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Homicide à Dudelange : la personnalité du prévenu passée au crible des experts


«Quand il va bien, c’est trop bien pour lui. Il se met lui-même des bâtons dans les roues», a déclaré un expert judiciaire. (Photo : archives lq)

Un témoin des faits a décrit la perte de contrôle de Sandro face à une victime «qui ne tenait pas en place». Un passage à l’acte qu’ont tenté d’expliquer les experts judiciaires.

«Sa propre agressivité lui est méconnue, au même titre que ses réactions émotionnelles», a analysé le docteur Daniel Zagury, hier après-midi, face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Le psychopathologiste qui a expertisé les plus grands criminels français est venu spécialement de Paris. Il a ajouté que le prévenu «ignore tout ce qui ne colle pas à l’image de sujet social qu’il veut se donner. Il n’a pas ignoré son ressentiment envers la victime, il l’a transformé en acte».

Comme son collègue luxembourgeois, il a également décelé une immaturité affective, de légers traits dyssociaux et un syndrome de l’imposteur. «Quand il va bien, c’est trop bien pour lui. Je l’appelle le « syndrome patatras ». Il se met lui-même des bâtons dans les roues.»

«J’ai essayé de le calmer»

Le 9 avril 2022, Sandro, 34 ans, a tranché la carotide gauche d’un homme rencontré dans un bar à Dudelange après que celui-ci a tenté de lui voler des bijoux. Le prévenu, accusé de meurtre et de coups et blessures volontaires sans l’intention de donner la mort, avait fait s’agenouiller et se déshabiller l’homme en lui mettant un couteau sous la gorge. La situation a dérapé. L’homme de 38 ans est décédé dans l’appartement de la rue Jean-Jaurès.

La victime s’est imposée à Sandro et à une connaissance. Elle les a suivis au domicile du prévenu. «Marco était nerveux. Il voulait absolument quelque chose à consommer. Il insistait. Sandro lui a dit qu’il n’y avait rien et qu’il n’était pas chez lui», se souvient le jeune homme de 31 ans, connaissance de Sandro. L’accusé se saisit une première fois d’un couteau. Le témoin parvient à le désarmer. «Sandro était énervé, j’ai essayé de le calmer. L’autre ne tenait pas en place», témoigne-t-il. «J’ai orienté la conversation sur des sujets personnels. On en a oublié Marco qui avait disparu aux WC.» Longtemps.

«Déshabille-toi ! Déshabille-toi !»

Sandro le retrouve dans sa chambre à coucher avec le blouson de sa copine sur le dos. «Sandro s’est emporté, il a empoigné un autre couteau. Il a obligé la victime à se déshabiller complètement.» Le témoin a fait preuve de beaucoup de diplomatie pour ramener le prévenu à la raison et pacifier la situation. La victime a coopéré, vidé ses poches et rendu ce qu’elle avait pris. «Sandro répétait : « Déshabille-toi! Déshabille-toi! » J’ai essayé de retenir son bras armé. Tout a été très vite.»

Le sang a coulé. «Il était clair qu’il n’y avait plus rien à faire. Sandro a réalisé que c’était allé plus loin qu’il ne l’avait voulu. Il a balancé le couteau et s’est agenouillé à côté de Marco pour tenter de le sauver.» Le témoin a prévenu les secours et les forces de l’ordre après avoir tendu une serviette éponge à Sandro pour juguler la blessure. Le jeune homme l’assure : «Marco n’est pas tombé sur le couteau.»

Psychothérapie

Les faits ont eu lieu sur fond de consommation d’alcool et de drogue. La victime avait un taux de 2,31 grammes d’alcool par litre de sang et le prévenu un taux de 1,32. «Sandro perdait le contrôle quand il avait bu. Il était incapable de se défendre verbalement», a constaté son oncle. Il décrit un jeune homme qui maîtrise mal ses émotions et ses addictions, malgré les thérapies.

«Il doit continuer de suivre une psychothérapie», conseille un psychologue qui l’a suivi. «Il est motivé pour faire un travail sur lui-même pour changer.» La présidente de la chambre criminelle a du mal à croire à ce déclic. «Il faut espérer que sa motivation dure dans le temps. Il était déjà motivé en 2018.» À l’époque, Sandro avait été condamné à du travail d’intérêt général pour avoir blessé deux personnes avec un tesson de bouteille de bière. «Il doit travailler sur les raisons de ses addictions. On n’en guérit pas, il faut des outils pour les maîtriser», a répondu le professionnel. Un de ses deux avocats, Me Schons, confirme «qu’il est demandeur d’une psychothérapie».