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Ils font corps derrière Todorovic


On voit clairement, sur ce cliché, Frank Bourgnon poser la question de confiance à Todorovic, brassard au bras. Involontaire, lui aurait dit le joueur. (photo: le Quotidien)

Les joueurs de la Jeunesse formés au club ont tous volé au secours de leur capitaine, lundi, au lendemain de son but égalisateur de la main, lors du derby contre le Fola. Ils sont tous convaincus que n’importe qui en aurait fait autant.

Milos Todorovic est déjà retourné à ses études en Allemagne. Cette semaine, il est en examens et pour lui ce n’est pas plus mal : les obligations scolaires l’éloignent du tumulte né de son égalisation controversée lors du derby eschois.

Et puisque les images de RTL ne sont pas en mesure d’apporter une réponse claire et tranchée à la question de la légalité de ce troisième but, on passera les neuf prochaines semaines, celles qui nous séparent du match retour, à entendre encore et encore les arguments des deux camps.

La réaction spontanée de tous les joueurs du Fola autour de l’action est presque sans ambiguïté : le ballon a, à un moment ou à un autre, été touché par une des mains de Todorovic. C’est le harcèlement de leur capitaine, qui a suivi, que les joueurs de la Jeunesse ne cautionnent pas.

«Tout le monde sait que c’est un bon garçon, et pas menteur», se désole Andrea Deidda, qui rapporte que «Todo» a dit à l’arbitre, M. Bourgnon, que s’il y avait main, elle n’est pas volontaire et surtout pas consciente.

Marvin Martins embraye : «Milos est sérieux et correct. Les gars du Fola le savent et ont voulu profiter de ça. Ils l’ont mis sous pression en croyant qu’il avouerait.» Forcément, des insultes ont fusé, jusque dans les couloirs de la Frontière, où il s’est fait demander, plus ou moins poliment pourquoi il ne s’est pas dénoncé.

Est-ce cela qui a touché Todorovic à ce point où la conscience d’un petit mensonge pas forcément reluisant et que lui-même a un peu de mal à cautionner même s’il a clairement servi son équipe?
En tout cas, «personne ne l’a jamais vu comme ça, comme il était dans le vestiaire», regrette Deidda. «Il était en larmes, complète Martins.

C’est quand même dommage de marquer un but comme ça, dans un derby, et d’être dans cet état…»

Les joueurs de la Vieille Dame se sont ainsi relayés au chevet du buteur malheureux. Les précédents Diego Maradona ou Thierry Henry ont été évoqués. Ce n’est pas ce qui lui a brièvement redonné le sourire.

«Ce qui l’a réconforté, suggère David Soares, c’est de voir qu’on soutenait ce qu’il avait fait.» Et pas qu’un peu, à suivre les réflexions de ses coéquipiers eux aussi formés au club et qui savent mieux que personne ce que représente ce genre de rencontres. Dont les réflexions tendent largement à accréditer la thèse que oui, il y avait bien main mais que oui, c’est de bonne guerre.

«On est content qu’il ait fait ça pour le club. Il a pris la bonne décision», lâche Deidda tout sourire.

«C’est un gars de la Jeunesse et il ferait n’importe quoi pour son club! C’est pour ça qu’il l’a fait, enfonce Martins. J’ai bien vu à sa réaction qu’il l’avait touchée de la main. Je le connais Milos, ça fait six ans qu’on joue ensemble. Mais ce n’était pas un mouvement « actif » du bras. Et croyez moi, chaque joueur sur le terrain aurait fait la même chose.»

David Soares ne dit pas autre chose. Et reprend même la logique à son compte : «C’est la fièvre du derby. Je crois que moi aussi je l’aurais fait.»

Peut-être, mais en attendant, c’est le capitaine de 22 ans qui va devoir vivre avec ça, ces prochaines semaines. Et ce ne sera pas forcément facile.

«C’est un peu chaud sur les réseaux sociaux», pointe Soares. «Oui, ça prend une de ces ampleurs, rebondit Martins. J’ai même vu des supporters qui utilisaient le mot tricherie!» Cette histoire risque ainsi de cristalliser les rancœurs sur un joueur exempt de tout reproche jusque-là et qui fêtait son centième match parmi l’élite (avec seulement 15 avertissements au compteur et aucune expulsion).

«Il va peut-être entendre des choses pas belles ces prochains matches, mais on sera là pour lui», promet Soares. «Et puis après tout, ce n’est pas Real – Barça qu’on a joué», s’esclaffe Deidda. Pas sûr que cet argument soit suffisant pour dédramatiser ce derby qui restera dans les annales.

Julien Mollereau