Trop de résidents luxembourgeois ont le réflexe d’aller aux urgences plutôt que chez le généraliste pour des besoins médicaux courants. Pour y remédier, le ministère de la Santé lance sa campagne «I love my Hausdokter».
Au Luxembourg, 30 % des résidents n’ont pas de médecin généraliste. «C’est un grand chiffre, cela représente tout de même un tiers de la population», estime le Dr Sébastien Diederich, secrétaire général de l’Association des médecins et médecins-dentistes (AMMD). Comment expliquer ce pourcentage ? Déjà, par un manque de connaissance du système médical. Mais pas que : «Lorsque les gens ont un problème de santé, cela les inquiète, alors ils veulent se faire soigner tout de suite… L’une des façons de soulager cette inquiétude, c’est d’aller directement aux urgences», ajoute le médecin.
Résultat, les patients vont aux urgences pour des problèmes de santé qu’un passage chez le généraliste aurait réglé… Ce qui augmente la surcharge. «Il y a beaucoup de passages aux urgences, environ 250 par jour, ce qui demande beaucoup de moyens humains et matériels difficiles à assumer.»
Alors, pour apprendre aux gens à changer leur «premier réflexe» médical, le ministère de la Santé et de la Sécurité sociale lance sa nouvelle campagne «I love my Hausdokter». «L’objectif est de sensibiliser le public à la médecine primaire et de promouvoir les bons réflexes», a annoncé jeudi Martine Deprez, ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, à l’occasion d’une conférence de presse.
Diriger les patients vers leur généraliste
L’initiative encourage donc les citoyens à consulter en priorité leur médecin généraliste pour les besoins de santé courants et ainsi à alléger la charge des services d’urgence. «Les généralistes peuvent faire beaucoup d’examens et de soins différents.» Prévention, dépistage, diagnostic, traitement, suivi des maladies, ainsi que l’éducation à la santé… Tout y passe.
«Nous pouvons inspecter les problèmes de santé de nos patients de manière plus générale pour les diriger ensuite vers les bons spécialistes ou vers les urgences», rappelle le Dr Sébastien Diederich. Et ce n’est pas tout, selon le médecin, le généraliste devrait connaître l’historique médical de son patient dans son intégralité. «Cela crée une relation de confiance et un suivi personnalisé sur le long terme. Mieux nous connaissons un patient, mieux il peut être soigné. Le généraliste est le meilleur pour savoir ce dont le patient a besoin.»
Alors, pour sensibiliser le public à ce rôle essentiel du généraliste dans le système de santé luxembourgeois, la campagne déploie des affiches et des dépliants résumant le rôle de la médecine primaire et les adresses utiles. Et elle est aussi l’occasion de rappeler l’existence des maisons médicales, qui assurent un service de permanence santé en dehors des horaires d’ouverture des cabinets médicaux. «La campagne est une bonne idée, elle est nécessaire et j’espère qu’elle va aider à diminuer le nombre de résidents sans médecin généraliste», appuie le Dr Sébastien Diederich.
Y a-t-il une pénurie de généralistes?
Alors que le mot de pénurie semble être sur toutes les bouches quand il s’agit du domaine médical, le Dr Sébastien Diederich prend quant à lui une position plus modérée sur la question. «Je n’aime pas le terme de pénurie», dit-il. Pourquoi? «Parce que ce constat est fait depuis des années au travers des chiffres… Mais ils ne reflètent pas la réalité du terrain.» Cette réalité, c’est le nombre d’heures de travail effectuées par les 634 généralistes (chiffre datant de 2022) et le nombre de patients reçus sur une journée.
Le terme de pénurie est d’autant plus fort qu’il est inquiétant pour les étudiants en médecine ou les jeunes diplômés. «Si on leur dit qu’il y a une pénurie de médecins, ils vont être découragés de suivre cette voie», ajoute-t-il. Alors selon le médecin, plutôt que de créer la panique, il vaudrait mieux utiliser les ressources humaines disponibles de la manière la plus efficace possible.