Des violences entre des partisans de l’extrême droite américaine et des contre-manifestants ont fait un mort et une vingtaine de blessés samedi à Charlottesville (en Virginie), la réaction du président Donald Trump qui a renvoyé les deux camps dos à dos suscitant une controverse.
Une femme de 32 ans a été tuée lorsqu’une voiture a foncé, volontairement selon des témoins, dans une foule de contre-manifestants venus s’opposer à un rassemblement unitaire de la droite radicale américaine : néo-nazis, suprémacistes blancs, Ku Klux Klan (KKK) jusqu’à la droite alternative ou Alt Right, dont une partie au moins avait soutenu Donald Trump à l’élection présidentielle.
Par ailleurs, deux policiers sont morts dans l’accident de leur hélicoptère qui s’est crashé aux abords de la ville, sans qu’un lien ne soit établi entre cet accident et les violences.
Des affrontements entre manifestants des deux camps s’étaient multipliés avant le rassemblement de Charlottesville, finalement annulé par les autorités de cette petite ville historique de l’est des États-Unis.
Le président américain Donald Trump a condamné les violences de Charlottesville, sans se prononcer sur la responsabilité de l’un ou l’autre des camps en présence. « Nous condamnons dans les termes les plus forts possibles cette énorme démonstration de haine, de sectarisme et de violence venant de diverses parties », a-t-il déclaré depuis son golf de Bedminster (New Jersey), où il passe ses vacances.
En semblant renvoyer dos à dos les deux camps, le président américain a provoqué l’indignation chez les Démocrates mais aussi un malaise chez les Républicains, son propre parti. « La haine et la division doivent cesser, et elles doivent cesser immédiatement », a lancé le président. Interpellé par des journalistes, il a refusé de condamner spécifiquement les mouvements d’extrême droite.
Son ancienne rivale aux élections, la démocrate Hillary Clinton, l’a critiqué sans le nommer. « Chaque minute où nous permettons à cela de se poursuivre par un encouragement tacite ou par inaction est une honte et un danger pour nos valeurs », a-t-elle tweeté.
Le sénateur républicain de Floride, Marco Rubio, est lui aussi intervenu sur Twitter. « Très important pour la nation d’entendre le président décrire les événements de Charlottesville pour ce qu’ils sont, une attaque terroriste menée par des suprémacistes blancs ».
L’ex-président Barack Obama est sorti de sa réserve en citant Nelson Mandela: « Personne ne naît en haïssant une autre personne à cause de la couleur de sa peau, ou de ses origines, ou de sa religion ».
Dans la soirée, le ministre de la Justice Jeff Sessions a dénoncé « l’intolérance raciale et la haine ». Les violences de Charlottesville « trahissent nos valeurs fondamentales et ne peuvent être tolérées », a-t-il dit.
« Une fille au sol mutilée »
Le FBI, la police fédérale, a annoncé l’ouverture d’une enquête sur les circonstances dans lesquelles la voiture a foncé sur la foule, tuant la jeune femme et blessant 19 autres personnes.
Le conducteur du véhicule a été placé en garde à vue et la police traite les faits comme un « homicide criminel », a déclaré le chef de la police de Charlottesville, Al Thomas. Selon la chaîne de télévision CNN, le suspect, James Alex Fields Jr, 20 ans, originaire de l’Ohio, a été inculpé de meurtre, de blessures et de délit de fuite.
« On marchait dans la rue quand une voiture, une berline noire ou grise, nous a foncé dessus, elle a percuté tout le monde. Puis elle a reculé et nous a encore heurtés », a raconté un témoin.
« Une fille au sol a été mutilée. C’était volontaire, ils ont fait exprès de faire marche arrière », a assuré un autre homme qui avait assisté à la scène.
Trois autres personnes ont été arrêtées et inculpées.
« Vous n’êtes pas les bienvenus »
L’annonce de ce rassemblement de mouvements d’extrême droite, qui voulaient dénoncer le projet de démontage de la statue d’un général sudiste et favorable à l’esclavage de la guerre de Sécession, suscitait les plus grandes inquiétudes.
Il se présentait comme l’un des plus importants de cette mouvance politique depuis au moins une décennie avec des centaines de participants, selon les organisations antiracistes.
Dès le début de la journée, de nombreux manifestants arboraient des armes semi-automatiques, comme le permet la loi en Virginie. Et devant de premières échauffourées très violentes, les autorités locales décrétaient l’état d’urgence et l’interdiction du rassemblement.
De nombreux partisans de l’extrême droite brandissaient des drapeaux confédérés, que beaucoup d’Américains considèrent comme un symbole de racisme, et certains faisaient le salut nazi.
Les militants anti-racistes agitaient des drapeaux du mouvement Black Lives Matter (BLM), qui proteste régulièrement contre les décès de Noirs victimes d’usage excessif de la force par la police.
Dans la soirée, le gouverneur de Virginie a attaqué les groupes d’extrême droite. « J’ai un message pour tous les suprémacistes blancs et les nazis qui sont venus aujourd’hui à Charlottesville. Notre message est simple et clair. Rentrez chez vous. Vous n’êtes pas les bienvenus dans cette belle communauté », a-t-il lancé.
Le Quotidien/AFP