Le Premier ministre hongrois Viktor Orban, un des dirigeants les plus controversés au sein de l’Union européenne, part favori pour remporter ce dimanche un troisième scrutin législatif d’affilée.
Les sondages donnent une avance de 20 à 30 points à son parti national-conservateur Fidesz et la principale inconnue du scrutin porte sur l’ampleur de la victoire promise: il avait remporté il y a quatre ans une « super-majorité » au Parlement mais pourrait devoir se contenter d’une majorité relative.
Au pouvoir depuis 2010, M. Orban, 54 ans, ne s’y est pas trompé. Dans son dernier discours de campagne vendredi soir à Szekesfehervar (sud-ouest), il s’est efforcé de conserver intacte la mobilisation de ses partisans. « Il ne suffit pas d’arriver premier dans les sondages: il faut arriver premier le jour du vote », a-t-il souligné.
Admiré par les droites populistes européennes, honni par ceux qui l’accusent de dérive autoritaire, le Premier ministre, devenu le fer de lance de la lutte contre l’immigration en Europe, entend rendre « irréversibles », selon ses mots, les changements impulsés depuis son retour aux commandes.
Il a recueilli vendredi à Budapest le soutien du patron de la droite polonaise au pouvoir, Jaroslaw Kaczynski, qui a souligné que « la liberté, la souveraineté et la dignité des nations (…) sont liées à Viktor Orban ».
Le Français Joseph Daul, président au Parlement européen du Parti populaire européen (PPE), dont est membre le Fidesz, a également fait part de ses voeux de victoire pour M. Orban, estimant qu’il « continuera à apporter stabilité et prospérité aux citoyens hongrois ».
Mais l’opposition, qui dénonce le clientélisme et la déliquescence des services publics, espère capitaliser sur la lassitude d’une partie des électeurs envers les diatribes du dirigeant contre le milliardaire Georges Soros et la « menace » migratoire, obsessions de sa campagne.
« Mon rêve serait que le Fidesz disparaisse, mais en pratique ça a peu de chance d’arriver. En revanche, on peut espérer que le Fidesz soit nettement affaibli au Parlement », estime Laszlo Kovacs, un électeur de Budapest, la capitale restée un bastion de l’opposition.
En février, un candidat unique de l’opposition avait remporté à la surprise générale des municipales dans un fief réputé imprenable du Fidesz, à Hodmezovasarhely, créant un séisme jusqu’au sein de ce parti.
Bras de fer
Alors que de nombreuses allégations de corruption ont visé l’entourage de Viktor Orban, la formation d’extrême droite Jobbik, débordée par le discours de plus en plus nationaliste du gouvernement, se présente, elle, comme un parti aux « mains propres ».
Mais contrairement à ce qui s’est produit localement à Hodmezovasarhely, aucune union sacrée n’a été scellée pour les législatives entre cette formation et une gauche morcelée, ce qui permet selon les analystes au Fidesz de conserver toutes ses chances de victoire.
M. Orban a agité durant toute sa campagne le spectre d’un chaos migratoire et d’ennemis qui « veulent déposséder » les Hongrois « de (leur) pays ».
Admirateur revendiqué du président russe Vladimir Poutine et chantre d’une démocratie « illibérale », il a assumé depuis huit ans un style de gouvernement limitant certaines libertés au nom de l' »intérêt national », reprise en main de l’économie, des médias et de la justice à la clé.
Ces réformes ont porté atteinte à l’Etat de droit et entraîné un recul des valeurs démocratiques, critiquent l’opposition et de nombreux observatoires internationaux.
Le dirigeant a aussi multiplié les bras de fer avec l’Union européenne, notamment sur la question migratoire. Des procédures d’infraction ont par ailleurs été ouvertes contre Budapest en raison notamment de lois renforçant le contrôle sur les organisations de la société civile.
Mais le PPE, auquel appartient aussi la CDU d’Angela Merkel (et le président de la Commission Européenne, le luxembourgeois Jean-Claude Juncker), ne lui a jamais retiré son soutien. Et si la Hongrie est opposée à une intégration renforcée de l’UE, elle n’a jamais menacé de quitter l’Union.
Le pays est en effet l’un des principaux bénéficiaires des fonds européens qui ont contribué à son dynamisme économique retrouvé, après la crise de la fin des années 2000. Ce bilan économique a été l’un des principaux arguments du gouvernement dans la campagne.
Le Quotidien / AFP