Le pont Emile-Hammerel, qui enjambe la gare de Bettembourg depuis près de 50 ans, sera fermé pour neuf mois à partir du 15 mars, avec de lourdes conséquences sur le trafic routier comme ferroviaire.
Ses jours sont désormais comptés : trop abîmé, le pont Emile-Hammerel, qui relie les parties est et ouest de Bettembourg en surplombant les voies ferrées, sera bientôt démoli pour laisser place à un tout nouvel ouvrage, plus moderne. Un projet complexe, dont l’étude a démarré en 2016, et qui va s’étaler jusqu’en mai 2025, avec une coupure totale de la N13 à cet endroit dès demain matin.
À la commune, le stress paraît maîtrisé : «On est bien préparés, donc on aborde cette période sereinement… Mais c’est sûr que, pendant un an, ces travaux vont compliquer la vie au quotidien. Il va falloir se lever plus tôt et aussi se réorganiser», reconnaît le député-bourgmestre Laurent Zeimet, rappelant que ce chantier est inévitable.
Ce que semblent avoir accepté la plupart des habitants, dont 800 étaient réunis fin janvier pour une séance d’information. «Ils ont soulevé certains points problématiques et nous avons pu apporter les modifications nécessaires», souligne l’élu chrétien-social. Car il a fallu être inventif pour trouver des astuces afin de limiter au maximum l’impact de ce chantier pharaonique.
15 MARS – 31 DÉCEMBRE 2024
Fermeture totale du pont Hammerel à la circulation dès le vendredi 15 mars à 6 h. Déviations en place pour les voitures et poids lourds, parking de remplacement dans la ZAE Wolser avec navettes vers la gare. Tunnels ouverts aux piétons à la gare, rue Auguste-Collart et via le pont de la rue Lentz.
13 JUILLET – 12 AOÛT 2024
Fermeture totale de la gare, démolition du vieux pont et ripage du nouveau. Aucun train ne circulera à Bettembourg et des bus de substitution seront mis en place. Les quais provisoires seront transférés rue de Peppange, rue Auguste-Collart et rue de la Gare.
JANVIER 2025
Ouverture à la circulation du nouveau pont Emile-Hammerel, avec maintien du trafic pendant la dernière phase des travaux du nouvel ouvrage jusqu’au printemps.
MAI 2025
Fin des travaux et livraison du nouveau pont Emile-Hammerel.
Toutes les informations sur la nouvelle organisation de la circulation dans Bettembourg durant cette période et les mesures pour les transports en commun sont à consulter sur le site de la commune bettembourg.lu et sur mobiliteit.lu.
Ainsi, pour les prochaines élections européennes, une partie du bureau électoral sera délocalisée, pour que les électeurs puissent aller voter dans les deux parties de la ville. Les structures d’accueil pour enfants seront dédoublées cet été pour éviter les déplacements superflus.
Et pour les pompiers, un local sera mis à leur disposition avec un véhicule d’intervention prêt à partir à tout moment côté est – alors que la caserne est à l’ouest – pour garantir les prises en charge en urgence sur l’ensemble du territoire. Les transports scolaires vers les lycées de la région ont dû être planifiés différemment pour desservir les deux parties de la ville temporairement scindée en deux, et globalement, les élèves pourront rejoindre leur établissement sans trop de perturbations.
Des commerçants dans le flou
Du côté des commerçants de la rue de la Gare, c’est encore un grand point d’interrogation, alors que personne ne peut prédire comment vont évoluer les affaires ces prochains mois. À l’institut Chill Nail Studio, la gérante a pu échanger avec ses clientes, résignées : «Elles m’ont dit qu’elles allaient continuer à venir, qu’elles anticiperont pour arriver à l’heure», rapporte Pauline Clara, qui n’écarte pas pour autant le risque de manque à gagner. «Pour l’instant, on est encore un peu dans le flou, sans savoir où on va. Ce sera la surprise», commente-t-elle.
À la pâtisserie Hoffmann en revanche, une bonne nouvelle a vite chassé les quelques craintes : «On aura un arrêt de bus provisoire juste devant notre boutique, donc on mise sur cette opportunité pour attirer de nouveaux clients», explique la vendeuse, Laura. «Pour le reste, on n’est pas vraiment inquiets, car le gros de notre clientèle vient à pied, pas en voiture.»
Des déviations pour contourner la ville
Deux ronds-points dans la commune permettront aux bus des transports publics de circuler de part et d’autre du pont en travaux. Tandis que le trafic de transit sera dévié pour contourner Bettembourg suivant deux itinéraires distincts fixés par l’administration des Ponts et Chaussées.
L’un pour les poids lourds, qui seront redirigés vers Dudelange via le CR 161 et le «pont vert» pour ensuite rejoindre la zone de la Celula sur la N31. L’autre pour les voitures et utilitaires, qui rouleront vers Peppange via le CR 132, puis Livange via le CR 159, pour enfin arriver à Luxembourg.
Soit un grand détour, en passant au cœur de petits villages aux rues parfois pavées et étroites, dont les riverains auront, eux aussi, à subir les conséquences de la fermeture du pont Hammerel. «Personne n’attend ce vendredi avec une grande joie», glisse Laurent Zeimet. «Mais c’est le projet d’une génération, puisque le nouveau pont sera opérationnel pour les 100 prochaines années. Nous avons la chance d’en être témoin», fait-il valoir.
La première maquette d’un pont au-dessus du chemin de fer date de 1969. Il faudra attendre 1975 pour que le bourgmestre de l’époque, Louis Ganser, pose officiellement la première pierre de l’ouvrage, qui ouvrira à la circulation l’année suivante. Et c’est en 1994 qu’il sera baptisé Emile-Hammerel, en hommage à celui qui fut bourgmestre de la commune de 1976 à 1979.
Aujourd’hui, l’imposante structure, supportant le passage hebdomadaire de plus de 90 000 véhicules, montre de sérieux signes de faiblesse : le béton de ses rampes est dégradé et ses armatures rongées par la corrosion. Les travées ne sont plus étanches, fragilisant l’ensemble et nécessitant même la protection des caténaires CFL situées juste en dessous.
La piste d’une rénovation, jugée trop coûteuse, a rapidement été écartée par l’administration des Ponts et Chaussées qui pilote le projet, au profit de la démolition totale du pont pour en reconstruire un neuf. C’est un modèle bow-string qui a été retenu pour en finir avec les énormes piliers à proximité des voies ferrées et au milieu des quais de gare.
Son tablier, d’une longueur de 80 mètres, sera soutenu par un arc pointant à 22 mètres de haut et une série de 44 haubans métalliques. De quoi soutenir les 1 300 tonnes de charpente du mastodonte. Avec un entretien régulier, le nouvel ouvrage devrait durer un siècle.