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Escroquerie, Islande et Enrico Macias : le procès Landsbanki Luxembourg débute mardi


Le patron de la banque islandaise Landsbanki, ainsi que les dirigeants d'une filiale luxembourgeoise et des complices présumés seront jugés jusqu'au 24 mai à Paris. (illustration AFP)

Des centaines de propriétaires immobiliers, dont le chanteur Enrico Macias, emportés il y a presque dix ans dans la débâcle du secteur bancaire islandais : mardi s’ouvre à Paris le procès d’une vaste escroquerie.

Le patron de la banque islandaise Landsbanki, ainsi que les dirigeants d’une filiale luxembourgeoise et des complices présumés seront jugés jusqu’au 24 mai par le tribunal correctionnel de Paris. Neuf hommes et une personne morale doivent comparaître. L’escroquerie est passible d’une peine allant jusqu’à cinq ans de prison et de 375 000 euros d’amende.

Ils feront face à une centaine de parties civiles, propriétaires de biens immobiliers de valeur. Parmi eux, Enrico Macias, qui avait lancé l’affaire en portant plainte en mai 2009, et qui devrait s’exprimer devant les juges mercredi ou jeudi.

L’ordonnance du juge Renaud Van Ruymbeke – document qui renvoie formellement l’affaire devant un tribunal – explique méthodiquement une escroquerie à double ressort : les victimes ont été trompées sur la solidité de l’établissement bancaire et sur les risques du montage financier.

2007, la plus grande crise financière de l’histoire s’amorce et la majorité des banques européennes, inquiètes, deviennent avares en crédits. Au contraire des banques islandaises, qui se développent encore frénétiquement à l’étranger. A cette époque, Landsbanki Luxembourg propose à des propriétaires français de gager auprès d’elle leurs villas et autres appartements, en échange d’un prêt correspondant à la valeur des biens, et d’au moins 500 000 euros.

Une banque qui a « vendu du vent »

Ces propriétaires ne perçoivent qu’une partie du crédit en argent frais, la banque convertit le reste en placements, dont le rendement est censé couvrir les intérêts. Un prêt à taux zéro, en quelque sorte, qui séduit entre autres un couple anglais fortuné, le propriétaire d’une salle de gym, un retraité touchant moins de 1 000 euros par mois, et Enrico Macias.

Le chanteur veut rénover une villa à Saint-Tropez, mais ne trouve pas de financement auprès des banques françaises. Il fait affaire avec Landsbanki Luxembourg, qui lui prête un montant « exceptionnellement élevé », souligne le juge d’instruction : 35 millions d’euros.

Enrico Macias perçoit en réalité neuf millions, moins les frais, le reste étant placé par la banque. Lorsqu’il signe, en juillet 2007, les signaux sont déjà au rouge pour le secteur bancaire islandais, hypertrophié, avec une banque centrale impuissante et un organisme de régulation dépassé.

Les représentants de Landsbanki Luxembourg vantent la solidité d’un établissement auréolé d’un AAA, la meilleure note des agences de notation, alors même que, selon le juge Van Ruymbeke, la situation de la maison-mère islandaise est déjà « gravement compromise ».

La crise éclate véritablement à la fin de l’été 2008 : le gouvernement islandais décide alors de nationaliser les trois principales banques, dont Landsbanki, le 7 octobre. La filiale au Luxembourg est mise en liquidation. Les propriétaires ayant souscrit les prêts litigieux se voient réclamer un remboursement intégral, alors qu’ils n’ont touché qu’une partie des fonds. S’ils refusent, ils sont assignés en justice, et menacés d’une saisie des biens hypothéqués. Les plaintes s’accumulent et le scandale Landsbanki Luxembourg éclate.

Parlant d’une « course au triple galop pour éviter la faillite », Me Eric Morain, avocat de plusieurs parties civiles, reproche à la banque d’avoir « vendu du vent dans l’objectif de mettre la main sur des biens immobiliers à forte valeur ajoutée. »

Le Quotidien/AFP