Alors que le projet de construction d’un centre de données à Bissen demeure au point mort, le Grand-Duché pourra au moins accueillir, dans les mois à venir, une antenne commerciale du géant du numérique.
Le ministre de l’Économie ne se fait plus trop d’illusions : «Plus le temps avance, plus la réalisation du projet devient improbable». Le 4 juillet, Franz Fayot a énuméré devant la Chambre des députés un ensemble de facteurs (pandémie, guerre en Ukraine, prix de l’énergie, croissance économique en berne…) qui plaident en défaveur de l’installation d’un centre de données de Google à Bissen, pourtant annoncée en grande pompe en 2017 par son prédécesseur Étienne Schneider. Une décision définitive tombera courant 2024, comme le rappelle le député chrétien-social Laurent Mosar. Une autorisation de construire doit, en effet, être accordée au plus tard en fin d’année prochaine, faute de quoi le terrain de 35 hectares prévu pour accueillir le centre retombera aux mains de l’État.
Un service de cloud déconnecté
Il y a quelques mois, le Premier ministre, Xavier Bettel, a été accueilli au siège mondial de Google, à Mountainview, en Californie. Le chef du gouvernement luxembourgeois a pu échanger avec le directeur général, Sundar Pichai, mais aussi avec Sergey Brin, qui a cofondé Google avec son ami Larry Page. Hier, le géant du numérique américain a fêté ses 25 ans (lire ci-dessous). Malgré son positionnement comme pays du «Big Data», le Grand-Duché peine toujours à convaincre Google d’ouvrir une filiale luxembourgeoise. Xavier Bettel s’est ainsi vu notifier à la mi-mars que le centre de données de Bissen ne constituait pas une «priorité», contrairement à d’autres sites, notamment situés en Wallonie (lire ci-contre).
Désormais, les efforts se concentrent sur une autre branche de développement de Google. Comme annoncé au printemps, le géant américain du numérique est censé ouvrir avant la fin de l’année 2023 une toute première antenne commerciale au Luxembourg. Les équipes qui seront déployées ne seront pas seulement chargées d’accompagner la mise en place d’un nouveau service de cloud déconnecté, elles seront aussi amenées à travailler dans d’autres domaines.
Si le nombre d’emplois et le volume d’investissement doivent encore être précisés, il est acquis que Google a choisi LuxConnect et Proximus Group pour lancer un tout premier cloud souverain. «Chacun d’entre nous a aujourd’hui accès à un cloud. Classiquement, les données sont enregistrées et stockées par un fournisseur, sans que l’on sache vraiment où se trouvent les serveurs», expliquait en mars Paul Konsbruck, le directeur général de LuxConnect. L’accord belgo-luxembourgeois signé avec Google est d’une autre dimension encore. «Les entreprises ont un tout autre besoin en services de cloud afin de permettre à leurs collaborateurs de travailler, peu importe le lieu, avec les données et logiciels stockés», explique Paul Konsbruck.
Jusqu’à présent, un obstacle au stockage en ligne de données sensibles et critiques résidait dans l’absence de certitudes quant à l’implantation des serveurs et le possible accès aux données par le fournisseur du cloud. Google a développé une nouvelle plateforme, baptisée «Google Distributed Cloud Host», qui permet la mise en place d’un service de cloud déconnecté. «Ce qui est complètement novateur, c’est que les clients ont l’assurance que leurs données seront stockées sur des serveurs installés au Luxembourg», développe le directeur général de LuxConnect. Des entités étatiques, des acteurs du secteur de la santé, mais aussi des entreprises industrielles sont considérés comme clients potentiels pour ce service de cloud sûr.
Bettel se félicite d’un premier accord
«Nous sommes heureux de nous associer pour apporter cette technologie de pointe au Luxembourg et d’investir dans des équipes de mise sur le marché basées au Grand-Duché et en Europe», soulignait à la mi-mars Thomas Kurian, le directeur général de Google Cloud, cité dans un communiqué du ministère d’État. Ces équipes de vente et de promotion «aideront nos clients et partenaires à adopter ces technologies et, en collaboration avec le gouvernement et les établissements d’enseignement, pour établir des centres d’excellence en intelligence artificielle, cybersécurité et autres technologies de pointe», ajoutait le dirigeant de Google.
«Je suis heureux que Google confirme son engagement au Luxembourg», se félicitait au même moment le Premier ministre, Xavier Bettel, sur son compte LinkedIn.
Trois nouveaux centres de
données seront construits en Wallonie
Google exploite aujourd’hui 23 centres de données dans le monde : 14 aux USA, 6 en Europe, 2 en Asie et 1 en Amérique du Sud. Parmi les data centers en Europe, il y en a un en Belgique, sur le site de Saint-Ghislain (Mons). En juillet de cette année, Google a déposé sa demande de permis pour la construction d’un second site en Wallonie, à Farciennes, près de Charleroi. Trois nouveaux centres de données doivent sortir de terre. Le géant américain dit avoir investi près de 2,3 milliards d’euros en Belgique entre 2007 et 2020.