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Immobilier : le secteur du neuf en difficulté


Les acquéreurs sont de plus en plus réticents à investir dans les logements neufs. (Photo d’illustration : fabrizio pizzolante)

Pour les responsables de la Chambre immobilière et de l’ABBL, le manque d’engouement des acquéreurs pour les biens neufs pourrait entraîner une crise du secteur de la construction.

Des signes de reprise, mais la prudence reste de mise. Hier, les responsables de la Chambre immobilière du Grand-Duché et de l’Association des banques et banquiers du Luxembourg (ABBL) se sont réunis pour dresser un état des lieux du secteur immobilier. Et tous sont du même avis : le secteur de l’immobilier est en légère reprise depuis le début de l’année 2023. La stabilisation et la baisse des taux d’intérêt ainsi que du prix de l’immobilier ont, en effet, permis de relancer ce secteur. «Aujourd’hui, les acteurs reviennent sur le marché, car un certain nombre de biens qui leur étaient inaccessibles il y a quelques mois encore, le sont à nouveau (…). Pour les acheteurs, les conditions n’ont jamais été aussi favorables depuis une décennie. C’est vraiment le moment d’acheter!», indique Max Didier, président de la section développeurs de la Chambre immobilière.

Avec la flambée du prix des loyers, il est en effet de plus en plus intéressant de devenir propriétaire au Luxembourg. Mais, aujourd’hui, ces futurs propriétaires se tournent davantage sur les logements déjà construits que les habitations neuves. En reprenant les chiffres de l’Observatoire de l’habitat et du Statec, la Chambre immobilière note qu’au troisième trimestre de 2024, «les transactions portant sur les VEFA (ventes en l’état futur d’achèvement) sont en baisse de 80 % par rapport à leur moyenne historique sur les années 2017 à 2021».

Au deuxième semestre 2024, la Chambre immobilière constate néanmoins une augmentation des ventes de 48 % par rapport aux premiers six mois de l’année. Un secteur du neuf à la traîne qui n’est pas sans conséquence sur l’attractivité et le développement économique du Luxembourg. «Si la situation est favorable aux acheteurs, elle reste inquiétante pour le pays (…).

En effet, le quasi-arrêt du marché de l’immobilier neuf risque d’entraîner une crise du secteur de la construction dont dépendent des centaines d’entreprises et des milliers de ménages», fait remarquer Jerry Grbic, directeur de l’ABBL. Une situation préoccupante d’autant plus que les faillites se sont multipliées ces derniers mois dans le secteur de la construction et que les projets de logements neufs peinent parfois à se réaliser en raison du manque de préventes.

Pour rappel, un projet de logements neufs peut se lancer, si au moins 80 % des ventes ont été réalisées. «C’est un taux souvent très difficile à atteindre», regrette Jean-Paul Scheuren, porte-parole de la section développeurs de la Chambre immobilière.

Davantage de transparence

Mais alors pourquoi les futurs propriétaires ne veulent plus investir dans le neuf? Pour la Chambre immobilière du Luxembourg, l’une des principales raisons est le manque de confiance des acquéreurs. «Les clients potentiels ont été effrayés par les problèmes rencontrés par certains constructeurs (…). Même si ces problèmes sont isolés, ils ont été largement médiatisés.

Nous devons contribuer à rassurer le public en étant plus transparent», appuie Jean-Paul Scheuren. Pour redonner confiance, l’institution vient justement de lancer une charte de transparence. Concrètement, les promoteurs immobiliers signataires doivent s’engager à respecter plusieurs critères. Parmi eux, on peut citer les délais de construction, les prix, les malfaçons éventuelles, les garanties d’achèvement et de remboursement.

Aujourd’hui, une vingtaine de promoteurs et acteurs de l’immobilier ont signé cette charte. «Nous sommes persuadés qu’elle deviendra un véritable argument de vente et nous souhaitons encore la développer au fil du temps», espère Jean-Paul Scheuren. Mais ce dispositif sera-t-il suffisant pour donner envie aux acquéreurs d’investir dans le neuf? «C’est un outil, un point de départ. Mais c’est l’ensemble du système, comme les aides, les taux d’intérêt, les accords bancaires qui peuvent faire basculer la situation (…). Aujourd’hui, je pense qu’un acquéreur est dans les meilleures conditions possibles pour négocier un prix (…). Acheter un bien neuf reste, de plus, très avantageux pour réaliser des économies d’énergie», souligne le porte-parole de la Chambre immobilière.

Autre levier : les banques. Pour dynamiser le secteur du neuf, cinq d’entre elles (Spuerkeess, BIL, Raiffeisen, Banque de Luxembourg et la Société nationale de crédit et d’investissement) ont lancé, en juillet 2024, le dispositif «Prolog Luxembourg S.A.». Ce programme disposant d’une enveloppe de 250 millions d’euros vise à acquérir des biens immobiliers non vendus, mais déjà commercialisés.

Après quelques mois de mise en service, ce dispositif a été reconduit jusqu’au 30 juin 2025. Et grand changement cette année, le taux de prévente minimum requis a été ramené de 50 % à 30 %. Si le dispositif devrait permettre la mise sur le marché de 800 à 1 300 logements, seulement un dossier a été achevé. «D’où le fait que nous avons abaissé le taux de prévention minimum requis», conclut Jean-Paul Scheuren.