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Esch : « Sous l’emprise d’une force », il avait incendié la voiture de son cousin


Le prévenu dit avoir souffert d'hallucinations et entendu des voix. Dans ce délire, il aurait pensé que son cousin était un extraterrestre... (illustration Didier Sylvestre)

En septembre 2017, à Esch, Sven H. avait mis le feu à la voiture à bord de laquelle il se trouvait avec son cousin. Des faits pour lesquels le parquet avait requis dans un premier temps 15 ans de réclusion. Aujourd’hui sa position n’est plus la même. Car selon le second expert psychiatre entendu lundi, le jeune souffrant d’une schizophrénie paranoïde n’est pas accessible à une sanction pénale.

« Au moment des faits, il était atteint de troubles mentaux ayant aboli son discernement. Il a agi sous l’emprise d’une force à laquelle il n’a pas pu résister. Il n’est pas accessible à une sanction pénale. » Voilà la conclusion livrée lundi après-midi par le second expert psychiatre chargé d’examiner le prévenu, Sven H. (26 ans), le jeune homme qui avait incendié le 23 septembre 2017 le véhicule de son cousin. Alors que ce dernier était au volant et lui sur le siège passager, il avait pris la bouteille d’alcool à brûler et sorti le briquet…

Les faits s’étaient produits le samedi peu avant 18h, rue Burgoard, près de l’ancien pont ferroviaire, à Esch-sur-Alzette. Le prévenu dit avoir souffert d’hallucinations et entendu des voix. Dans ce délire, il aurait pensé que son cousin était un extraterrestre…

Délire psychotique

Plus que les faits, c’est la question de savoir si le jeune homme est accessible à une sanction pénale qui pose problème. Au lieu de rendre leur jugement comme prévu le 29 novembre dernier, les juges avaient préféré ordonner une expertise supplémentaire. Mais aujourd’hui, la 9e chambre criminelle se retrouve donc face à deux conclusions différentes. «Ça fait froid dans le dos d’avoir des rapports si différents», remarquait la présidente lundi après-midi.

Si l’expertise complémentaire conclut à une abolition du discernement de l’homme souffrant d’une schizophrénie paranoïde, la première psychiatre, qui avait été chargée par le juge d’instruction, parle en effet d’une simple altération. Une position qu’elle a maintenue lundi. Selon elle, le jeune homme est bien accessible à une sanction pénale. Il aurait sa part de responsabilité parce qu’il avait arrêté son traitement et consommé des drogues.

Or, selon le second psychiatre, la consommation de cannabis a pu faciliter le délire mais ne l’a pas provoqué. Dans le cadre de son expertise, il a pu retracer que le prévenu a la première fois consulté un psychiatre à l’âge de sept ans. Ses premiers symptômes de psychose étaient apparus en 2015, quand il avait 23 ans. Il fallait s’attendre que tôt au tard, il présente un délire psychotique. Peu avant les faits, son médecin traitant, voyant que la situation était grave, avait ainsi appelé une ambulance pour l’emmener au CHEM. Mais les urgences étant surchargées, Sven H. avait fini par rentrer chez lui. La suite, on la connaît…

«Le doute doit profiter au prévenu»

«Un an et demi de prison pour une voiture brûlée et une incapacité de travail de cinq jours devraient suffire», a enfin considéré le psychiatre. Étant donné que le prévenu ne constitue pas un danger et qu’il veut se faire soigner, il estime qu’il «est apte à une hospitalisation libre ou un placement dans une structure intermédiaire».

Des conclusions qui ont quelque peu chamboulé les réquisitions du parquet. Si, au mois de novembre, son représentant avait requis 15 ans de réclusion contre le prévenu en détention préventive, lundi il a demandé l’application de l’article 71 du code pénal, c’est-à-dire que le prévenu « n’est pas pénalement responsable » de ses actes : «En raison des deux conclusions différentes des experts, le parquet estime qu’il y a un doute. Un doute qui doit profiter au prévenu.»

L’article 71 prévoit également le placement du prévenu dans un établissement ou service habilités. De l’avis de son avocat, Me Éric Says, il a la volonté de poursuivre son traitement. Voilà pourquoi il a demandé de ne pas ordonner de «placement forcé». «Je demande une deuxième chance. J’aimerais faire une thérapie», a réaffirmé le prévenu, avant que les juges ne prennent l’affaire en délibéré. Prononcé le 14 mai.

Dans cette affaire, le cousin blessé s’est constitué partie civile. Par le biais de son avocat, Me Pim Knaff, il a demandé 10 000 euros de dommages et intérêts. L’assurance, représentée par Me Wirion, quant à elle, réclame quelque 27 000 euros.

Fabienne Armborst