Le Royaume-Uni va maintenir sa taxe sur le numérique a déclaré mercredi à Davos le ministre britannique des Finances Sajid Javid, malgré les menaces américaines de représailles.
« Nous prévoyons de mettre en oeuvre notre taxe sur les services numériques en avril », a-t-il déclaré lors d’un panel au Forum économique mondial (WEF) dans la station suisse. « C’est une taxe proportionnée et qui est délibérément conçue comme une temporaire. Elle disparaîtra une fois qu’il y aura une solution internationale », a assuré le ministre qui s’exprimait aux côtés du secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin. M. Javid a estimé que « cette année pourrait être l’année du changement », espérant un accord entre plusieurs pays sur le sujet via l’OCDE. Dans un entretien à la BBC, le secrétaire général de l’OCDE Angel Gurria a mis en garde contre le risque de « cacophonie » si chaque pays procède avec sa propre taxe. Il demande au gouvernement britannique « d’attendre et de contribuer à une solution multilatérale ».
M. Mnuchin s’est fait lui à nouveau menaçant et a réitéré à Davos mercredi matin ses menaces de représailles via l’introduction de droits de douane punitifs sur le secteur automobile en cas de taxation « arbitraire » en Europe des entreprises numériques. « Nous pensons qu’une taxe numérique est discriminatoire par nature (…) Si l’on veut imposer arbitrairement des taxes sur nos entreprises numériques, alors nous envisagerons d’imposer des taxes arbitrairement sur les constructeurs automobiles », a dit-il à Davos. Dans un entretien au Wall Street Journal publié en début de semaine, Steven Mnuchin avait estimé que la taxe prévue par la France était injuste et avait dit espérer que le Royaume-Uni et l’Italie suspendent leurs projets. Le ministre français des Finances et de l’Economie Bruno Le Maire a lui dit que « en tout état de cause, les entreprises numériques paieront une taxe en 2020 en France. Soit nous avons une solution internationale (…) et dans ce cas (…) la taxe internationale remplacera la taxe nationale (…). Soit il n’y a pas d’accord, et dans ce cas-là, c’est la taxe nationale qui s’appliquera, elle a été perçue en 2019, elle sera perçue en 2020. »
Que pour les chiffres d’affaires supérieurs à 560 millions d’euros
La France avait au départ indiqué envisager de « suspendre » cette année le prélèvement de cette taxe afin d’éviter les sanctions américaines, mais aussi pour se donner plus de temps pour trouver un accord mondial au sein de l’OCDE. En dehors de la France, du Royaume-Uni et de l’Italie, l’Autriche a de son côté lancé un impôt le 1er janvier de 5% sur le chiffre d’affaires publicitaire des entreprises numériques mais semble avoir été épargnée jusqu’à présent par les menaces américaines. La décision de Londres de maintenir sa taxe pourrait compliquer son projet de négocier avec les Etats-Unis un vaste accord de libre-échange une fois le Brexit réalisé fin janvier. M. Javid a d’ailleurs indiqué que les discussions avec Washington avaient commencé. Le projet de taxe britannique sur le numérique avait été dévoilé fin 2018 par le gouvernement conservateur de l’époque et devrait s’élever à 2% sur certains services numériques bien identifiés comme les moteurs de recherche, les réseaux sociaux et les ventes en ligne. Elle ne s’appliquera qu’aux entreprises générant plus de 500 millions de livres de chiffre d’affaires annuel (560 millions d’euros) et pourrait rapporter autour de 400 millions de livres par an d’ici à 2022.
AFP