propre image, un copyright citoyen, et pourrait exiger le retrait de contenus diffusés sans consentement.

Reste à savoir si les États sont capables de contraindre les plateformes qui diffusent ces contenus. «Je pense qu’on peut essayer de construire un dialogue, justement entre les citoyens et les institutions. Il faut creuser. Je ne prétends pas avoir la solution au problème, mais il faut rassembler les experts, il faut rassembler les chercheurs qui travaillent sur ce sujet, les citoyens. Il faut vraiment impliquer différentes parties prenantes ici», tente Sana Hadžić-Babačić.

Ce mardi 9 décembre, la pétition numéro 3872 lancée par la présidente de l’association rassemblait 85 signatures sur les 5 500 qui lui permettraient d’être débattue à la Chambre des députés.

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