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Explosion des prix de l’énergie : ce que font les gouvernements


Cette retraitée londonienne scrute son compteur électrique, alors que la facture mensuelle de son logement social est passée de 25 à 70 livres (environ 81 euros). (Photo : afp)

Malgré l’affolement des cours de l’énergie fin août, le Premier ministre, Xavier Bettel, veut attendre la tripartite fixée au 18 septembre pour discuter de nouvelles aides, tandis que d’autres États agissent déjà.

Alors que la situation sur le front de l’énergie a franchi un nouveau seuil critique fin août, avec un prix du gaz naturel frôlant son record historique à 345 euros le MWh, et un prix de gros de l’électricité en Allemagne et en France atteignant 850 et plus de 1 000 euros le MWh pour 2023, au Luxembourg, le Premier ministre l’a répété : il tient à attendre la prochaine réunion tripartite, fixée au 18 septembre, pour plancher, avec les partenaires sociaux et le patronat, sur un nouveau paquet d’aides.

Une position qui tranche par rapport à d’autres pays, dont l’Allemagne, qui a décidé de frapper fort, en annonçant dès le week-end dernier le déblocage de 65 milliards d’euros pour contrer l’inflation et préserver le pouvoir d’achat. Une vague d’aides massive qui intervient alors que la hausse des prix chez nos voisins pourrait passer la barre des 10 % avant la fin de l’année – ce qui serait une première depuis les années 1950.

Et ailleurs? Comment les gouvernements font-ils face à l’explosion des prix liée à la guerre en Ukraine, alors que les boucliers tarifaires mis en place ces derniers mois s’avèrent de plus en plus difficiles à tenir? Tour d’horizon.

Au Royaume-Uni, les factures d’électricité impayées s’amoncèlent : elles ont triplé en un an avec une dette s’élevant désormais à 1,3 milliard de livres, et devraient encore se multiplier, le régulateur Ofgem ayant annoncé une hausse des tarifs règlementés de 80 % à partir du mois d’octobre. Une augmentation qui se poursuivra sans doute en 2023, anticipe l’organisme, alors que l’inflation est déjà à plus de 10 % outre-Manche, la plus forte parmi les pays du G7.

Patronat, fournisseurs et associations appellent à une action gouvernementale immédiate pour éviter un choc «dramatique» pour les ménages modestes, tandis que l’économie britannique se trouve au bord de la récession et que 58 % des ménages sont maintenant menacés de pauvreté énergétique, d’après une étude universitaire.

Pour calmer les esprits, le ministre de l’Économie a indiqué que 400 livres de rabais seront accordés, pour tous, sur les factures d’énergie, 650 livres pour les ménages vulnérables et 300 livres pour les retraités. D’autres aides immédiates devraient aussi suivre, promises par la nouvelle cheffe du gouvernement, Liz Truss : la presse britannique croit ainsi savoir qu’elle annoncera d’ici peu un gel des factures.

Vingt-quatre réacteurs nucléaires français à l’arrêt

En France, la production électrique a atteint un niveau historiquement bas, alors que le parc des centrales nucléaires affronte des problèmes de corrosion : seuls 24 des 56 réacteurs d’EDF fonctionnent en ce moment, faisant mécaniquement bondir les cours.

Le président Emmanuel Macron a récemment appelé à l’«unité» devant la fin de «l’abondance» avec, pour mot d’ordre, la «sobriété énergétique», tandis que ces dernières semaines, des dizaines de milliers de clients migrent de fournisseurs privés d’électricité vers l’énergéticien public et son tarif fixe.

Ce qui n’empêchera pas la facture de gonfler : le bouclier financé par l’État depuis l’automne dernier va bientôt être remplacé par des aides ciblées uniquement sur les plus pauvres.

En Italie, l’instabilité politique complique la donne : lâché par trois partis de son gouvernement d’unité nationale, Mario Draghi a, en effet, jeté l’éponge en juillet dernier, en plein séisme économique, alors que son mandat courait jusqu’au printemps 2023.

En attendant les législatives anticipées du 25 septembre, le gouvernement italien a adopté début août un nouveau paquet de mesures prévoyant une rallonge de 17 milliards d’euros pour les ménages et les entreprises, s’ajoutant aux 35 milliards déjà déboursés, alors que l’inflation s’accélère : 8,4 % en août, un record depuis 1985.

Sur un an, les prix de l’électricité et du gaz ont grimpé de 45 % dans la péninsule, ceux des produits alimentaires transformés de 10,5 % et ceux des biens durables de 3,9 %.

L’Espagne, confrontée à une inflation supérieure à 10 %, inédite depuis le milieu des années 1980, a décidé quant à elle de baisser la TVA sur le gaz de 21 % à 5 % à partir d’octobre et jusqu’à la fin de l’année, a annoncé le Premier ministre, Pedro Sánchez, qui s’est dit prêt à prolonger la mesure «le temps que durera la situation tant difficile que nous traversons».

La TVA sur le gaz s’aligne ainsi sur celle de l’électricité, plafonnée à 5 % depuis fin juin. Se félicitant d’un certain ralentissement enregistré en août, la ministre de l’Économie a toutefois appelé à la «prudence», vu l’incertitude liée à la guerre en Ukraine.

L’Espagne n’est pas la seule à avoir opté pour cette baisse temporaire de la TVA sur le gaz : l’Allemagne a fait passer son taux de 19 % à 7 %, et l’Italie l’a aussi plafonnée à 5 %. La Belgique a fait de même, passant de 21 % à 6 % pour le gaz et l’électricité.

Le gouvernement espagnol a multiplié ces derniers mois les plan d’aides, avec notamment des subventions sur les carburants et les transports, et des baisses d’impôts sur l’électricité, au risque de faire gravement déraper les finances publiques.

Jusqu’à 8 000 euros à payer en Belgique?

Sans tarif de l’énergie règlementé, la Belgique est durement frappée, avec un prix du gaz multiplié par 15 en deux ans, et par 10 pour l’électricité, faisant craindre des factures annuelles jusqu’à 8 000 euros pour les ménages, selon des estimations basées sur les prix actuels.

Il faut dire qu’en plus des difficultés d’approvisionnement dues à la guerre en Ukraine, la sécheresse a considérablement réduit la production de gaz en Norvège, un de ses principaux fournisseurs.

Face à ces hausses hors de contrôle, un comité de concertation spécial énergie s’est tenu mercredi dernier sous la houlette du Premier ministre, Alexander De Croo : alors que plusieurs plans d’aide du gouvernement fédéral ont déjà été lancés, il a fait appel aux régions et aux communes les priant d’actionner tous les leviers possibles, en attendant que l’Union européenne «prenne rapidement des mesures».

Les mesures en place seront étendues jusqu’à fin mars prochain, tandis que du côté du nucléaire, le gouvernement s’attaque aux surprofits générés par les quatre centrales les plus récentes via l’impôt des sociétés et via un prélèvement supplémentaire qui s’élèvera entre 750 à 838 millions d’euros cette année, montant à redistribuer aux consommateurs.

Réunion d’urgence des 27 vendredi

Les ministres de l’Énergie de l’UE se retrouveront vendredi pour discuter de la situation lors d’une réunion extraordinaire : la Commission européenne propose de plafonner une partie des prix de gros de l’électricité, d’adopter des tarifs réglementés pour les plus fragiles et de renforcer les mesures incitatives pour réduire la consommation, tandis qu’une «réforme structurelle» pour dissocier les prix de l’électricité des cours du gaz est sur les rails.

Le bas niveau de production des centrales nucléaires françaises fait bondir les prix. Photo : afp

2 plusieurs commentaires

  1. Ah….si on avait construit la centrale nucléaire à Remerschen à l’époque au lieu à Cattenom….
    On pourrait vendre l’électricité au lieu de l’acheter

  2. La hausse énorme des prix de l’électicité provient d’une toute aussi énorme ânerie (une de plus) de l’UE qui a décidé de plaquer le prix de l’électricité sur celui du gaz, une décision catastrophique sur laquelle seuls des imbéciles ne veulent pas revenir quand on constate les conséquences.
    Quand à la hausse monstrueuse des prix du gaz , elle provient de cette autre énorme sottise que sont les sanctions anti-russes qui n’affectent que fort peu les russes et au contraire, vont mettre l’Europe à genou si on ne fait pas rapidement marche arrière.
    L’Allemagne va entrer en récession si ce n’est pas déjà le cas et le reste de l’Europe va suivre.
    Si on ajoute les folies de cette même UE sur l’agriculture (cf. les révoltes des paysans bataves), ce sera le dernier clou sur le cercueil de cette Europe qui, jadis, illuminait le monde.