Taina Bofferding commande une étude au Liser pour analyser les conséquences de la crise actuelle à travers le prisme du genre.
En mars dernier, une étude du Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (Liser) révélait que la pandémie avait davantage bouleversé la vie des femmes que celle des hommes. Alors que le conflit en Ukraine a fait plonger le monde dans une nouvelle crise, le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes poursuit ses recherches et va analyser les conséquences de ce nouvel ébranlement à travers le prisme du genre. Ce lundi, au ministère, Taina Bofferding, accompagnée d’Aline Muller, la directrice générale du Liser, ont signé le lancement d’une nouvelle collaboration.
L’inflation et les genres
Cette prochaine étude qui s’inscrit dans le cadre du projet intitulé INGINCO (Inégalité de genre, inflation et consommation) va s’attarder sur les inégalités entraînées par l’augmentation des prix des matières premières et de l’énergie. Comme lors de la crise sanitaire, si l’inflation ne distingue pas les genres, son impact sera différent pour les femmes et pour les hommes. En ces périodes bouleversées, les déséquilibres sont souvent amplifiés et l’existence des femmes malmenée. En juin 2022, la Chambre des salariés notait, déjà, dans son Panorama social que, lors du premier semestre 2021, il avait été observé une hausse des inégalités aux dépens des femmes, des sans-emplois et des personnes à faible niveau d’éducation.
D’un point de vue technique, il est ici question d’analyser les réponses de 1 000 à 2 000 personnes, choisies parmi les résidents et les frontaliers, et recrutées notamment via les réseaux sociaux. Taina Bofferding souligne qu’il est primordial de s’attarder sur un certain nombre de questions telles que : «L’inflation a-t-elle un impact différent sur les genres ?», «Existe-t-il des différences entre les femmes et les hommes en ce qui concerne le comportement dépensier ou d’épargne, et les habitudes de consommation plus durables et plus écologiques? » ou encore «Qui est plus disposé à changer ses comportements de consommation afin de contribuer au changement écologique et sociale de notre société ?».
Aussi, cette étude s’intègre dans des efforts plus globaux visant à collecter des données fiables et ventilées par genre dans tous les domaines de la vie. Celles-ci permettront d’alimenter l’Observatoire de l’égalité afin de servir de base aux discussions et décisions sur les défis futurs en matière d’égalité.
Construire la société de demain
Le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes et le Liser tiennent à préciser que les résultats qui sortiront de cette étude ne seront pas uniquement les éléments relatant une situation donnée. Il s’agit aussi de «prévenir sur les conséquences des crises à venir sur les genres», souligne la ministre. «Il est important de réduire les inégalités de notre époque et surtout de construire la société de demain. Il est prouvé dans l’histoire que les femmes jouent un rôle moteur en temps de crise. Aujourd’hui, il faut se demander comment les femmes occupent ce rôle, pour faire évoluer notre société.»
À l’occasion de cette nouvelle étude, le Liser va également passer à la loupe le rôle clé des femmes dans la transition écologique et sociale vers un modèle de société plus égalitaire et soutenable. «Ce modèle auquel aspirent l’Union européenne et notre pays», complète Aline Muller.
Il faudra attendre 2023 pour que les résultats de cette nouvelle collaboration soient présentés au public dans le cadre d’un rapport final.
La pandémie,
vecteur d’inégalités
Les résultats du premier volet de la collaboration entre le Liser et le ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes ont été présentés en mars dernier. L’objectif de cette analyse statistique était notamment d’évaluer avec précision l’impact des changements radicaux causés par la crise sanitaire à travers le prisme du genre. Emploi, travail domestique, garde d’enfants, vie sociale : il en est ressorti que les femmes ont davantage subi les conséquences de ces années covid.
On peut citer comme exemple le temps consacré aux tâches ménagères. «Les femmes y ont passé 55 minutes de plus par jour, contre 25 minutes seulement pour les hommes», soulignait, lors de la présentation, Giorgia Menta, chercheuse au Liser. Elle y voyait une occasion manquée pour les hommes d’accroître leur contribution au travail non rémunéré.
En mars, Taina Bofferding s’était alarmée que la pandémie «risquait d’anéantir certaines avancées en matière d’égalité femmes-hommes». La ministre avait jugé qu’il était nécessaire «d’en tirer les bonnes conclusions et de responsabiliser les différents ministères afin de mettre en œuvre des politiques plus ciblées sur les sexes».