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Implants dangereux : un problème difficile à quantifier au Luxembourg


Les appareils tels que les pompes à insuline, pacemakers, prothèses mammaires, de hanche, d'épaule ou de genou, entre autres, étaient concernés par l'enquête (Photo : AP).

Après les révélations du Consortium international des journalistes d’investigation concernant la dangerosité des implants dans le corps, le gouvernement admet qu’il manque de données à ce sujet.

Après l’enquête du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) sur les dispositifs médicaux implantés dans le corps révélant leur caractère potentiellement dangereux, les députés de l’opposition Martine Hansen (CSV) et Jean-Marie Halsdorf (CSV) ont questionné le gouvernement et ont obtenu une réponse commune d’Étienne Schneider et du ministre de la Sécurité sociale, Romain Schneider.

Aux États-Unis, des chiffres édifiants

Alors que l’enquête pointait la dangerosité de l’implant de prothèses des hanches, de pompes à insuline, de stent ou autres dispositifs médicaux, les deux députés CSV ont voulu connaître la situation au Grand-Duché vu que ces dispositifs peuvent être responsables de séquelles importantes et même entraîner la mort du patient. «Rien qu’aux États-Unis, 1,7 million de personnes ont été blessées ou ont subi des dommages à la suite d’un implant et environ 83 000 décès seraient dus aux implants utilisés rien que ces dix dernières années», rappellent les deux députés chrétiens-sociaux ajoutant qu’en France, «ils auraient carrément doublés en l’espace de dix ans».
Un règlement de l’Union européenne datant de l’année dernière vise à encourager les médecins à déclarer de tels incidents aux autorités sanitaires nationales mais il n’est guère suivi d’effet même dans les pays, comme la France, où il existe une obligation de déclaration à charge des médecins, contrairement au Luxembourg.

« Des déclarations loin d’être exhaustives »

«La direction de la Santé est en principe informée des incidents qui se produisent au Luxembourg, cependant nous craignons que cette déclaration des incidents soit loin d’être exhaustive», admet le gouvernement dans sa réponse en indiquant que les autres pays font également face à une sous-déclaration des incidents. «La culture du signalement n’est pas encore bien implantée, bien que depuis le problème des prothèses PIP en France, les fabricants, les professionnels de la santé et les patients aient tous été fortement sensibilisés», déclarent les deux ministres dans leur réponse.
Les incidents dus aux implants sont déclarés aux fabricants par les hôpitaux. Au Luxembourg, comme dans les autres pays européens, ce sont ensuite les fabricants qui doivent notifier les incidents aux autorités compétentes nationales mais ni les patients ni les médecins n’ont d’obligation légale de déclarer un incident en rapport avec un dispositif médical.
«Nous sommes bien conscients de la sous-déclaration et sommes en train d’étudier la mise en place d’un portail électronique afin de faciliter le signalement des incidents», rassurent les ministres avant de livrer les chiffres de 2017 : la cellule des dispositifs médicaux de la direction de la Santé a évalué 56 rapports d’incidents dont un cas de décès, et 264 rapports de mesures correctives prises. «Ces chiffres sont à considérer avec prudence car il n’est pas toujours clair si le produit est réellement à l’origine du problème», ajoutent cependant Étienne Schneider et Romain Schneider.

Manque de données

En revanche, l’information donnée au patient fonctionne dans la mesure où toute implantation d’un dispositif est soumise à la signature d’un consentement éclairé comme l’exige la loi de juillet 2014 relative aux droits et obligations du patient. Il incombe cependant au professionnel de santé d’évaluer les risques et évènements indésirables spécifiquement liés à l’état de santé du patient.
Combien de personnes sont devenues invalides? Au-delà du coût humain, quel est le coût en termes sociaux (arrêt de maladie, frais d’hospitalisation et de maladie)? À ces questions, pas de réponse. «Il n’est pas encore possible de fournir les données relatives aux coûts concernant les arrêts de maladie, frais d’hospitalisation et de maladie liés expressément aux implants défectueux», admettent les ministres.
Mais cela devrait changer avec la mise en place de la nouvelle loi hospitalière qui permettra à l’avenir de documenter les frais liés à une maladie spécifique. «L’opérationnalité de la documentation hospitalière constitue d’ailleurs une des priorités de l’accord de coalition 2018-2023», rappellent les ministres. Au niveau européen, les dispositions du nouveau règlement européen en la matière ne s’appliquent qu’à partir de 2020.

 

Geneviève Montaigu

Création d’une agence luxembourgeoise

Le gouvernement a annoncé en mars 2018 la création d’une agence luxembourgeoise des médicaments et des produits de santé. «Dans le cadre de la future agence et afin de fournir des informations claires aux citoyens, nous réfléchissons déjà à la mise en place d’un site internet permettant la publication des alertes sur les mesures correctives portant sur les dispositifs médicaux», déclare le gouvernement.
En outre, le Luxembourg soutient pleinement la mise en place de la nouvelle base de données européenne EUDAMED «qui joue un rôle central et important dans le nouveau règlement européen relatif aux dispositifs médicaux» et dont le lancement est prévu pour mars 2020.