La juge n’a «jamais vu cela». Haytem a été «scalpé» par un coup de machette. La confusion règne autour des raisons de l’attaque. Le trafic de drogue pourrait être un mobile.
Une large cicatrice ceint le côté droit du crâne d’Haytem. Un souvenir de l’attaque à la machette dont il a été victime le 5 février 2022 au café Replay à Pétange. «Une partie de sa calotte crânienne a été séparée du reste de sa tête», a spécifié son avocate avant de réclamer 100 000 euros de dommages et intérêts. Les faits ont, supposent les enquêteurs de la police judiciaire, eu lieu sur fond de rivalités dans le milieu du trafic de stupéfiants. Le jeune homme a failli y laisser la vie. Cinq jeunes hommes comparaissent face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour tentative de meurtre. Ils ont fondu sur la table où était installée la victime avant de s’enfuir rapidement.
«Je ne les connaissais pas et jusqu’à ce jour, je ne sais pas pourquoi ils ont fait cela», a expliqué la victime d’origine tunisienne. «Pourquoi étiez-vous en contact avec Chamseddine la veille des faits si vous prétendez ne pas le connaitre?», le contredit la présidente. «J’ai un problème. Ils ont touché ma mémoire», répond le jeune homme. «Votre boîte crânienne n’était pas fracturée. La mémoire n’a pas été touchée», rétorque la juge. «Normalement au Luxembourg, ce genre d’attaques n’a pas lieu sans raison et je vous le dis tout de suite, nous ne croyons pas à vos histoires de femmes.»
Difficile de démêler le vrai du faux dans cette affaire ainsi que de savoir qui connaît qui et d’où. Prévenus, témoins et victimes ne sont pas à une contradiction près. «Nous venons tous du même quartier de Tunis», lance Ahmed. «Je ne le connais pas, je ne lui ai jamais parlé», indique, quant à lui, Sami, celui qui a asséné le coup de machette. Qui croire? La victime dit finalement les connaître de Facebook. «Je n’ai pas bougé de ma place au café parce que je n’ai de problème avec personne. Les autres clients sont partis en courant.»
Pas potes, pas ennemis
Le jeune homme de 33 ans prétend ne pas avoir de réponse et aimerait que la justice lui en donne une. Une guerre de territoire entre Mohamed et Hayem pourrait en être une. «Nous ne sommes pas des potes et nous ne sommes pas des ennemis.» Pourtant, selon un certain Salim, ami de la victime, Mohamed aurait commandité l’attaque. Sami l’a frappé avec la machette. La victime ne semble pas leur en tenir rigueur. Il aurait même joué aux cartes avec lui en prison. «Mohamed était dans le même couloir que moi.»
Son jeune frère, par contre, prend moins de gants. Appelé à témoigner, il traite Mohamed de «bon baron de la drogue qui tient tout Longwy, Rodange, Pétange, Athus, Aubange… jusqu’à Virton. Il me l’a dit lui-même et m’a montré de la drogue.» Le concerné demeure impassible sur le banc des prévenus. Le témoin n’a pas froid aux yeux et balance. «Ils m’ont menacé d’être le prochain.»
Mohamed prétend ne rien avoir fait, ni même avoir été présent au café. «Il a l’intelligence d’Einstein. Il sait manipuler. Il a quand même envoyé quatre types en tuer un autre», note le frère de la victime qui ne trouve, lui non plus, pas de raison plausible pour l’agression. «J’ai mis ma vie en danger pour comprendre.»
La confusion règne. Entretenue par les différents protagonistes. Ils oublient notamment les noms les uns des autres, ne connaissent que les surnoms ou les fausses identités, disent tout et rien à la fois, propagent des «ouï-dires». Et ce n’est pas Salim, amené sous escorte policière au tribunal, qui va aider à mettre de l’ordre dans l’histoire. Le jeune homme prétend ne connaître aucun des prévenus et ne pas avoir assisté à la scène.
«J’étais aux toilettes quand ça s’est passé. Quand je suis sorti, il y avait du sang partout», indique Salim. Pourtant, sur les images de vidéosurveillance, on le voit foncer aux toilettes seulement après l’attaque. Juste avant, il était au téléphone. «Nous nous sommes demandé si vous n’auriez pas informé Mohamed de la présence de la victime dans le café», lui explique la présidente qui lui reproche de ne pas être resté sur les lieux après l’agression. «Je n’avais pas de papiers. Si cela m’était arrivé, personne ne serait resté non plus.»