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[Football] «Pour un déplacement comme ça, on va partir avec une tonne de matériel»


Les piles de caisses de la FLF prennent, en ce mois de juin, la direction de Vilnius, puis Thorshavn. (photo Mélanie Maps)

Seize énormes caisses suivront, encore une fois, pas à pas, les Roud Léiwen dans leur double déplacement en Lituanie et aux Féroé. Toute une organisation désormais huilée.

Les Roud Léiwen ne seraient pas grand-chose sans… leurs caisses. Depuis qu’ils ne tournent plus qu’en charter, Luc Holtz et ses gars sont suivis comme leurs ombres par le matériel qui leur est essentiel, partout en Europe. En temps normal, c’est une organisation déjà assez conséquente qui occupe le «kit manager» et ses deux acolytes, mais quand il faut aller à Vilnius en Lituanie, puis jusqu’aux Féroé, au milieu de l’Atlantique, pour une semaine de déplacements et 5 000 kilomètres en avion, l’affaire prend une tournure cruciale et homérique. Romain Seiler, l’un des hommes (avec Léon Huss et Jos Koecher) qui poussent depuis deux ans et demi les chariots débordant de matériel dans tous les aéroports du continent, nous a raconté.

COMMENT EST-IL ARRIVÉ À CE POSTE ?

Romain Seiler : «Je jouais chez les vétérans au FC Differdange 03 et un ami qui travaillait à Mondercange m’a dit qu’il avait peut-être une tâche pour moi. Celle de suivre les équipes de jeunes de la fédération, des U12 aux U19. J’ai dit oui. C’est environ deux jours par semaine et on va partout : Liège, Bruxelles, Fribourg… C’est comme ça que j’ai croisé un jour Luc Holtz à Mondercange. René Hoffmann venait malheureusement de nous quitter et il cherchait quelqu’un pour suivre la sélection. C’était du gagnant-gagnant. Parce que même si on le fait en tant que bénévole, quand on est à l’étranger, à trois, il y en a deux qui peuvent s’absenter brièvement pour visiter un peu la ville. Et comme je continue de suivre les jeunes, c’est assez sympa de les voir arriver chez les A : ils sont tellement contents de nous retrouver qu’ils nous donnent un coup de main. D’ailleurs, on m’avait demandé de partir avec les U17 en Israël pour la phase finale de l’Euro, mais là, ç’aurait été trop d’enchaîner les deux événements.»

COMBIEN DE KILOS EMBARQUENT LES ROUD LÉIWEN ?

«En mars, pour le déplacement en Bosnie, on avait pris 754 kilos en dehors des affaires que chaque joueur embarque pour lui, dans son sac. Les caisses, ce sont les équipements pour le match et les entraînements, le matériel médical. Mais là, pour une semaine, sachant qu’on va aux Féroé, où il risque de faire froid et de pleuvoir – ce qui nécessitera qu’on prenne des vêtements plus chauds –, on va atteindre facilement la tonne de matériel. Il faut deux jeux de maillots pour chaque match et des équipements pour quatre séances d’entraînement, parce qu’on ne pourra rien laver sur place.»

Ça prend une heure pour regonfler tous les ballons

COMBIEN Y A-T-IL DE CAISSES ?

«On en prend seize! Et chaque caisse ne pèse pas plus de 5 ou 6 kilos. Tout le poids, c’est vraiment le matériel qu’on embarque avec nous. Une partie de ces caisses n’est pas remplie par nous, les trois responsables du matériel. Il y a aussi deux femmes à la FLF, Joëlle Hinna et Fatima Da Silva, qui préparent tous les habits, de A à Z. Et là, pour ce déplacement, c’est compliqué parce que les U21 jouent également. Les U17 viennent eux de rentrer d’Israël et, en plus, il y a la nouvelle ligne d’équipements… Il va falloir tout trier en fonction des tailles de chaque joueur… Laurent Jans, par exemple : à une époque, il faisait du M. Maintenant, il fait du L. Un Vincent Thill, c’est un S… On n’a pas le droit à l’erreur! Une fois, on avait pris du L pour Yvandro Borges et c’était un peu grand. Et puis, on n’a pas le droit de se tromper non plus sur le matériel pour les séances, sinon, forcément (il sourit), on se fait un peu remonter les bretelles…

Dans les spécificités, il y a les caisses Claude Origer (NDLR : le préparateur physique) avec les poids, les barres… Et puis, il y a aussi les trois caisses que nous déposent les kinés et médecins un peu avant le départ. Les caisses avec les produits de nutrition notamment… Ce sont les plus lourdes. Mais elles sont bien organisées.»

C’EST QUOI, L’ORGANISATION ?

«La priorité absolue, ce sont les joueurs. C’est aussi pour eux qu’on part très en avance, une heure au moins, à l’aéroport. Pour enregistrer ces caisses avant qu’eux n’arrivent pour récupérer leurs places. C’est pour ça que le moindre petit retard est très irritant. Et quand on arrive à 12 h 50 et qu’on nous dit que l’enregistrement n’ouvre qu’à 13 h, c’est agaçant. Cela nous est déjà arrivé au Findel, où il n’y a parfois qu’une personne pour passer les seize caisses, ce qui est forcément compliqué. En Azerbaïdjan, en comparaison, ils étaient à six! Et puis, il y a des petits plaisirs… Par exemple, sur place, l’UEFA oblige la fédération qui accueille à mettre une vingtaine de ballons à la disposition de notre équipe. Mais nous, on en prend une vingtaine d’autres. Et à chaque fois, il faut les dégonfler avant de monter dans l’avion, sinon, en soute, avec la pression… En arrivant, il faut bien entendu les regonfler. Ça prend une bonne petite heure.»

En vrai, c’est dur physiquement. C’est énormément de stress

COMMENT LES CAISSES SONT-ELLES STOCKÉES ?

«La grande majorité de ces caisses restent la plupart du temps à Lipperscheid (NDLR : à l’hôtel Leweck, là où la sélection organise ses stages depuis plusieurs années maintenant). On les reconditionne en revenant de déplacement et elles sont prêtes à embarquer pour le prochain déplacement plusieurs mois à l’avance. À l’étranger, on les installe dans ce qu’on appelle la « staff room »! Cette chambre classique a été vidée par l’hôtel d’absolument tout. Plus de lits, plus rien. Et on met tout là! Le top, c’était en Irlande : ils sont venus nous prendre les caisses directement sur le tarmac de l’aéroport et on les a retrouvées peu de temps après déjà dans la « staff room » sans avoir rien eu à faire. Mais une fois qu’elles sont là, on ne chôme pas : on bosse 18 heures sur 24!  Parce que nos kinés travaillent jusqu’à tard dans la nuit, parfois jusqu’à 23 h ou 23 h 30. Nous, c’est la partie ravitaillement. Et s’il leur faut de l’huile, de l’eau, n’importe quoi, on doit pouvoir le leur apporter»

C’EST QUOI, LE RESTE DU BOULOT ?

«Notre boulot, c’est de se tenir au programme, à la minute près! Les joueurs et le staff ne doivent penser qu’au foot! Par exemple, c’est nous qui nous chargeons du réveil des joueurs le matin. Il faut passer dans les chambres ou téléphoner. Certains sont durs à réveiller. D’autres… on ne les réveille jamais parce qu’ils sont tellement pros, disciplinés qu’ils n’ont jamais besoin de nous : Chanot, Fox, Moris… En vrai, c’est dur physiquement. On doit aussi parfois aller acheter des médicaments ou accompagner les joueurs à des examens… C’est bien simple, on est là pour gérer tout ce qui n’est pas foot. C’est dur. Moi, j’ai une fille de neuf ans et je serai parti 10 jours durant lesquels, mentalement, il faudra n’oublier absolument rien et penser absolument à tout. C’est énormément de stress. Je sais qu’une fois rentré à la maison, cela va me prendre cinq à six jours pour revenir au calme.»