Pas moins de 23 fois, le quinquagénaire avait fait le plein de sa voiture sans payer. Mardi matin, il comparaissait devant le tribunal correctionnel.
De Mondorf à Luxembourg en passant par Schengen, Remerschen et Frisange ainsi que Bereldange et Windhof…, la liste des stations-services qui ont été victimes de grivèleries est longue. Après avoir fait le plein, Jean filait en douce. À chaque fois, il ponctionnait entre une vingtaine et une soixantaine d’euros de carburant. Son addition s’élève aujourd’hui à près de 1 200 euros.
Les premiers faits reprochés au quinquagénaire remontent à octobre 2014. Mais c’est près d’un an plus tard qu’il est une première fois interpellé dans une station-service. Les gérants d’une pompe à Frisange reconnaissent l’automobiliste qui, quelques jours plus tôt, a fait le plein chez eux sans passer par la caisse. Ils le prient de payer l’addition. On est fin septembre 2015. Cette interpellation ne semble toutefois nullement gêner le quinquagénaire dans son élan. À peine cinq jours plus tard, Jean commet déjà la prochaine infraction.
Il faut attendre le 14 mars 2016 – Jean en est désormais à sa 23e grivèlerie – pour qu’il soit de nouveau arrêté en flagrant délit. La police saisit alors sa voiture.
«Saisir sa voiture, le seul moyen de l’arrêter»
D’après la représentante du parquet, «c’était le seul moyen de l’arrêter» : «Comme il n’avait plus de voiture, il n’avait plus la possibilité de faire le plein sans payer.»
À la barre du tribunal correctionnel mardi matin, le prévenu, âgé de 59 ans, n’a pas contesté les faits. Le Luxembourgeois, qui touche aujourd’hui le RMG et dort dans un foyer, explique avoir eu des problèmes financiers à l’époque : «J’habitais en Allemagne depuis 2013. Je n’étais pas correctement payé par mes employeurs…»
«Qu’est-ce que les stations-services ont à voir avec vos problèmes financiers ? Vous pouviez laisser votre voiture et vous déplacer à pied !, le coupe le président. Vous avez fait 23 fois le plein sans payer.» «Cela ne va plus se reproduire. C’est déjà assez pénible», rassure le prévenu.
Lorsque le juge lui demande s’il a réglé ses dettes depuis qu’il a reçu sa citation au tribunal, il répond : «Je n’ai pas reçu de factures.» La question est reformulée : «Est-ce qu’entretemps vous avez payé les stations-services ?» –«Non. Je n’avais pas de voiture. Comment est-ce que je pouvais aller aux stations-services ?»
Son avocat à la défense a demandé au tribunal de ne pas prononcer d’amende. «Si vous en infligez une à mon client, il aura à nouveau un problème d’argent, a plaidé Me Roland Michel. Je propose de le condamner à des travaux d’intérêt général (TIG). Il s’engage à rembourser les 1 200 euros aux stations-services par tranches de 200 euros par mois.» Me Michel a, par ailleurs, donné à considérer que la vente de sa voiture saisie lui permettrait de payer sans problème les différentes stations-services.
Un an de prison requis
Face à la multiplicité des faits commis par le prévenu, la représentante du parquet a requis un an de prison, soit la peine maximale prévue par l’ancienne loi, ainsi que la confiscation de sa voiture. «En mars 2016, il s’est fait arrêter pour la deuxième fois et sa voiture avait été saisie. Mais il n’a pas eu l’idée de payer les stations-services», récapitule-t-elle. En effet, si le quinquagénaire avait payé toutes ses dettes, il ne se serait pas retrouvé au tribunal. À noter qu’entretemps la loi a changé. Aujourd’hui, la grivèlerie d’essence est considérée comme un vol, puni d’un emprisonnement d’un mois à cinq ans de prison et d’une amende de 251 euros à 5 000 euros.
Le parquet constate que le prévenu a déjà plusieurs inscriptions dans son casier. En Allemagne, le quinquagénaire a ainsi déjà été deux fois condamné pour abus de confiance. Et à Diekirch, il a déjà été condamné en 2015 pour des faits de grivèlerie.
Deux gérants de station-service se sont constitués parties civiles. Ils réclament un total de près de 210 euros de dommages et intérêts. L’un d’entre eux demande notamment le remboursement des frais de recherche vidéo.
Le tribunal rendra son jugement vendredi.
Fabienne Armborst