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Inscription de l’IVG dans la Constitution : le CSV reste muet


Sous les traits d’une servante écarlate, cette militante a rappelé hier que le corps des femmes n’appartient qu’à elles. (Photo : Hervé Montaigu)

Alors que leur position sur l’inscription du droit à l’avortement dans la loi suprême était très attendue, lundi matin en commission, les députés du CSV ont gardé le silence.

C’est sous une pluie battante qu’une soixantaine de personnes se sont rassemblées lundi matin au Marché-aux-Herbes, alors que, dans les murs de la Chambre des députés, la commission parlementaire des institutions examinait la proposition de loi pour inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution.

Le CID Fraen An Gender, les Femmes socialistes, l’OGBL Equality et des anonymes ont répondu à l’appel lancé par le Planning familial, pour se mobiliser en faveur de cette demande de révision déposée par déi Lénk en mai 2024.

Brandies bien haut au-dessus des parapluies, les multiples pancartes affichaient la détermination des militantes – quasiment que des femmes:

  • «Interdire l’avortement ne va pas sauver des vies, mais tuer des femmes»
  • «60 ans qu’on attend l’IVG dans la Constitution»
  • «Un enfant est un choix, l’avortement est un droit»
  • «Mon corps, mon choix»
  • ou «Bénie soit l’IVG», manière de dénoncer l’incursion de l’Église dans le débat public et les propos du cardinal Hollerich ce week-end.

Les organisations de défense des droits des femmes ont tenu à rappeler, au pied du Parlement, que l’avortement ne relève pas d’un avis, d’une opinion ou d’une religion : c’est un droit.

Les Sages convaincus

À l’image de la France, qui a ancré ce droit fondamental des femmes dans sa Constitution en réaction au recul des États-Unis en 2022, la proposition numéro 8379 du député Marc Baum vise à sortir l’IVG de la loi ordinaire, modifiable à tout moment par une majorité parlementaire. Un argument qui a convaincu le Conseil d’État de valider ce texte le 1er juillet dernier.

Ce lundi en commission, l’heure était donc venue pour les différents partis de se positionner, et tous les regards étaient tournés vers le CSV. Mais les attentes ont vite été douchées : pas un mot n’est sorti de la bouche des députés chrétiens-sociaux, malgré les demandes répétées de l’opposition, quelque peu sidérée.

Zeimet mal à l’aise

Seul le président, Laurent Zeimet, a pris la parole… pour botter en touche : «Nous discuterons de cette proposition au sein de notre parti et avec les collègues de la majorité. Nous sommes ici pour analyser le texte et pas pour un vote. Le reste, c’est un travail parlementaire», a-t-il martelé, visiblement mal à l’aise.

Ce qui n’a pas manqué de susciter l’incompréhension dans les rangs de l’opposition. «J’ai été très étonnée. Je m’attendais à une position bien plus claire et coordonnée de la part des deux partis de la majorité, ce qui a fait défaut ce matin», a réagi Sam Tanson (les Verts) à la sortie de la réunion, soutenant sans réserve la proposition. «On a entamé ce travail depuis des mois, on doit savoir où on en est.»

Le DP plus transparent

Le DP s’est montré plus transparent, à travers ses représentantes Carole Hartmann et Simone Beissel, qui se sont dites «favorables à la proposition sur le principe», tout en soulevant deux points problématiques pour le camp libéral :

  • l’inclusion du droit à la contraception dans le texte,
  • et la différence entre «droit» et «liberté» à recourir à l’IVG.

Se basant sur l’exemple français, Paulette Lenert (LSAP) a indiqué que juridiquement, l’utilisation de l’un ou l’autre terme revenait au même.

La question décisive des consignes

Les autres socialistes ont aussi marqué leur accord. Taina Bofferding a insisté sur le caractère fondamental de ce droit pour les femmes, appelant à transformer en projet de loi sa motion pour la prolongation du délai légal de l’IVG et la création du délit d’entrave, adoptée le 8 juillet dernier, sans les cinq voix de l’ADR.

La proposition de loi sera prochainement soumise au vote des 60 députés en plénière. Pour être adoptée, il faudra alors qu’elle obtienne la majorité des deux tiers, soit au moins 40 voix «pour».

La question des consignes de vote au sein des partis de la majorité sera ici déterminante : «J’espère bien qu’il n’y en aura pas», a commenté Sam Tanson.