Cuba commémore samedi dans la sobriété le premier anniversaire de la mort de Fidel Castro, avec l’oeil déjà tourné vers une transition historique qui mettra fin, dans moins de 100 jours, à six décennies de pouvoir des frères Castro.
Aucune cérémonie de masse n’a été prévue pour rendre hommage à cette incontournable figure de la Guerre froide, décédée voici un an à l’âge de 90 ans.
A La Havane, les célébrations seront surtout marquées samedi soir par une veillée devant l’université. La présence de Raul Castro, comme un éventuel déplacement de ce dernier à Santiago de Cuba (sud-est) où reposent les cendres de son aîné, n’ont pas été confirmés par les autorités.
Depuis une semaine, une série d’évènements « politiques et culturels » ont lieu à travers le pays pour marquer l’anniversaire de la « mort physique » du père de la révolution cubaine. Cette terminologie officielle veut signifier que, bien que décédé, il est encore bien présent dans les esprits des générations de cubains qui n’ont connu que lui.
Partout dans le pays, si aucune statue ni rue ne porte son nom conformément à son souhait, sont réapparus ces derniers jours panneaux et inscriptions sur les murs relayant les slogans « Fidel vive » (« Fidel vit ») ou « Somos Fidel » (« Nous sommes Fidel »).
De leur côté, radios et télévision d’Etat relaient à l’envi le nouvel hymne à sa gloire « Lauriers et Olive », une « trova » poétique interprétée par le chanteur populaire cubain Raul Torres.
Samedi matin, la presse officielle a publié en première page de grands portraits de Fidel Castro en noir et blanc. Le quotidien du Parti communiste Granma reprenait aussi en Une une citation du « Commandant en chef »: « Dans l’oeuvre de la révolution, dans les succès de la révolution, vivent et vivront éternellement nos héros ».
Adulé par certains, honni par d’autres, Fidel Castro a gouverné sans partage l’île caribéenne et défié la superpuissance américaine pendant près de 50 ans, avant de céder le pouvoir à son frère Raul à partir de 2006.
L’année dernière, sa mort avait été suivie d’un deuil national de neuf jours et ses cendres avaient traversé le pays sous le regard de millions de Cubains massés au bord des routes.
« Presque tout ce que nous avons, nous le devons à lui, à ses idéaux », s’émeut Pablo Zamora, un étudiant en médecine de 24 ans.
Leisi Chi, autre étudiant de 22 ans, se souvient lui de « la douleur » ressentie à l’annonce de sa mort. « Ca nous a touchés, surtout la jeunesse et le peuple d’ici, même si certains s’en sont réjoui ».
« Il est vivant dans nos pensées, dans notre culture, dans notre bataille d’idées », affirme Gladys Garcia, directrice d’une école primaire de La Havane.
2018 en point de mire
Pour Michael Shifter, président du groupe de réflexion Dialogue interaméricain, à Washington, la relative discrétion des cérémonies prévues « n’est pas surprenante »
« Il existe toujours un grand respect pour Fidel et ses accomplissements (…) mais il a quitté la présidence il y a plus d’une décennie, donc la mémoire et les aspects d’un héritage positif s’estompent, alors que les Cubains sont confrontés à de dures réalités », avance l’expert.
Cette année, la situation économique de l’île est restée préoccupante, avec une croissance de seulement 1% prévue pour 2017, après une récession (-0,9%) l’an dernier, notamment sous l’effet de la baisse des livraisons pétrolières de son allié vénézuélien.
Dans ce contexte, les réformes économiques ont subi un coup d’arrêt. Et les ravages de l’ouragan Irma, qui a fait 10 morts en septembre dernier, ainsi que le récent durcissement de la politique américaine vis-à-vis de l’île n’engagent guère à l’optimisme.
Depuis plusieurs semaines, les autorités cubaines sont déjà tournées vers l’autre évènement de cette fin de semaine: la tenue du premier tour des élections municipales, un scrutin retardé d’un mois suite au passage d’Irma.
Ce vote donnera le coup d’envoi d’une série d’élections devant aboutir, fin février 2018, au remplacement de Raul Castro, 86 ans, à la tête du pays.
Président depuis 2008 après un intérim de deux ans, le cadet des Castro a annoncé qu’il cèderait sa place à un dirigeant de la nouvelle génération pour la première fois depuis 1959.
Pour l’heure c’est son premier vice-président et numéro deux du gouvernement, Miguel Diaz-Canel, 57 ans, qui semble tenir la corde pour lui succéder.
Raul Castro n’abandonnera toutefois pas totalement les manettes, puisqu’il restera à la tête du tout puissant Parti communiste cubain (PCC) jusqu’au prochain congrès prévu en 2021. Il aura alors 90 ans.
Le Quotidien/ AFP